Immagini della pagina
PDF
ePub

<< que ce désir, en conséquence des volontés efficaces de Dieu qui sont les lois inviolables de la nature, est la cause « de la présence et de la clarté de l'idée qui représente cet " objet. »

V. Voici maintenant la critique de M. Arnauld.

<< Mais ce qu'a trouvé cet auteur pour accorder sa doctrine sur ce point des idées avec son autre doctrine, que Dieu agit comme cause universelle, dont les volontés générales doivent être déterminées à chaque effet par les causes qu'il appelle occasionnelles, est encore plus contraire à l'expérience. Car la cause occasionnelle, qu'il a cru déterminer Dieu à nous donner chaque idée en particulier, est le désir que nous en avons. C'est ce qu'il enseigne dans le deuxième Éclaircissement sur le premier chapitre du premier livre. « Il ne faut « pas, dit-il, s'imaginer que la volonté commande à l'enten<«< dement d'une autre manière que par ses désirs et ses mou«vements; car la volonté n'a point d'autre action. Et il ne « faut pas croire non plus que l'entendement obéisse à la « volonté, en produisant en lui-même les idées des choses « que l'âme désire; car l'entendement n'agit point, il ne fait « que recevoir la lumière, ou les idées de ces choses, par « l'union nécessaire qu'il a avec celui qui renferme tous les « êtres d'une manière intelligible, ainsi qu'on l'a expliqué << dans le troisième livre. Voici donc tout le mystère. L'homme « participe à la souveraine raison, et la vérité se découvre à <«<lui à proportion qu'il s'applique à elle et qu'il la prie. Or « le désir de l'àme est une prière naturelle qui est toujours « exaucée; car c'est une loi naturelle, que les idées soient << d'autant plus présentes à l'esprit que la volonté les désire avec plus d'ardeur. >>

« Cela serait beau, s'il était vrai. Mais l'expérience y est sí contraire, que je ne puis comprendre, comment on se hasarde d'avancer de telles choses sans s'être auparavant consulté soi-même. Si on l'avait fait, on n'aurait pas manqué de reconnaitre qu'il y a bien des objets qui nous dé

plaisent, et que nous voudrions bien ne pas voir, dont les idées ne laissent pas d'ètre fort présentes à notre esprit, et que nous souffrons avec peine des représentations fàcheuses, que nous souhaiterions fort de ne point voir, bien loin de les désirer. »

RÉPONSE. VI. Vous voyez, Monsieur, de quel ton parle M. Arnauld, après m'avoir imposé à son ordinaire un sentiment extravagant et ridicule. « Je ne puis comprendre, ditil, comment on se hasarde d'avancer de telles choses, sans s'être auparavant consulté soi-même. » Mais je puis encore moins comprendre comment M, Arnauld se hasarde de m'imposer un sentiment que je n'ai pas, et que je rejette dans l'endroit même qu'il cite, par ces paroles qui suivent immédiatement celles qu'il rapporte. « Ainsi, pourvu que la capa«< cité que nous avons de penser, ou notre entendement, ne « soit point rempli par des sentiments confus que nous rece«<vons à l'occasion de ce qui se passe dans notre corps, nous « ne souhaitons jamais de penser à quelque objet, que l'idée «< de cet objet ne nous soit aussitôt présente; et comme l'ex<< périence même nous l'apprend, cette idée est d'autant plus <«< présente et plus claire que notre désir est plus fort, et que « les sentiments confus que nous recevons par le corps sont plus faibles et moins sensibles, comme je l'ai déjà dit dans <«< la remarque précédente. » Si M. Arnauld n'entendait pas ceci, il pouvait lire la remarque précédente. Il pouvait s'éclaircir de mon sentiment en cent endroits de la Recherche de la Vérité, où je fais voir que le corps trouble l'esprit, et que les mouvements des esprits et du sang sont des causes occasionnelles, en conséquence des lois de l'union de l'àme et du corps, plus fortes et plus efficaces à cause du péche, que celles de l'union de l'esprit avec la raison universelle.

[ocr errors]

VII. Mais admirez sa conduite. Il a trouvé un passage dans lequel je dis, « que dans l'état où nous sommes, les « idées des choses ne se présentent point à notre esprit toutes « les fois que nous le voulons. » Que pensez-vous qu'il en

conclue? que je me contredis, Monsieur, que cela renverse ma marime; c'est le nom qu'il donne à la sotte erreur qu'il m'attribue, en retranchant ce qui fait voir qu'il m'impose. Lisez, Monsieur, la conclusion de son chapitre. La voici :

« Je viens de trouver un passage de notre ami, que je ne vois pas comment il pourra accorder avec cette maxime des éclaircissements. »> « Nous ne souhaitons jamais de penser à << quelque objet, que l'idée de cet objet ne nous soit aussitôt << présente. »>«< Car je ne sais si l'on peut former une proposition plus directement contraire à celle-là, que celle-ci du chapitre 9 de la deuxième partie du troisième livre. » « Il est <<< absolument faux dans l'état où nous sommes, que les idées <<< des choses soient présentes à notre esprit toutes les fois que <<< nous les voulons considérer. »

