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à peine même si Septimius et son livre méritent une place dans ce chapitre. L'écrivain est dénué de toute espèce de talent, et l'ouvrage n'a presque rien de commun avec l'histoire. Cet ouvrage est intitulé: de la Guerre de Troie, ou encore, Ephéméride de la Guerre de Troie. C'est, selon toute apparence, une traduction plus ou moins libre de l'ouvrage grec composé par un certain Praxis ou Eupraxide, contemporain de Néron, et connu vulgairement sous le nom de Dictys de Crète. Septimius ne peut servir de rien à personne, sinon aux commentateurs d'Homère ou des anciens poëtes.

Eutrope.

Flavius Eutropius, sans être un aigle, est du moins autre chose qu'un compilateur ou traducteur de fables. Son Abrégé de l'Histoire romaine, en dix livres, depuis Romulus jusqu'à Jovien, n'est pas sans quelque utilité, comme revue rapide des faits; et on y trouve, pour ce qui concerne les derniers temps, des renseignements assez précieux. Eutrope est généralement exact et digne de foi. Il cherche le vrai; mais sa critique n'est pas toujours assez sévère, et son patriotisme romain lui fait négliger quelquefois ou passer sous silence les choses qui ne font point assez d'honneur au peuple-roi, ou même à ses maîtres. Le style d'Eutrope est simple et clair; seulement le mauvais goût du siècle perce çà et là dans la diction. En somme, l'auteur a fait une œuvre estimable, et qu'on peut lire même après celles de Velléius ou de Florus; mais ce n'est pas à lui non plus que nous pouvons décerner le titre d'historien. Cet homme, qui ne manquait pas de quelque talent, vivait à la même époque qu'Aurélius Victor. Il fut, dit-on, secrétaire de Constantin; il suivit plus tard l'empereur Julien dans son expédition contre les Perses. En 371, il était proconsul en Asie; et c'est par l'ordre de Valens, et pour l'usage même de cet empereur, qu'il écrivit son ouvrage.

Sextus Rufus.

C'est l'empereur Valens encore, dit-on, qui fit rédiger

par Sextus Rufus, écrivain inconnu d'ailleurs, un autre précis du même genre que celui d'Eutrope, mais beaucoup plus court. Quelques-uns contestent l'authenticité de ce petit ouvrage, ainsi que celle d'un autre opuscule attribué au même Rufus, et intitulé: des Quartiers de la Ville de Rome. Au reste, ces deux écrits n'ont d'importance que pour les érudits, et la littérature n'a rien à y voir.

Ammien Marcellin.

Nous avons dû réserver pour la fin de ce chapitre Ammien Marcellin, le seul homme en qui ait revécu quelque chose des grands narrateurs d'autrefois; Ammien, le dernier des historiens de Rome, le dernier presque des Romains, un beau talent et une belle âme.

Ammien Marcellin était Grec de naissance. On croit même qu'il ne fait qu'un avec ce Marcellinus de qui nous avons un excellent commentaire grec sur l'ouvrage de Thucydide. Ammien florissait vers le milieu du quatrième siècle. Dans sa jeunesse, il avait embrassé la carrière militaire, et il avait fait partie des protecteurs domestiques, espèce de gardes du corps des empereurs, où l'on n'admettait que des hommes de famille distinguée. Il fit la guerre en Orient et dans les Gaules. Quelques passages de son histoire font présumer qu'il prolongea sa vie jusqu'aux environs de l'an 390. C'est bien à tort que certains critiques ont voulu faire de lui un chrétien. Ce n'est qu'un esprit élevé et impartial, qui sait rendre justice à ceux même dont il ne partage pas les opinions. Il parle du christianisme avec modération; il loue la vertu et la constance des confesseurs de la foi nouvelle; il ne dissimule pas la vanité des tentatives de Julien pour relever le temple de Salomon; il se moque des superstitions populaires, et stigmatise énergiquement l'impiété et les vices des contemporains. Mais ses affections sont manifestement ailleurs qu'au christianisme. C'est la vieille Rome qu'il aime; ce sont ces institutions politiques et romaines qui avaient fait la grandeur du peuple-roi. Il est Romain et païen par ses souvenirs; et Julien est son héros, encore qu'il n'approuve pas tous les moyens mis en œuvre

par cet étrange réformateur pour la restauration du culte antique.

Ouvrage d'Ammien Marcellin.

