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Considérons maintenant le dogme. Dieu a fait le ciel et la terre, il l'a fait de rien, il l'a fait par bonté et il le gouverne. Cependant, il y a du mal dans le monde. C'est que le premier homme étant libre a abusé de sa liberté, et que Dieu l'a puni dans sa race. En même temps, comme la bonté de Dieu est aussi infinie que sa justice, il consent qu'une expiation soit offerte, et que par la vertu de cette expiation, l'homme puisse remonter au rang dont il est déchu par la faute d'Adam. Qui offrira cette expiation? Un Dieu seul peut apaiser la justice d'un Dieu. Or, il n'y a qu'un Dieu; mais dans ce Dieu il y a trois personnes: mystère de la Trinité. L'une des trois personnes divines, Dieu le fils, descend sur la terre, revêt un corps humain, et meurt sur la croix: mystère de l'Incarnation, mystère de la Rédemption. Jésus-Christ, par sa vie et par sa mort, est deux fois notre bienfaiteur; car par sa vie il est notre exemple, et il est notre sauveur par sa mort. A partir de cette mort, l'homme peut être lavé de la tache originelle. Il reste libre, comme l'était déjà notre premier père avant sa chute, par conséquent capable de démériter comme lui, ou de mériter; et Dieu, qui consent à le relever de sa déchéance, peut en outre lui appliquer, par sa bonté, le mérite du sacrifice de Jésus-Christ. Ainsi la grâce se place à côté de la volonté pour la diriger et la soutenir. La grâce est nécessaire à l'homme pour faire le bien; et cependant il mérite en le faisant, parce que, en vertu de sa liberté, il peut se refuser aux

mouvements de la grâce. Le but que la religion assigne à la vie humaine est exprimé par ces paroles, que l'Église enseigne aux petits enfants, et dont la sublimité arrache des larmes : Dieu nous a créés et mis au monde, pour le connaître, l'aimer, le servir, et par ce moyen acquérir la vie éternelle. Le bonheur de la vie éternelle est décrit par ces paroles : Voir Dieu face à face, et l'aimer de tout son cœur pendant toute l'éternité.

A ces dogmes qui sont le fondement de la religion catholique, il faut en ajouter un autre, qui semble enveloppé de plus d'obscurité. Au delà du monde visible, il existe des esprits infiniment inférieurs à Dieu, dont ils sont les créatures, en même temps trèssupérieurs à l'homme. Il y a parmi eux des degrés et une hiérarchie qui nous sont imparfaitement connus '; mais nous savons qu'ils peuvent mériter, puisque l'un d'eux est appelé saint, et démériter puisqu'un autre a commis le péché d'orgueil, et a été pour l'éternité chassé de la présence de Dieu. Cet

1. Dieu, qui est un pur esprit, a voulu créer de purs esprits comme lui, qui, comme lui, vivent d'intelligence et d'amour : qui le connaissent et l'aiment, comme il se connaît et s'aime luimême.... » Bossuet, Élévations, 4° semaine, élév. 1.

2. « Votre Écriture, qui ne ment jamais, et ne dit rien d'inutile, a nommé des anges, des archanges, des vertus, des dominations, des principautés, des puissances, des trônes, des chérubins, des séraphins. Qui entreprendra d'expliquer ces noms augustes, ou de dire les beautés ou les excellences de ces belles créatures? » Id., ib

3. « Des créatures si parfaites sont tirées du néant comme les autres et dès là, toutes parfaites qu'elles sont, elles sont peccables par leur nature. » Id., ib.

archange rebelle est dans ce monde, l'artisan du mal, et dans l'autre monde, le ministre de la vengeance cé· leste'. C'est lui qui a tenté le premier homme par la première femme; lui qui a tenté le Sauveur, avant la passion, pour qu'aucune des misères humaines ne fût épargnée à la Victime divine; lui qui, par les amorces du plaisir et de l'intérêt, nous tente chaque jour, et combat en nous l'influence de la grâce; lui qui présidera dans l'enfer au supplice des damnés. Sa puissance n'est qu'une puissance dérivée et secondaire, puisque l'homme même peut en triompher: elle n'en est pas moins formidable. Il est comme un lion, qui cherche sans cesse des victimes. Une seule faute suffit, si elle est grave, pour lui livrer une âme à jamais. Une faute moindre, ou une faute effacée par le repentir, n'entraîne qu'une punition passagère, dans un lieu de justice et de miséricorde à la fois, qu'on appelle le purgatoire. C'est ainsi que le catholicisme, sans que le dogme de la toute-puissance

1. « Vous vous êtes réduits à la basse et malicieuse occupation d'être premièrement nos séducteurs, et ensuite les bourreaux de ceux que vous avez séduits. » Bossuet, Élévations, 4° sem., élév. 2. Cf. le sermon Sur les fondements de la vengeance divine.

