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distrait de cet orgueil, commet un second péché, si, après cette distraction, il consent à un nouveau mouvement d'orgueil, parce que la distraction fait que l'acte intérieur cesse entièrement, et n'a nulle liaison avec l'acte suivant. Les actes de la volonté, qui tendent à faire quelque action extérieure, ne s'interrompent que quand ils cessent en eux-mêmes, et dans l'opération à laquelle ils tendent. Un homme se propose de faire un homicide dans un lieu éloigné; il se met en route pour exécuter son dessein; et, pendant le chemin, il boit, il mange, il dort, il pense à beaucoup d'autres choses; son mauvais dessein persévère durant tout soa voyage, et, s'il l'exécute, il ne commettra qu'un seul péché d'homicide, d'autant plus grief cependant, qu'il aura renouvelé plus souvent la volonté de le commettre.

Les actes des autres facultés par lesquels on exécute la mau→ vaise volonté, étant multipliés, nous rendent coupables de plusieurs péchés, lorsqu'ils sont défendus par des préceptes de différente espèce. Ainsi, celui qui, par un seul acte de sa volonté, se porte à frapper, outrager et calomnier son prochain, commet trois péchés, parce que ce sont trois préceptes de différente espèce qui défendent de frapper, d'outrager et de calomnier le prochain.

La multitude des choses ou des objets qui font la matière des péchés en augmente le noin

bre, lorsque ces objets ne regardent pas la même personne, et ont chacun leur droit particulier. Ainsi, celui qui, par une seule action, vole cent écus à cent personnes différentes, commet cent péchés, parce que chacune de ces personnes en son particulier a droit qu'on ne la vole pas, et que par conséquent le voleur viole cent droits distingués, par une seule action. Il en est de même de celui qui, d'un seul coup, tuerait cent personnes, etc.

De l'inégalité et de la connexion des péchés.

1. Il est de foi que tous les péchés ne sont point égaux entre eux, comme le pensait Jovinien d'après les stoïciens. L'apôtre saint Jean, dans le cinquième chapitre de sa première épître, vers. 16, parle d'un péché qui donne la mort, et d'un autre qui ne la donne pas; et Jésus-Christ lui-même dit à Pilate: que celui qui le lui avait livré, était coupable d'un plus grand péché que lui: qui me tradidit tibi, majus peccatum habet. (Jean. 19, 11.) Or, cette inégalité des péchés vient, 1o. de la différence de leurs objets, en sorte que plus l'objet qu'on altaque par le péché est noble et excellent, plus le péché est énorme. C'est pour cela que les péchés qui attaquent Dieu immédiatement, sont plus grands de leur nature que les autres, à cause de l'excellence de l'objet. 2o. L'inégalité des péchés vient

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aussi du plus ou du moins de point. Le premier, qui a été liberté et d'ardeur qui se trouve condamné dans Luther et les dans l'acte du péché. 3o. Elle autres hérétiques, enseigne que vient aussi de la condition de la la sensualité ou la concupiscence personne qui pèche , et de celle est un véritable péché capable contre laquelle on pèche. C'est de nous damner, quoiqu'elle ne ainsi , par exemple, que les pé- nous soit pas imputée en vue chés commis par

des personnes des mérites de Jésus-Christ. ou contre des personnes consa- Le second sentiment, qui est crées à Dieu, sont plus grands suivi par Cajetan, Gonet et que les autres. Enfin le scandale beaucoup d'autres théologiens , qui accompagne les péchés et les enseigne que les mouvemens de dommages qui les suivent, con- la sensualité sont des péchés vétribuent aussi à les différencier. niels, indépendamment de tout

2. Tous les péchés ne sont pas consentement de la volonté. Ennécessairement liés ensemble, fin, selon le troisième sentiment, puisqu'il y en a plusieurs qui il ne peut y avoir aucun péché sont incompatibles, comme l'a- formel dans la sensualité ou varice et la prodigalité, et qu'il l'appétit sensitif, sans quelque cst évident que celui qui fait un consentement de la volonté, et mensonge, par exemple, ne se par conséquent la volonté est rend pas pour cela coupable de toujours le sujet immédiat du vol ou d'adultère. Lors donc que péché en ce sens qu'elle le prol'apôtre saint Jacques (Jacob., duit immédiatement par elle2, 10) assure que celui qui viole même, ou qu'elle le commande, la loi dans un seul point, se ou qu'elle y consent, quoique rend transgresseur de tous les l'on puisse dire, si l'on veut , autres, il ne veut dire autre qu'il y a des péchés, comme la chose, sinon que par un seul luxure.et l'intempérance, qui péché mortel, on perd Dieu, sa résident dans la sensualité comgrâce, son amitié, et que l'on me dans leur sujet immédiat et encourt la peine de la damna- subordonné à la volonté, sans tion éternelle.

le consentement de laquelle ils ne seront pas même vénielle

ment mauvais. Du sujet du péché.