L'ouvrage d'Ammien contient l'histoire de l'Empire, depuis le temps des Flaviens jusqu'au règne de Valens. C'est la continuation des récits de Tacite; mais ce n'est ni le génie de Tacite, ni surtout son style. La diction d'Ammien est à demi barbare. Il y a encore d'autres défauts dans cette histoire; et l'auteur n'est pas toujours exact dans ses indications géographiques. Mais toutes ses imperfections sont compensées par de sérieuses et fortes qualités. C'est un guide habile et fidèle, comme le caracterise Gibbon, et qu'on peut suivre hardiment, même à travers les événements contemporains, parce qu'il est libre de passions et de préjugés. Sa manière a quelque analogie avec celle de Polybe. En effet, Ammien cherche ardemment la vérité; il sait pénétrer le secret des affaires humaines, et il n'est point étranger à l'art de la guerre. Comme Polybe aussi, il exprime sa pensée avec une rare énergie; mais il a plus d'imagination que Polybe, et il trace quelquefois de grands et saississants tableaux; des tableaux, sauf un certain excès de couleur, presque dignes du pinceau de Tacite. Il abonde en mots heureux, en réflexions aussi justes que profondes. Voyez, par exemple, avec quelle verve d'esprit, avec quelle force de raison, il tourne en ridicule les superstitions des Romains de son temps: « Un grand nombre d'entre eux n'oseraient ni prendre le bain, ni dîner, ni paraître en public, avant d'avoir consulté, selon les règles de l'astrologie, la position de Mercure ou l'aspect de la lune. Il est assez plaisant, ajoute-t-il, de découvrir cette crédulité chez un sceptique impie, qui ose nier ou révoquer en doute l'existence d'un Dieu tout-puissant. On voit que Censorinus connaissait. assez bien son public, et qu'il ne perdait pas tout à fait son temps, pour la réputation et le profit, quand il consacrait ses veilles à composer l'étrange livre du Jour natal.

Il n'a manqué à Ammien Marcellin que de vivre dans un meilleur siècle, ou du moins de travailler à réparer ce dés

avantage à force d'art et de goût, et à se rendre plus conforme aux vrais modèles. Mais c'est déjà une belle gloire d'avoir élevé un monument solide et durable, et d'avoir fait, sinon un livre accompli, du moins un grand livre.

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CHAPITRE XLV.

LES DERNIERS PROSATEURS.

Symmaque. Symmaque écrivain. - Discours de Symmaque. - Lettres de Symmaque. - Macrobe.

X Symmaque.

Quintus Aurélius Avianus Symmachus naquit à Rome dans la première moitié du quatrième siècle. On ne saurait, même à dix ans près, fixer la date de sa naissance. Il était d'une famille riche et considérée; son père fut chargé d'emplois importants. Le jeune Symmaque reçut une éducation très-soignée, et se trouva de bonne heure en état de courir la carrière des fonctions publiques. En l'an 368, il était intendant de la Lucanie et du Brutium; en 370, il gouvernait l'Afrique, avec le titre de proconsul. Et ce n'étaient pas là les premières dignités dont il eût été honoré il avait été déjà questeur, préteur et pontife. En 383, à Rome, il eut l'occasion de signaler son zèle pour la religion païenne. Une horrible famine, causée par une longue sécheresse et par l'imprévoyance des administrateurs, soulevait les clameurs du peuple. Les païens imputaient cette calamité au renversement des anciens autels. Une partie des sénateurs, et Symmaque à leur tête, demandèrent le rétablissement de l'autel de la Victoire, que Gratien avait fait enlever de la salle des séances du sénat. Gratien n'y consentit pas. Ses successeurs ne furent pas moins sourds à la requête. Cette requête subsiste, au moins sous la dernière forme que Sym

maque lui a donnée. Elle est adressée, au nom du sénat, par Symmaque, alors préfet de Rome, à Valentinien II, à Théodose et à Arcadius; mais elle ne fut présentée en effet qu'à Valentinien. C'est un plaidoyer complet en faveur du paganisme, et un plaidoyer qui ne manque ni d'adresse ni d'éloquence. Symmaque eut au moins la gloire, comme dit Fléchier, d'avoir assez bien défendu sa mauvaise cause. Il eut une gloire plus enviable encore le grand saint Ambroise ne dédaigna pas de lui répondre, et de discuter un à un ses arguments. En 389, Symmaque fut exilé par Théodose, pour s'être osbtiné à réclamer de nouveau le rétablissement de l'autel de la Victoire. Mais il rentra presque aussitôt en grâce. Il survécut plusieurs années à Théodose; et les fils de Théodose, Arcadius et Honorius, ne furent pas moins bienveillants que leur père pour ce païen entêté, mais plein de probité et de talents. Symmaque resta aux affaires jusqu'à la fin de sa vie; mais il ne dut pas la prolonger bien loin au delà de l'an 400.

L'affection de Symmaque pour la religion de ses pères ne le rendit point persécuteur. Le pape Damase prit sa défense, quand on l'accusa d'avoir sévi contre les chrétiens, à l'occasion d'une enquête sur certains dégâts causés par la malveillance aux murailles de Rome. Plusieurs chrétiens, et des plus illustres, étaient les amis de Symmaque. Saint Ambroise et Prudence, qui ont écrit contre lui, ne contestent pas ses vertus, et ils portent aux nues son génie. Symmaque, dans le commerce ordinaire de la vie, était la tolérance même. Sa requête pour le paganisme témoigne aussi, en plus d'un passage, de l'élévation de son âme. On dirait que Thémistius n'a pas été étranger à la rédaction de cet éloquent écrit. Symmaque reproduit presque textuellement le fameux argument de Thémistius sur la liberté des cultes. << Nous contemplons, s'écrie-t-il, les mêmes astres; un même ciel nous environne, et nous adorons tous le même Dieu : qu'importent les chemins divers que nous prenons, en cherchant à le bien connaître? c'est à lui que tous aboutissent. »

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