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connaître les choses matérielles, de certains êtres représentatifs distingués des perceptions: car il se pourrait faire fort facilement qu'un autre, plus habile que moi, convaincrait M. Arnauld, ou du moins toute la terre, que les modalités de l'âme ne sont point essentiellement représentatives. »> RÉPONSE. Je n'ai point dit qu'il fût ridicule, pour avoir supposé ce qui est en question; mais j'ai si bien montré qu'il l'a supposé, qu'il ne s'en est pu tirer que par les deux premières défaites, qui n'ont pas la moindre vraisemblance.

Celle-ci ne vaut pas mieux. Car j'ai fait ce que j'avais entrepris, si j'ai bien prouvé, qu'il avait employé, pour établir sa doctrine, le sophisme appellé pétition de principe, comme il parait par la majeure qu'il a accordée, et par la conclusion qui le regarde en particulier. A quoi néanmoins on peut ajouter que ce que j'ai mis comme de surcroît, à la fin de ma démonstration, doit convaincre toutes les personnes raisonnables que comme presque tous les philosophes habiles croient aujourd'hui, que la supposition d'une forme substantielle, dans tous les corps, en la manière qu'on la conçoit dans l'école, est une invention de gens oisifs, on a la même raison de rejeter, comme une pure imagination, encore plus mal fondée, la supposition fantastique de ces étres représentatifs des corps, qui ont été inventés par la même voie que les formes substantielles, et dont la notion est encore plus obscure et plus confuse que celle de ces formes.

Mais il se pourra faire facilement, nous dit-on, qu'un autre homme plus habile que le P. Malebranche convaincra M. Arnauld, ou au moins toute la terre, que les perceptions qu'a notre âme des objets, ne sont pas représentatives de ces objets. On l'attend donc cet habile homme, et nous sommes aussi disposés à nous rendre, quand il nous aura convaincus, qu'à ne point contester contre celui qui nous aura fait voir qu'il n'est pas vrai que le tout est plus grand que sa partie.

QUATRIÈME DÉFAITE.

« Enfin, quand personne ne pour

rait donner des preuves qu'il ne réfutât, c'est une nouvelle manière de démontrer les propositions qu'on ne recevra jamais, que de conclure qu'une chose n'est pas, à cause que la preuve qu'on en donne ne vaut rien. »

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RÉPONSE. C'est ne savoir pas la différence que les règles du bon sens ont toujours mise entre prouver qu'une chose est, et soutenir qu'elle n'est pas entre prouver qu'on a besoin d'un être représentatif, et soutenir qu'on n'en a pas besoin. Car tout le monde convient que celui qui entreprend de prouver qu'une chose est nécessaire pour voir les corps, doit apporter des raisons convaincantes qui le prouvent positivement; et on se moquerait de lui, s'il disait, pour toute raison, qu'on ne lui en saurait apporter de convaincantes qui montrent que cela n'est pas. Mais, pour celui qui soutient qu'une chose n'est pas, que ces êtres représentatifs ne sont pas nécessaires, tout le monde convient, au contraire, qu'il a satisfait pleinement à ce qu'on pouvait attendre de lui, quand il a fort bien réfuté toutes les preuves que l'on pourrait apporter, pour appuyer ce qu'il soutient n'être pas. Et cela est vrai, principalement quand il s'agit d'entités, que l'on prétend être chimériques, et dont personne ne saurait avoir de notion distincte, que l'on voudrait introduire dans la philosophie. Car voudrait-on obliger un homme d'apporter des preuves positives, pour montrer qu'une chimère n'est point? et n'est-ce pas avoir suffisamment montré que ces entités ne sont que des chimères, quand on a détruit toutes les raisons qui ont porté quelques philosophes à les inventer? Je suis donc bien obligé à l'auteur de la Réponse, de ce que son dernier retranchement contre ma démonstration, pour rendre encore quelque combat en faveur de ses êtres représentatifs, est de dire qu'elle ne serait pas recevable, quand personne ne pourrait donner de preuves pour les étal lir. que je ne réfutasse fort bien.

SECOND EXEMPLE. Autre faux principe: que notre âme ne peut voir les objets éloignés: que ma deuxième démonstration le lui a fait désavouer. Des trois autres démonstrations.

La seconde preuve des êtres représentatifs, distingués des perceptions, est que notre âme ne saurait voir que ce qui lui est présent et intimement uni; d'où il s'ensuit qu'elle a besoin d'êtres représentatifs pour voir les corps qui en sont éloignés.

C'est ce que j'ai combattu par ma deuxième démonstration, qui a mis encore l'auteur de la Réponse en plus mauvaise humeur que la première. Cela paraît par son préambule que voici :

<< Ne trouvez pas mauvais, Monsieur, si je vous arrête à la lecture de choses qui n'ont nulle utilité, ni nul agrément. La réputation de M. Arnauld m'oblige, à cause de la vérité, à faire remarquer ses méprises, et qu'il a bien désappris à faire des démonstrations. >>

RÉPONSE.Il est à craindre que le monde ne dise que l'auteur de la Réponse n'a pas désappris à en faire. Quoi qu'il en soit, on lui est obligé de ce que son dégoût ne l'a pas empêché de rapporter cette deuxième démonstration dont il parle avec tant de mépris. Voyons-la donc.

