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sénisme à tortet à travers, avaient pour les décrets des souverains pontifes le respect dont ils aiment à se parer, ils seraient sans doute plus réservés dans leurs discours; ils ne troubleraient point la paix, et ne feraient point des plaies mortelles à leurs ames, en diffamaut cent et cent personnes d'un foi pure et de mœurs irréprochables.

DEUXIÈME OBJECTION.

Une multitude innombrable d'auteurs, avant et depuis le concile de Trente, ont soutenu le probabilisme d'après plusieurs Pères de l'Église, et en particulier S. Augustin dans sa lettre S2.

RÉPONSE.

Saint Augustin, ni les auteurs qui ont parlé d'après lui, n'ont point soutenu qu'il fût permis de suivre une opinion probable par préférence à une plus probable; mais seulement qu'il était permis de suivre une opinion probable qui n'était point combattue par une plus probable, une opinion capable de convaincre, de persuader, et conforme à la vérité. Voici les paroles de saint Augustin dans sa lettre quatre-vingtdeuxième aliàs ità lego, ut quantálibet sanctitate doctrinaque præpolleant, non ideò verum putem quia ipsi ità cencerunt, sed quia mihi vel per autores canonicos, vel probabili ratione, quod à vero non abhorreant, mihi persuadere poterunt. Saint Augustin, pour se décider, ne

s'en rapporte, ni à la doctrine, ni à la sainteté d'un auteur ; il demande, ou l'autorité de l'Écriture, ou une raison probable, c'est-à-dire, une raison claire, péremptoire, conforme à la vérité, qui le convainque et qui le persuade, une raison convaincante et persuasive en un mot. Saint Augustin n'admet donc point le probabilisme; il le combat au contraire avec des armes victorieuses dans l'endroit même qu'on prétend lui être favorable, puisqu'il exige une raison conforme à la vérité, une raison persuasive et convaincante; et qu'une raison moins probable en présence d'une plus probable, loin d'avoir le mérite réel de la vérité, de la conviction et de la persuasion, n'a pas même le mince avantage de la vraisemblance, puisqu'elle est absolument fausse, et incapable de faire la moindre impression sur l'esprit d'un homme sage, prudent et censé, loin de pouvoir le convaincre et le persuader. De plus, saint Augustin combat à dessein et de la manière la plus forte le probabilisme académique dans son troisième livre contre les académiciens, ch. 16. Les académiciens disaient que celui qui suit ce qui lui paraît probable ou vraisemblable, ne pèche point, ne se trompe point. Cum agit quisque quod ei videtur probabile... quod etiam verisimile nominabant... nec peccat, nec errat. Qu'en pense le saint docteur? D'abord j'avais pensé, dit-il, que ce système de mo

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rale était appuyé sur des raisons monstre très-capable de renvertrès-solides ; mais après l'avoir ser les états, de troubler les faexaminé plus exactement , j'en milles , de corrompre le sancai reconnu la faiblesse et la tuaire, d'accréditer le libertinage fausseté; et je me suis aperçu et l'irréligion, de confondre et de qu'il était très-dangereux, et ca- bouleverser tout dans l'univers; pable de porter les hommes aux un monstre qui autorise tous derniers désordres, de les y au- les crimes les plus opposés à la toriser, de lever en apparence sainteté de l'Église, au bon ortous leurs doutes, et de les faire dre et à la tranquillité des rérevenir de la crainte qu'on doit publiques, à la sûreté de la vie avoir de inal faire quand on des rois et des sujets ; un monscommet des crimes. Je pourrais, tre qui confirme l'infidèle , l'ipour le prouver,

dit ce Père, dolâtre, le païen dans son infirapporter les exemples des par- délité, son idolâtrie, son polyricides,

des sacriléges et de théisme; l'hérétique dans ses tous les scélérats qui, pouvant hérésies, l'impie le libertin dans croire probablement que leurs son impiété, son irréligion et crimes sont permis, les commet- son libertinage. Et ce qu'il faut traient hardiment sans craindre ici soigneusement observer, les jugemens de Dieu; mais je c'est que le nouveau probabime sers d'un seul exemple. lisme est beaucoup plus horrible Qu'un homme, continue saint dans sa nature et plus contaAugustin , persuadé de cette gieux dans ses conséquences, fausse maxime des académi- que l'ancien probabilisme que ciens, commette un adultère, saint Augustin combattait dans en s'imaginant qu'il peut le com- les académiciens. Ces philosomettre sans blesser sa conscien- phes n'inventèrent leur probace, comment les probabilistes bilisme que parce qu'ils croyaient pourront-ils le condamner? Il qu'on ne pouvait découvrir la leur dira qu'il a suivi son opi- vérité, et qu'il fallait se connion qui lui paraissait probable. tenter de la probabilité ou de la Pour moi, dit saint Augustin, vraisemblance; et il ne leur était si j'étais du sentiment des aca- pas même venu dans la pensée démiciens ou des probabilistes, qu'on pût suivre une opinion je ne sais, et j'en jure, comment moins probable dans la concurje pourrais le blâmer. Le pro- rence d'une plus probable : au babilisme, poursuit ce Père, contraire, ils étaient convaincus est donc un monstre dans la qu'il fallait préférer la plus promorale ; ô mirum monstrum! bable. Neque disputationes nosoui, un monstre, père d'une in- træ quidquam aliud agunt ( dit finité d'autres, qu'il enfante au Cicéron, lib. 2, quæst. acapréjudice et au déshonneur de la dem. ) nisi ut in utramque parreligion et de la république ; un tem dicendo et audiendo cli

