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INTRODUCTION.

GUILLAUME

UILLAUME SALDEN d'Utrecht, compofa un excellent Ouvrage qu'il fit imprimer à Amfterdam en 1688; il eft intitulé: Guillelmi Saldeni de Libris variorumque eorum ufu & abufu, Libri duo cum indicibus, in - 8. c'està-dire, des Livres & de leurs différents ufages & abus avec des notes.

Cet Ouvrage eft divifé en deux Parties. La première traite, en neuf Chapitres, de ceux qui aiment les Livres. On y rapporte les noms de quelques perfonnes qui ont beaucoup écrit, ou qui fe font rendues célèbres par leurs Ouvrages. L'Auteur décrit enfuite la manière dont les Livres des Anciens étoient faits; la matière & la forme de leurs volumes. Il fait voir après qu'il y a eu des Femmes favantes dans tous les fiècles, & qu'une étude bien réglée ne fauroit nuire au beau-fexe.

La multitude des Livres eft le fujet du fecond Chapitre. On y fait mention des Bibliothèques qui ont fait le plus de bruit, & de l'invention de l'Imprimerie. On y examine fi cette quantité prodigieufe d'écrits, & la grande lecture, gâtent le bon fens. Salden y donne des règles pour s'empêcher de tomber dans le nombre des méchants Auteurs tels que ceux qui écrivent à la hâte, & plutôt pro fame. que pro fama. Que le ftyle d'un Ouvrage quelconque doit être modefte, doux & modéré, & quelquefois élevé, fuivant la matière que l'on traite. Dans le troifième il fait voir que l'ordre eft l'ame des Livres, & que ceux qui n'ont point de méthode n'ont que des idées confufes de ce qu'ils avancent.

On examine dans le Chapitre quatrième, en quoi confifte la folidité d'un Ecrit. Dans le cinquième, quelle en doit être la clarté. On fait voir dans le fixième combien la brièveté eft agréable, & la différence qu'il y a entre un plagiaire & ceux qui font un ufage judicieux de leur érudition.

Le feptième Chapitre traite de la lecture en général; & fon y prouve que loin de nuire, par exemple, à un Théologien, il ne fauroit entendre à fond les Auteurs facrés ni

les Eccléfiaftiques, s'il n'a une grande connoiffance des Auteurs profanes.

Il eft queftion du choix des Livres dans le huitième Chapitre & de la manière de lire avec fruit.

On parle, dans le neuvième, de plufieurs Bibliothécaires célèbres & de divers Princes qui ont favorifé les Sciences. La feconde Partie traite, en cinq Chapitres, 1o. de l'indifférence qu'on a pour les Livres, & de fes principales causes, la pareffe & l'avarice.

2o. De l'amour de la nouveauté qui fait oublier infenfiblement les Livres des Anciens.

3°. De l'orgueil & de la fotte vanité des Savans qui fe méprisent & fe dénigrent l'un l'autre.

. De l'envie mutuelle qu'ils fe portent.

5°. Salden enfin tâche, dans le dernier Chapitre, de mettre les Auteurs à couvert de l'envie ou de la haine qu'on pourroit concevoir contre leurs Ouvrages; & parle enfuite de la différente destinée des Livres.

Nous fommes toujours étonnés que cet Ouvrage n'ait pas été traduit. Une Traduction bien faite conviendroit à tous ceux qui s'occupent de la Littérature, & principalement aux Gens-de-Lettres, Bibliographes, Bibliothécaires, &c. &c.

Il feroit à fouhaiter, pour la République des Lettres que les Libraires fuffent favants, ou que les Savants fuffent Libraires, & qu'ils fiffent revenir le fiècle des Turnèbes, des Manuces, des Eftienne, des Elzeviers, des Froben des Plantin, &c. afin de nous donner de bonnes Editions des Ouvrages des Anciens, & pour applanir le chemin des études qui, fort fouvent, font très difficiles, fans y faire naître de nouvelles difficultés par des négligences abfurdes, comme on n'en rencontre que trop fouvent dans les Ouvrages modernes de nos jours.

ESSAI

DE BIBLIOGRAPHIE,

ου

De la connoiffance & de l'amour des Livres, de leurs divers degrés de rareté, de la maniere de les claffer, & de l'ordre de leurs facultés.

L n'eft pas toujours facile de trouver des Livres; fouvent la difficulté d'en découvrir certains en fait la rareté; elle croît & décroît en raison égales, felon la diverfité des temps, des lieux & des perfonnes.

Tel Livre aujourd'hui fera très-commun, qui, dans dix ou vingt ans, fera très-rare, ou peut-être dans peu.

Tel autre fe préfentera chaque jour chez l'Etranger, que l'on chercheroit vainement en France.