DEUXIÈME DÉMONSTRATION. « Ce n'est pas philosopher avec justesse, en traitant d'une matière importante, que de prendre d'abord pour un principe général dont on fait dépendre tout ce que l'on dit dans la suite, ce qui, non-seulement n'est pas clair, mais ce qui est tout contraire à ce qui nous est si clair et si évident qu'il nous est impossible d'en douter.

« Or, c'est ce qu'a fait l'auteur de la Recherche de la Vérité dans son Traité de la Nature des Idées.

« On ne peut donc philosopher avec moins de justesse qu'il a fait dans cette matière, ni d'une manière plus opposée à celle qu'il a suivie dans presque toutes les autres.

« Il n'y a que la mineure à prouver.

:

« Ce qu'il a supposé d'abord comme un principe clair et indubitable, est, que notre esprit ne pouvait connaître que les objets qui sont présents à notre âme, et c'est ce qui lui fait dire « Nous voyons le soleil, les étoiles et une infinité d'objets hors de nous, et il n'est pas vraisemblable que l'âme sorte du corps et qu'elle aille pour ainsi dire se promener dans les cieux pour y contempler tous ces objets. Elle ne les voit donc point par eux-mêmes, et l'objet immédiat de notre esprit lorsqu'il voit le soleil, par exemple, n'est pas le soleil, mais quelque chose qui est intimement uni à notre âme, et c'est ce que j'appelle idée. » Un homme qui parle de la sorte, suppose manifestement, comme un principe clair et incontestable, que notre âme ne saurait apercevoir les objets qui sont éloignés du lieu où elle est, tant qu'ils en demeurent éloignés. Or, non-seulement je doute de ce prétendu principe, mais je soutiens qu'il est faux, de la dernière fausseté, parce qu'il est évident, de la dernière évidence que notre âme peut connaître une infinité de choses éloignées du lieu où elle est, et qu'elle le peut, parce que Dieu lui en a donné le pouvoir; la preuve en est facile. »>

Je supplie le lecteur de la voir. Elle est depuis la moitié de la page 245, et le commencement de la suivante. Je crois qu'il en sera satisfait, et qu'il jugera que l'auteur de la Réponse a bien fait de la dissimuler, parce qu'il a trouvé plus d'avantage à employer les mêmes défaites pour éluder cette démonstration, qu'il avait employées pour éluder la première; en niant qu'il eût pris cela pour principe, et en prétendant qu'il n'avait parlé que selon le sentiment des autres.

PREMIÈRE DÉFAITE. « C'est sans doute un principe faux, de la dernière fausseté, que notre âme ne puisse voir ni connaître, ni apercevoir les objets éloignés du lieu où elle est, tant qu'ils en demeurent éloignés; je l'ai toujours cru tel. Il faudrait être bien stupide pour en douter; M. Arnauld a grand tort de me l'attribuer, et de dire qu'il est certain

que je le suppose dans tout le reste du Traité de la Nature des Idées. »

RÉPONSE. C'est son adresse ordinaire, de parler ainsi fort durement contre les sentiments qu'on l'oblige de désavouer, afin que l'on croie plus facilement qu'il ne les a jamais tenus. Mais l'importance est de bien répondre aux preuves qui font voir qu'il les a tenus. Et c'est à quoi il emploie les deux défaites suivantes.

Deuxième défaite. — « Mais quoi ! j'ai dit qu'il n'est pas vraisemblable que l'àme sorte du corps pour voir le soleil. Donc j'ai cru qu'on ne pouvait voir les objets lorsqu'ils étaient éloignés. L'équitable conséquence! lorsqu'on parle aux hommes suivant leurs idées, les approuve-t-on ? »

TROISIÈME DÉFAITE. « N'est-il pas visible que ce que je dis est plutôt une espèce de raillerie, qu'un principe sur lequel j'établis des sentiments qui renversent ce même principe? >>> RÉPONSE.

-

La raisonnable solution! Est-ce qu'il n'y a qu'à dire en l'air, qu'on a parlé selon le sentiment des autres ou par raillerie, pour désavouer ce qu'on a dit plus clairement? Mais cette réponse fait voir, qu'à moins qu'on ne puisse être persuadé qu'il a parlé selon le sentiment des autres, ou par raillerie, il faut que l'on demeure convaincu qu'il a pris pour principe ce qu'il est contraint d'avouer maintenant être faux, de la dernière fausseté. Or, il est impossible que cette défaite impose à personne, quand on aura considéré que, dans le même chapitre de sa Recherche de la Vérité, il répète la même chose et se sert du même principe, en des termes si précis qu'on ne saurait les éluder, ni par l'une ni par l'autre de ces fausses gloses, de n'avoir parlé que selon le sentiment des autres, ou par raillerie. C'est un passage qu'il n'a pas dû dissimuler, puisque je l'ai rapporté dans le chapitre 6 des Idées.

<«< Nous ne pouvons, dit-il, apercevoir les choses qui sont hors de l'àme, que par le moyen des idées ( c'est-à-dire par

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