Ce dernier sentiment, qui en. Le sujet du péché est médiat seigne qu'il n'y a pas mème du ou immédiat. Le sujet médiat péché véniel dans l'appétit sendu péché, c'est-à-dire, l'agent sitif sans quelque consentement capable de le commettre, n'est de la volonté, est également autre

que la créature raisonna- conforme à la raison et à l'autoble pendant l'état de la vie pré- rité ; car, r°. il n'y a point de sente. Quant au sujet immédiat péché sans liberté, ni de liberté il y a trois sentimens sur sans volonté. 2°. Si les mouve

S III.

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mens de l'appétit sensitif étaient ou que la sensualité mue sans des péchés véniels, indépen- l'empire de la raison et de la damment du consentement de volonté, est un péché véniel, la volonté, il s'ensuivrait que il faut l'entendre en ce sens , 1o. l'on pécherait en les éprouvant, le mouvement de la sensualité lors même que la volonté y ré- qui prévient la parfaite adver

У sisterait. Il s'ensuivrait aussi que tance de la raison, est un péché les mouvemens de la concupi- véniel , lorsqu'il est accompascence qu'on appelle primopri- gné d'une advertance imparfaimi, seraient des péchés véniels. te, et suffisante pour l'empêcher. 30. Saint Augustin et saint Tho- 2o. La tentation qui vient de la mas disent expressément que le chair ne saurait être sans péché, consentement de la volonté est lorsque la volonté peut l'empèabsolument nécessaire pour com- cher, et qu'elle ne l'empèche mettre quelque péché que ce pas. 3o. La sensualité mue sans soit. Aut negandum est peccatum l'empire de la raison et de la vocommitti , aut fatendum est 10- lonté, est un péché véniel, lorsluntate committi, dit le premier. que la raison a pu la prévenir et (lib. de verá religione , c. 14.) l'empêcher, et qu'elle ne l'a Non nisi voluntate peccatur, point fait par négligence, et ajoute-t-il. (lib. de duabus ani- faute de veiller suílisaminent mab. c. 10.) Non peccatur nisi sur elle-même. En un mot, voluntale sicut primò movente; toutes les fois que saint Thomas aliis autem potentiis peccatur dit que le péclié véniel peut se sicut ab motis, dit saint Tho- trouver dans le seul appétit senmas. (1 p. q. 18. a. 2. ad 1.) La sitis, il ne le dit jamais qu'en raison qu'il en donne, est que supposant que l'appétit sensitif le péché actuel consiste essen- a une sorte de liberté, quoique tiellement dans un acte désor- faible et imparfaite, qu'il emdonné dans l'ordre des meurs, prunte de la volonté, et cela et qu'il n'y a aucun mouvement conformément aux principes des dans cet ordre des mours que péripatéticiens. Que cette philopar rapport à la volonté, qui est sophie ne soit point la plus le principe de la moralité. (in commune aujourd'hui, il s'en2. d. 24. q. 3. art. 2.)

suivra seulement que saint ThoLors donc que ce saint doc- mas différera du commun, quant teur dit en quelques endroits, à la manière de philosopher , que a le mouvement de la sen- mais non quant au fond de la sualité qui prévient la raison, Théologie, puisqu'il reconnaît est un péché véniel, ou que la qu'il n'y a point de péché sans tentation qui vient de la chair, une sorte de liberté, au moins ne saurait être sans péché, à faible et imparfaite, qu'il supcause qu'elle se fait par la dé- pose que l'appétit sensitif emlectation et la concupiscence, prunte de la volonté.

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SIV.

même, vi le vouloir, ni le comDes causes du péché.

mander, ni y pousser les hom

mes, ni s'en servir comme d'insLa cause matérielle ou le sujet trumens pour le commettre. du péché, c'est surtout la volon- Toutes ces façons de concourir té, comine on vient de le dire.

au péché sont absolument conLa cause formelle, c'est le rap- traires à son essence infiniment port de difformité aux règles des parfaite; et la seule part qu'il meurs. La cause finale, c'est peut y avoir, c'est de le permetl'objet et la fin que se propose tre, ou de le souffrir, parce qu'il le pécheur. La cause efficiente est n'est pas tenu de l'empêcher par intérieure ou extérieure. La les lois de sa sagesse souveraine cause efficiente intérieure est de et de sa providence universelle. trois sortes; savoir, l'ignorance Il est vrai qu'il aurait pu étadu côté de l'entendement, la blir un autre ordre des choses passion du côté de l'appétit sen- créées , dont tous les maux ausitif, et la malice du côté de la raient été bannis; mais il n'y