Le troifième ne fauroit échapper à la vigilance d'un homme dont les correfpondances s'étendent jufqu'au bout de l'Europe; tandis qu'il eft inacceffible pour celui dont les liaisons ne vont pas au-delà des bornes de fa patrie.

Les inclinations des hommes étant variées, prefque tous agiffant par

des motifs différens.

Les uns ne défirent abfolument un Livre que pour le lire attentivement, le confulter fur le fujet qui les occupent, y avoir recours au befoin, s'en fervir enfin; auffi l'amour des Livres n'eft-il véritablement eftimable qu'autant qu'on fait les apprécier, les lire en philofophe, diftinguer ce qu'il peut y avoir de bon d'avec ce qu'ils peuvent contenir de mauvais, & qu'on les poffede pour les autres autant que pour foi-même.

D'autres n'afpirent au plaifir d'avoir des Livres que dans la vue d'enrichir leur Cabinet, d'y entaffer les Sciences à prix d'ar gent, & fouvent même efclaves de la vanité, pour orner ces mêmes Livres de magnifiques reliures, & pour le feul plaifir de les contempler fans ofer les ouvrir.

Selon nous, les premiers ont des reffources beaucoup plus

étendues que ceux-ci : les Bibliothèques publiques ou particulières font autant de tréfors pour ceux qui ont la liberté d'y puifer, dans l'efpoir d'y rencontrer l'objet de leurs défirs.

Les derniers n'envifagent au contraire ces précieux dépôts qu'avec envie ; ce font pour eux autant de fåcheufes prifons qui detiennent en captivité les Auteurs qu'ils voudroient faire paffer fous leur domination, autant d'abîmes affreux qui englou fiffent pour toujours les Ouvrages les plus rares & les plus curieux ils leur préfentent inceffamment de nouveaux obftacles dont ils ne triomphent qu'à force d'argent & de difficultés.

Les Bibliothèques paffagères leur font plus fupportables, parce· qu'elles atteignent ordinairement leur période au décès de leurs poffeffeurs, & qu'étant enfuite expofés au gré des acheteurs, ils trouvent ainfi la facilité de fe procurer les Livres qui conviennent le plus à l'accroiffement de ceux qu'ils ont déja.

Ce feroit fans doute le cas de rapporter ici toutes les Bibliothèques & Catalogues, tant des Cabinets de France que des Pays étrangers des temps les plus reculés ; mais ce détail formeroit des volumes nous renvoyons à ce fujet à l'Encyclopédie, article Bibliothèque, au Traité des plus belles Bibliothèques publiques & particulières du P. Louis Jacob, imprimé à Paris en 1644; Traité des Bibliothèques, par Jufte Lipfe, intitulé: Jufti Lipfi de Bibliothecis Syntagma. Lugduni, 1623. in-fol. Traité des plus belles Bibliothèques de l'Europe, par le Galois, 1685. in-12. Bibliotheca Bibliothecarum Philippi Labbé, e Societate Jefu. Parifiis, 1644. in-8. Bibliotheca Bibliothecarum Bernardi de Montfaucon. Parifis, 1739, 2 volumes in fol. &c.

Nous nous contenterons de dire que la première, la plus grande & la plus magnifique Bibliothèque dont il eft fait mention dans l'antiquité, eft celle de PTOLEMÉE PHILADELPHE, Roi d'Egypte, à Alexandrie, qui, par les foins de Demetrius Phalerius, devint dans la fuite fi nombreufe & fi célèbre qu'elle étoit compofée de plus de fept cent mille volumes lorf qu'elle fut pillée & brûlée par les Sarrafins à la prife d'Alexandrie, l'an de Grace 682. (Voyez l'Encyclopédie, "article BIBLIOTHÈQUE.)

Du reite, les plus célèbres Bibliothèques du dernier temps, ont été celles de M. de Thou, de M. le Tellier, Archevêque de Reims; de M. Bulteau, fort riche en Livres fur l'Hiftoire de France; de M. Coiflin, abondante en manufcrits grecs; de M. de Baluze; de M. du Fay; du Cardinal du Bois; de M. Colbert; du Comte de Hoym, de M. le Maréchal d'Eftrées, de M. Bigot, le M. Danti-Difnard, de M. Turgot de Saint-Clair, de M. Burette, de M. l'Abbé de Rothelin, de M. le Duc de la Vallière, de M. de Gaignat, de M. d'Agueffeau, de M. Baron, de M. de la Briffe, de M. le Prince de Soubife, de M. Dangard, &c., dont les Catalogues exiftent, & qui ont été faits la plupart par des Savans. Voyez au tome premier la Préface de ce Dictionnaire.)

Nous avons encore aujourd'hui des Bibliothèques qui ne le

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