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philosophe la triste fragilité des grandeurs et les misères humiliantes de la condition humaine, tandis que le calme de cet asyle et l'agrément d'un beau paysage portaient dans son âme des sentimens de douceur et de bienfaisance.

Oh! si ces écrits où son âme est répandue, si l'aspect de ces lieux où ils ont pris naissance, m'avaient inspiré une partie de son éloquence, j'aurais pu prétendre à la gloire de le retracer fidellement dans ce discours à la province qui l'a vu naître, à cette congrégation illustre où il s'est formé, à la capitale qui l'admira, à la cour qu'il aurait corrigée si elle pouvait l'être, à l'Académie française dont il fut un des plus dignes ornemens, à cette autre Académie qui propose aujourd'hui son éloge, à l'église de Clermont qu'il a gouvernée avec tant de sagesse, à l'église de France qu'il a éclairée, à l'humanité entière qu'il a instruite et honorée.

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NE E désespérons jamais de la patrie, fixons nos regards sur les grands-hommes qu'elle a produits; que ce souvenir soit notre consolation et notre espérance dans les tems malheureux où nous pourrions dégénérer de leur vertu : leur exemple peut tout; il peut encore les reproduire, et la gloire ne se montre jamais en vain aux yeux des Français.

O mes concitoyens ! ô disciples et descendans de ces grands-hommes ! ne voyez-vous pas à leur nom seul, l'honneur, l'antique honneur rallumer ses flammes et créer des ressources, le titre de Français prendre un caractère plus auguste et vous imposer des devoirs plus saints? Ne sentez-vous pas renaître dans votre âme élevée, agrandie, le courageux amour de l'ordre, le tendre amour de l'humanité, la passion pour la gloire, et l'indifférence pour les honneurs? Ne respirez-vous pas cette noble

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ardeur de servir l'innocence, la vertu, la beauté, la faiblesse, la pauvreté, l'État avant tout, P'État, fût-il ingrat et injuste? Ah! si le luxe empoisonneur, la mollesse meurtrière, la frivolité qui sappe tout principe et détruit toute vertu, la fausse politesse, toujours si voisine de la barbarie; les perfidies de l'intrigue, les bassesses de l'intérêt; si tous ces vices des cours pompeuses et des cités opulentes ont souillé nos cœurs, si surtout le vil empire de l'or nous a dégradés, que le nom des hommes vertueux soit pour nous ce bouclier magique à l'aspect duquel Renaud se réveille, rougit et brise ses fers.

La saine philosophie qui anime et dirige aujourd'hui les lettres, veille aussi sur la patrie et sur l'humanité : le bonheur public est son objet éternel. Tandis que le sot la craint, que le méchant la calomnie, que le peuple l'ignore, que des grands la dédaignent, que des rois mêmes s'en défient, elle sert et les rois et les peuples; elle découvre les principes de corruption et de mort que l'État renferme dans son sein; elle lui montre, et ses dangers, et ses ressources; elle appelle l'éloquence au secours des mœurs expirantes; elle appelle nos ancêtres au secours de nos contemporains. Voyez tous les corps littéraires ressusciter à l'envi les grands noms et les grandes actions. De tant de justes éloges donnés aux morts illustres, de tant de voix qui s'élèvent en

faveur du mérite qui n'est plus, se forme une voix unique et universelle, qui nous crie sans cesse :

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Français, voilà ce que vous étiez, voilà ce qu'il » faut que vous redeveniez si vous craignez votre

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» ruine. »

Parmi les modèles dont notre faiblesse peut avoir besoin, en fut-il jamais de plus parfait que ce Pierre du Terrail, si connu sous le nom du Chevalier Bayard? Sa vie entière n'est qu'une suite d'exploits incroyables et d'actions généreuses, non moins incroyables peut-être aujourd'hui. Si tant d'héroïsme a droit d'étonner notre siècle, si ce siècle a le droit malheureux d'être incrédule sur la vertu, qu'il respecte au moins le témoignage de l'Histoire, qu'il ne juge point du passé par le présent, et qu'au lieu de rabaisser la grandeur de nos aïeux jusqu'à notre faiblesse, il cherche à élever jusqu'à eux leurs descendans.

Toujours vainqueur dans les tournois, dans les combats singuliers, hardi dans les coups de main, savant dans les expéditions plus importantes, Bayard fut le plus grand des guerriers. Doux, simplè, modeste dans la société, amant délicat, àmi sincère, franc chevalier, pieux, humain, libéral, il fut le meilleur des hommes. La bienfaisance, qui embellit et anima toutes ses vertus, joint un intérêt touchant à l'éclat imposant de sa gloire, Célébrons,

et

et cette gloire, et surtout cette bienfaisance. Défenseur de la patrie, consolateur de l'humanité, voilà les deux points de vue principaux sous lesquels nous allons considérer Bayard..

PREMIÈRE PARTIE.

Valeur et talens militaires du chevalier Bayard.

que vous

Rois, ministres qui commandez la guerre, la vengeance du Roi des rois vous apprendra un jour quel était le prix de ce sang des hommes répandiez sur la terre comme l'eau ! Le devoir des sujets est d'obéir sans vous juger, de vous défendre lors même que vous attaquez injustement, et de mourir pour vos caprices. Ce qui fait votre crime, fait ainsi leur gloire, et les victimes sont illustres autant que l'oppresseur du genre humain est odieux. Le sang des du Terrail coula toujours pour la patrie. Avant la réunion du Dauphiné à la France, ils mouraient pour les dauphins de Viennois leurs maîtres ils moururent depuis pour nos rois. Le trisaïeul de Bayard fut tué sous les yeux du roi Jean à cette funeste bataille de Poitiers, son bisaïeul à la bataille d'Azincourt, son aïeul à celle de Mont-Lhéri; les du Terrail ne survivaient point aux désastres de la France quand ils pouvaient obtenir la mort. Leur fils malheureux ne put l'obtenir. Privé pour Q

Tome I.

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