; volonté. La cause efficiente ex- était point obligé, et il a choisi térieure du péché consiste , ou l'ordre présent des choses comdans les suggestions du démon, me plus propre à faire éclater ou dans les mauvais exemples et tous ses attributs, sa justice les sollicitations des hommes , aussi bien que sa bonté. Ainsi ou dans les objets sensibles qui tous les passages de l'Écriture ou poussent au péché.

des Pères, qui semblent dire Des causes efficientes intérieu- que Dieu veut le péché, qu'il res du péché.

l'a déterminé de toute éternité,

qu'il le commande, qu'il y pousQuant à l'ignorance , voyez se les hommes, ou les démons, IGNORANCE et ACTES HUMAINS, SIII, et qu'il s'en sert comme d'ins

Quant à la passion, voyez trumens pour le commettre, tous ACTES HUMAINS, ibid.

ces passages doivent s'entendre Les péchés de malice que l'on ou d'une simple tolérance de la commet comme de sang.froid et part de Dieu, ou d'une sousavec une pleine liberté, sont traction de grâces qu'il n'est plus grands que les autres de leur point obligé d'accorder, ou nature, parce qu'ils sont plus d'une influence qui se borne au libres et plus volontaires. physique du péché. Des causes efficientes extérieu

Le démon peut bien être la res du péché.

cause inorale et indirecte du

péché, en excitant la concupisDieu ne peut être la cause effi- cence, en remuant l'imaginaciente extérieure du péché, ni tion, et en proposant des obdirecte ni indirecte, parce qu'il jets agréables aux sens intérieurs ne peut, ni le commettre lui- et extérieurs ; mais il n'en peut

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élre la cause directe et suffisan- et enfin tous les arts ou emplois te, parce qu'il ne peut, ni dé- que certaines personnes ne peuterminer intérieurement la vo- vent excercer sans péché, à caulonté, ni l'entraîner extérieu- se de leur propre faiblesse. rement, de façon qu'elle ne puisse L'occasion prochaine, tant par résister. (Voyez DÉMON.) elle-même que par accident, est

SV.

encore, ou intérieure, ou exté

rieure, ou volontaire, ou nécesDes occasions du péché.

saire. L'intérieure est celle qu'on On appelle occasion de péché, porte toujours avec soi, et que tout ce qui porte au péché de sa l'on trouve dans son propre nature, ou par les circonstances. fonds, comme la mauvaise ha

L'occasion du péché se divise bitude, le penchant à l'orgueil, en occasion prochaine et occa- à la colère , etc. L'extérieure est sion éloignée. L'occasion pro- celle qui vient du dehors , comchaine est celle qui porte d'une me des mauvaises compagnies , façon prochaine et immédiate des conversations dangereuau péché, soit de sa nature et ses, etc. La volontaire est celle par elle-même, soit par les cir- qu'on peut quitter , si l'on veut, constances.

comme le jeu, les cabarets, etc. L'occasion éloignée est celle La nécessaire est celle qu'il est qui ne porte au péché que d'une impossible de quitter , soit phyfaçon éloignée.

siquement, comme il arriverait. L'occasion prochaine du pé- à deux personnes qui seraient ché est prochaine ou par elle- enfermées dans une prison où même, per se, ou par accident, elle pécheraient ensemble; soit per accidens. L'occasion pro- moralement, comme il arrive à chaine par elle-même est celle ceux qui ne peuvent quitter sans qui, eu égard à la fragilité or- un dommage considérable, cerdinaire des hommes, porte au

taines occasions de péché, telles péché de sa nature et d'une ma- qu’un art, ou une maison lucranière prochaine. Tels sont les tive. . mauvais conseils, les discours Tous les théologiens convienlibres , les chansons déshonnė- nent qu'il faut éviter l'occasion tes, les spectacles, les méchans prochaine du péché quand on le livres, etc. L'occasion prochai- peut, et refuser l'absolution à ne par accident est celle qui ceux qui ne veulent pas la quitporte au péché d'une manière ter; mais ils ne conviennent pas prochaine, non absolument et également de ce qu'on doit ende sa nature , mais eu égard à la tendre par occasion prochaine. fragilité de quelques personnes Les uns n'appellent occasion en particulier. Tels sont les ca- prochaine que celle où l'on pè. barets, le négoce, la magistra- che presque toujours; les autres, lure, la profession des armes, celle ou l'on pèche le plus sou

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