RÉPONSE. — VIII. Prenez garde encore un coup que M. Arnauld tire cette maxime qu'il m'attribue, de cette proposition : « Pourvu que la capacité que nous avons de penser, ou notre entendement, ne soit point rempli des sentiments confus que nous recevons à l'occasion de ce qui se passe dans notre corps; nous ne souhaitons jamais de penser à quelque objet, que l'idée de cet objet ne nous soit aussitôt présente.» Prenez garde que, non-seulement ici, mais dans la page qui précède, il rapporte le commencement et la fin de cet endroit, en retranchant le milieu, qui lui aurait ôté le droit de m'attribuer cette maxime; et que d'abord en rapportant encore ce même passage, il s'est arrêté tout court à ce qui était essentiel pour entendre ma penséc. Que peuton juger d'un critique, qui falsifie trois fois en diverses manières, dans un même endroit, un passage de son auteur, afin de lui imposer un sentiment ridicule? un sentiment, dis-je, que l'on rejette dans le même passage, et peut-être cent fois dans tout l'ouvrage de la Recherche de la Vérité?

IX. Enfin, Monsieur, quand j'aurais oublié de mettre cette condition, «< pourvu que la capacité que nous avons de penser ne soit point remplie, etc., » dans l'endroit où je l'ai

mise, un critique équitable m'aurait-il attribué cette maxime, que je combats en cent endroits de la Recherche de la Vérite? Mais, de plus, au lieu de conclure que je me contredis par deux passages qui seraient contraires en apparence, n’aurait-il pas expliqué la proposition générale et obscure par celle qui la modifie, et qui est conforme à l'expérience qu'il doit supposer que j'ai aussi bien que les autres hommes?

En vérité, Monsieur, pourvu que M. Arnauld ait compris mes sentiments, c'est un des plus injustes critiques qui fùt jamais. Voilà ma maxime, n'òtez pas la condition que je mets « Pourvu que M. Arnauld ait compris mes senti ments; » car il ne faut pas juger des intentions secrètes.

CHAPITRE XIX.

-

Réponse au dix-septième chapitre.

I. Ce chapitre 47 contient plusieurs passages tirés de la Recherche de la Vérité, par lesquels M. Arnauld prétend que je me contredis à mon ordinaire, et que je dis, «< tantôt qu'on voit Dieu en voyant ses ouvrages, et tantôt qu'on ne voit pas Dieu, mais ses ouvrages. » Et enfin, comme il s'imagine que mon sentiment sera odieux, et paraîtra ridicule au commun des hommes, s'il m'oblige à dire qu'on voit Dieu, il conclut ainsi son chapitre.

II. «Tant s'en faut donc que l'on puisse dire, selon la nouvelle philosophie des idées, que quand nous voyons les créatures en Dieu, ce n'est pas Dieu que nous voyons, mais seulement les créatures; qu'il faut dire absolument tout le contraire que quand nous voyons les créatures en Dieu, c'est Dieu uniquement que nous voyons, et nullement les créatures. Car si celui qui voit le soleil en Dieu, ne voyait pas Dieu, mais le soleil que Dieu a créé; ce serait le soleil matériel qu'il verrait, puisque c'est le soleil matériel que Dieu a créé. Or, selon cet auteur, celui qui regarde le soleil ne voit point le soleil matériel, mais seulement le soleil

intelligible. Il ne voit donc que Dieu, et non pas le soleil que Dieu a créé. »

RÉPONSE.-III. J'ai déjà, ce me semble, ruiné plusieurs fois ce raisonnement de M. Arnauld, et répondu à cette prétendue contradiction, chapitre 9 et ailleurs, en disant, que lorsqu'on ne voit l'Etre divin, qu'en tant qu'il est participé par les créatures, on ne voit que les créatures; car certainement on voit les créatures, lorsqu'on a leurs idées présentes à l'esprit et leurs idées ne sont que l'Être divin, en tant qu'il est la ressemblance, ou la représentation des créatures qui y participent. Voyez, Monsieur, la quinzième question de la première partie de la Somme de saint Thomas. Dieu voit sans doute son ouvrage comme possible, lorsqu'il voit l'idée qu'il en a et il sait que cet ouvrage existe, ou il le voit comme actuellement existant, parce qu'il sait que la volonté qu'il a de le produire, est efficace. Pourquoi donc, lorsque les hommes voient les idées des choses, et qu'ils sont avertis par des sensations dont Dieu les touche à l'occasion des corps, que ces mêmes corps existent; pourquoi, dis-je, ne dira-t-on pas, que c'est proprement ces corps qu'ils voient, et non pas Dieu, quoiqu'ils ne les voient qu'en celui qui seul peut nous éclairer?

IV. « Si celui qui voit le soleil en Dieu, dit M. Arnauld, ne voyait pas Dieu, mais le soleil que Dieu a créé, ce serait le soleil matériel qu'il verrait, puisque c'est le soleil matériel - que Dieu a créé.

<< Or, selon cet auteur, celui qui regarde le soleil, ne voit point le soleil matériel, mais seulement le soleil intelligible. Il ne voit donc que Dieu, et non pas le soleil que Dieu a créé. »

RÉPONSE.

-

- Je réponds, que celui qui regarde le soleil ne voit point le soleil immédiatement, et en lui-même : il ne voit le soleil que par l'idée du soleil: il ne le voit que par l'étendue intelligible, rendue sensible par le sentiment vif de lumière, que Dieu cause dans l'âme en conséquence de

« IndietroContinua »