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niant, et tanquam exprimant quod aut verum sit, aut ad id QUAM MAXIMÈ accedat: cùm propriè academiæ sit, judicium nullum interponere, eaque probare quæ simillima veri habeantur : et idcircò in utramque partem de quæstione disserere, quo facilius id à quoque probaretur quod cuique MAXIMÈ videretur. Les anciens probabilistes ou académiciens croyaient donc qu'on était obligé d'embrasser le vrai, ou ce qui en approchait de plus près, aut verum, aut ad id quàm maximè accedat. Nos probabilistes soutiennent au contraire qu'on peut suivre licitement le moins vrai et le moins vraisemblable, ou plutôt le faux; puisqu'une opinion moins probable, en présence d'une plus probable, est réellement fausse et foncièrement destituée de tout fondement de vérité. Ils enchérissent donc de beaucoup, et même du tout au tout sur les anciens probabilistes.

Quant au nombre des auteurs qu'ils supposent avoir enseigné le probabilisme, soit avant, soit depuis le concile de Trente, on leur répond, et cette réponse ne souffre point de replique, on leur répond: 1°. qu'un grand nombre de ceux qu'ils invoquent comme leurs défenseurs, sont dans la vérité leurs plus grands adversaires. Tels sont entre autres, saint Thomas d'Aquin, saint Bonaventure, saint Antonin, le P. Morin, M. de Sainte-Beuve, etc. On leur répond: 2o. que plusieurs de ceux

qui avaient enseigné d'abord le probabilisme de bonne foi, l'out abandonné sans retour, quand ils en ont aperçu le venin, et qu'ils l'ont vu condamné par les souverains pontifes, les évêques et les universités : tels sont entre autres les cardinaux Pallavicin et d'Aguirre. On leur répond: 3°. que les théologiens mêine qui ont soutenu le probalisme, n'ont jamais prétendu qu'il fût permis de suivre une opinion moins probable dans le concours d'une plus probable; mais seulement qu'il était permis de suivre une opinion vraiment probable; ou que s'ils ont ditqu'il fût permis de suivre une opinion moins probable dans le concours d'une plus probable, c'est qu'ils croyaient de bonne foi que cette opinion moins probable dans ce conflit d'une plus probable, demeurait vraiment probable et sûre dans la pratique; et même qu'elle était plus probable à l'égard de ceux qui la suivaient, quoiqu'elle le fût moins à l'égard des autres. Le contraire est démontré depuis long-temps. Enfin on leur répond : 4°. que ces théologiens confondaient l'opinion la plus probable avec l'opinion la plus sûre et la plus parfaite, comme le prouvent les exemples qu'ils alléguaient de l'état du monde et de celui de la religion, de la condition des personnes mariées et des vierges, ainsi que nous l'avons déjà dit. TROISIÈME OBJECTION.

Les souverains pontifes ont quelquefois suivi l'opinion

moins probable dans les dispenses qu'ils ont accordées.

RÉPONSE.

Quand les souverains pontifes ont accordé des dispenses

dans certains cas douteux, on doit dire qu'ils ont suivi en cela les opinions qu'ils croyaient eux-mêmes plus probables; et leurs décrétales font foi qu'ils ont toujours été inviolablement attachés à cette maxime, que dans le doute, il faut prendre le parti le plus sûr : in dubiis tutior pars est eligenda.

QUATRIÈME OBJECTION. Ce n'est qu'un conseil et non un précepte, de choisir dans le doute le parti le plus sûr.

RÉPONSE.

Choisir dans le doute le parti le plus sûr est un précepte, tant parce que les termes du droit qui prescrivent cette maxime, marquent visiblement un précepte, debemus in dubiis semitam eligere tutiorem, que parce que cette maxime est fondée sur un principe du droit naturel, qui engage tous les hommes à éviter ce qui peut les exposer à perdre leur âme, tel qu'est le choix du partile moins sûr dans le doute.