2. «< Ceux qui sortent de cette vie avec la grâce et la charité, mais toutefois redevables encore des peines que la justice divine a réservées, les souffrent en l'autre vie.... C'est ce que le concile de Trente nous propose à croire touchant les âmes détenues dans le purgatoire, sans déterminer en quoi consistent leurs peines, ni beaucoup d'autres choses semblables, sur lesquelles ce saint concile réclame une grande retenue. » Bossuet, Exposition de la doctrine de l'Église catholique.

divine en soit même effleuré, place la tentation à côté de la grâce, oppose l'enfer et le purgatoire au paradis, et met l'homme entre ces deux alternatives: voir Dieu face à face pendant l'éternité; brûler en enfer avec le diable, pendant l'éternité. Tel est le dogme catholique dans ses points fondamentaux. Voyons la pratique; voyons l'Église.

L'Église est établie pour deux fins: maintenir intact le dépôt de la foi; administrer les sacrements. Comme gardienne de la foi, l'Église a le gouvernement des esprits en tout ce qui constitue la religion. Tout fidèle doit recevoir d'elle, et d'elle seule, l'enseignement religieux et recourir à elle dans ses doutes. Quand elle a défini un point de dogme, sa définition doit être acceptée sans restriction ni réserve. Les plus puissants esprits sont soumis à cette autorité comme les plus humbles. Discuter une vérité de la foi, après que l'Église l'a reconnue, est un crime. L'accepter sous réserve, la modifier, ne fût-ce que dans les termes, est encore un crime. En douter, si on se laisse aller au doute, si on ne le combat pas dès l'origine, est une faute grave. L'esprit ne retrouve sa liberté que pour ce qui n'est pas article de foi.

Dans la pratique de la vie, l'Église, par l'administration des sacrements, a le gouvernement ou tout au moins la direction de la volonté. Elle a deux règles qu'elle impose à ses fidèles: l'une, sous le nom des Commandements de Dieu, est un résumé

des principales règles de la morale; l'autre sous le nom des Commandéments de l'Église, est l'ensemble des pratiques qui composent le culte catholique. Manquer gravement à l'un des préceptes de l'une de ces deux lois, c'est encourir les peines éternelles de l'enfer; et qu'on le remarque, les Commandements de l'Église ne sont pas moins obligatoires que les Commandements de Dieu. Nous ne disons pas, parce que rien n'autorise à le dire, qu'on soit également criminel aux yeux de l'Église catholique pour avoir violé une règle purement disciplinaire ou pour avoir tué un homme; mais ces deux infractions à la règle constituent l'une et l'autre un péché mortel, et sont punies l'une et l'autre de peines éternelles. Il est vrai qu'à côté de ces lois redoutables, il y a une loi de miséricorde. Si le pécheur se repent d'avoir offensé Dieu, et qu'il se confesse de son péché à un prêtre, ce prêtre lui pardonne au nom de Dieu, en lui imposant une pénitence, qui serait relativement insignifiante, quand même elle lui imposerait les plus cruels tourments, et qui consiste ordinairement en une aumône ou en une prière'. Ce pouvoir donné aux prêtres de remettre les péchés constitue le sacre

1. « Les saintes sévérités de l'ancienne pénitence soumettaient les pécheurs à de longues humiliations, à des rigueurs inouïes qui se pratiquaient sans relâche pendant plusieurs années. Les silices, les prosternements, les gémissements et le pain des larmes, le renoncement à tous les plaisirs, même les plus innocents, étaient l'exercice des saints pénitents qui s'estimaient trop heureux d'éviter par une si faible compensation les peines de la vie future, quoique

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