CINQUIÈME OBJECTION.

Les probabilistes objectent ces règles de droit : 1o. in dubio melior est conditio possidentis; 2°. cum sunt partim jura obscura, reo favendum est potiùs quàm actori ; 3°. odia restringi, favores convenit ampliari; 4°. in obcuris minimum, id est, minùs rigorosum est sequendum.

RÉPONSE.

Ces maximes ont lieu dans les

faits, dans le for extérieur et
contentieux, dans les matières

de justice, et cela par une raison
qui fortifie l'antiprobabilisme.
Car pourquoi la justice favorise-
t-elle le possesseur dans le dou-
te, et prend-elle le parti le plus
doux, lorsqu'il s'agit de punir
un coupable? Parce que ce parti
est le plus sûr dans ces circons-
tances. Dans le doute si un bien
appartient à celui qui le possè-
de, ou si un homme est coupa-
ble, il est plus sûr de ne point
dépouiller le possesseur, et de
ne point punir le sujet que l'on
doute être coupable, parce qu'en
agissant autrement, on s'expose
au danger de commettre une
injustice envers l'un et l'autre ;
et par conséquent la disposition
du droit qui veut que dans le
doute on suive le parti le plus
doux, parce qu'il est le plus sûr
et le moins dangereux, fortifie
l'antiprobabilisme, qui veut que
l'on prenne le parti le plus sûr.
C'est par la même raison qu'un
supérieur qui doute avec quel-
que fondement de la probité de
son inférieur, qui lui demande
un certificat de vie et mœurs
pour être promu aux ordres,
ou pourvu d'une charge de judi-
cature, doit le lui donner, s'il
ne trouve rien qui autorise son
doute, et qui le change en cer-
titude de l'indignité de son in-
férieur; sans cela, et s'il n'a une
cause suffisante qui l'oblige à le
lui refuser, comme parle saint

16.

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Thomas, absque sufficiente vel ques raisons ou quelques autocogente causú, il commet une rités telles que celles d'un auinjustice à son égard en le lui teur grave, ou de trois ou quarefusant, injuriatur ei.

tre jeunes casuistes. Quel paraSixième OBJECTION.

doxe! Eh! comment peut-on C'est agir prudęınment que de appeller solide un fondement suivre une opinion moins proba rait moins probable et moins

tout-à-fait ruineux , et qui pable, par préférence à une plus

plus vraisemblable que le fondement probable, puisque cette opinion moins probable, même dans le qui lui est opposé? Comment concours d'une plus probable est peut-on nommer forte une raitoujours accompagnée de quel

son ou une autorité que l'on ques motifs propres à tranquilli- juge plus faible que la raison ou

à ser, et appuyée sur des fonde- l'autorité contraire , et qui parmens soit intrinsèques, tels que ne retient que sa faiblesse, en

là même perd toute sa force et des raisons, soil extrinsèques, tels que des autorités capables tive et plus probable qui l'a

résence de l'opinion destrucde persuader.

néantit ? Peut-on ne pas aperRÉPONSE.

cevoir qu'en raisonnant, ou Rien n'est plus imprudent que plutôt qu'en déraisonnant de de suivre une opinion moins cette sorte, on accrédite les opiprobable par préférence à une nions les plus horribles et les plus probable , parce que l'opi- plus ' monstrueuses, puisqu'il nion plus probable détruisant n'en est aucune de ce genre, qui la probabilité de l'autre, par ne puisse s'étayer de quelque l'opposition qu'elle a avec elle, raison ou de quelque autorité ? n'étant pas possible qu'elles

SEPTIÈME OBJECTION. soient vraies toutes les deux, puisque l'une affirme ce que l'au- . Il est vrai, dit le père Terille, tre nie ; suivre l'opinion moins chefdes probabilistes, qu'on peut probable, c'est agir sans fonde- appeler réflexistes, il est vrai ment et sans raison, et par con- qu’une opinion moins probable, séquent c'est agir très-impru- dans la concurrence plus probademment. On ne peut trop s'é- ble, est destituée de tout fondetonner de la hardiesse des pro- ment solide, et qu'on ne peutlici. babilistes , pour ne rien dire de tement l'embrasser par la raison plus, qui osent soutenir qu'une même que l'on juge l'opinion opinion moins probable dans le contraire plus probable. Mais si concours d'une plus probable, l'on ne peut y adhérer par un est appuyée sur des fondemens jugement direct, on peut au solides, même par comparaison moins l'embrasser et la suivre à l'opinion plus probable, sous par un jugement réflexe ; c'estprétexte qu'elle a pour elle quel- à-dire, que, quoiqu'on ne puisse

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