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Dans Whirligigs, 1911, nous avons ce que le romancier Hardy appellerait les «petites ironies de la vie ». O Henry nous présente les hommes et leurs affaires comme de drôles de jouets soumis à la rotation inexplicable des vents de la chance. Que l'inattendu arrive, c'est l'essence même du thème, et l'essence de cette philosophie populaire du hasard qui donne une valeur même à ses exemples les plus communs. La plupart des vingt-quatre histoires de ce volume, dont plusieurs de peu de mérite, traitent des influences imprévues du milieu et de la perversité de la nature humaine. En somme, ces «Whirligigs » sont de petites ironies de la vie incroyablement piquantes et très habilement localisées.

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Sixes and Sevens, le dernier volume publié sous la direction d'O Henry lui-même, nous donne une excellente occasion de saisir le développement d'un talent fauché par une mort prématurée, et de montrer les points principaux qui différencient O Henry des autres conteurs américains. De Makes the Whole World Kin, le New York Times 1 dit : «Voilà une histoire que nous pouvons imaginer racontée par l'écrivain Européen auquel on a si souvent comparé O Henry ». Mais tandis que Maupassant aurait conté l'histoire sobrement, comptant sur l'humour naturel du lecteur, nous avons dans O Henry sa manière personnelle. Chaque phrase a ses surprises; en d'autres termes, il essaye d'être plus extravagant que la matière, et c'est dans ce mélange de la vérité et de l'extravagance, dans cette incapacité de résister à la tentation de plaisanter au moment tragique, qu'O Henry s'éloigne de la plupart des auteurs du genre.

Après la mort d'O Henry on publia encore un autre volume, dont le contenu fut tiré de manuscrits non publiés, de revues, de vieux journaux et de lettres. Son titre, Rolling Stones, provient de l'essai journalistique qu'il fit au début de sa carrière à Austin en Texas. Cet ouvrage nous donne une connaissance plus intime d'O Henry comme homme, out en augmentant sa réputation comme écrivain. La plus intéressante de ces histoires est The Dream, que la mort a laissé à l'état de fragment. L'essentiel du récit se passe en prison et retrace probablement une expérience personnelle de l'auteur. De ce fragment il a dit

1. The New-York Times. October 1911.

lui-même : «Je désire montrer au public que je sais écrire quelque chose de nouveau pour moi, je veuxdire, une histoire sans jargon, un thème dramatique traité de telle manière qu'il rapproche mon idéal d'une vraie histoire »; et de cela il était fort capable. Le volume contient trois histoires nouvelles, d'autres esquisses et écrits divers, intéressants, mais sans valeur autrement significative.

Un dernier volume parut en 1919, Waifs and Strays, avec douze histoires inconnues du grand public, la correspondance d'O Henry, un recueil des critiques de son œuvre et un index complet de ses contes. La plus intéressante parmi les histoires de ce recueil est la dernière. The Snow Man, qu'il était en train d'écrire quand il fut saisi par le mal qui l'emporta ; c'est le plus réaliste de tous ses contes; les personnages sont de vrais êtres vivants.

§ 2. LES CADRES

Les titres des volumes d'O Henry indiquent la grande variété des lieux où se passe l'action. Après un examen superficiel on peut envisager comme possible un groupement de ses contes d'après trois ou quatre régions: histoires de l'Amérique Latine, histoires de l'Ouest, histoires du Sud, histoires de la cité de New York.

L'AMÉRIQUE LATINE.

En effet, O Henry fut d'abord connu comme écrivain de contes sud-américains. 1 Critiques et rédacteurs le prièrent de grouper ses histoires sous forme de roman pour les publier. C'est ainsi que nous eûmes Cabbages and Kings.

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Pinquin nous dit : « Quelques écrivains sont capables de décrire de lointains pays de telle manière que l'on a l'impression d'y avoir vécu. Conrad nous fait connaître la Malaisie, Kipling, l'Inde, O Henry, l'Amérique Centrale, ce pays à langoureuses señoritas, à consuls américains somnolents, à financiers en faillite, à révolutions micoscropiques, à guitares et à gorilles, un pays aux plages blanches et aux palmiers verts, aux après-midis perpétuellement oiseuses quoi qu'on soit toujours en train de faire quelque chose ou sur le point de le faire. » Nous sommes tous reconnaissants à O Henry de nous donner l'illusion d'avoir voyagé dans ce pays. Nous ignorons si l'on trouve tous les détails exacts, mais nous savons par nous-mêmes que les germes de vérité n'y manquent pas; et après tout, comme dit encore Pinquin : «Dans ces écrits il y a ce que l'on trouve partout sur cette planète; de la terre, de l'air, de l'eau et de la nature humaine. »

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1. M. Stanhope Searles écrit dans le Bookman, New-York, Février 1905: O Henry devient le rival de Richard Harding Davis dans ce domaine où pendant des années cet auteur avait été soul.

3. Pinquin. O Henry travelling further, English Bookman, August 1916. 3. Ibid.

Dans ce premier volume, O Henry apporte un soin particulier à la description de la mise en scène : c'est dire que le style a une perfection qu'il n'atteint plus ailleurs : 1

« Les montagnes tendaient leurs épaules abruptes pour << recevoir le galop horizontal des coursiers d'Apollon retournant « à l'Empyrée; le jour mourait sur les lagunes et sur les forêts << ombreuses de bananiers et sur les marais de manguiers où les << grands crabes bleus commençaient à ramper vers le rivage << pour leur promenade nocturne. Et il mourait enfin sur les plus << hauts sommets. Alors, le bref crépuscule, éphémère comme le << vol d'une phalène de nuit, vint et s'évanouit. La croix du Sud << pointa de son étoile la plus proche au-dessus d'une rangée de << palmiers, et les lucioles annoncèrent par leurs lumières la nuit <approchant à pas feutrés. »

Il ne nous indique pas seulement l'arrière-plan pittoresque, mais aussi le premier plan, les sons, les odeurs, les spectacles de la vie. Plus tard il dédaignera ces détails: 2 « Et partout à << Coralio montaient les odeurs matinales, celles des fleurs tropi«cales aux parfums lourds, celle du pain cuisant au dehors dans << les fours d'argile couverts, et la fumée pénétrante des feux. Là << où la fumée s'éclaircissait, l'atmosphère cristalline semblait, « avec un peu d'imagination, rapprocher les montagnes presque << jusqu'à la mer, les rendant si proches qu'on pouvait compter <<< les cicatrices formées par les clairières sur leurs pentes boisées. « Le consul contemplait rêveusement cet Eden. Des bananiers << interposaient leurs larges boucliers entre lui et le soleil. La « pente douce, du consulat à la mer, était couverte du feuillage «vert foncé des citronniers et des orangers en pleine floraison. « Une lagune transperçait le rivage comme un cristal, sombre et << dentelé, et au-dessus d'elle un cèdre pâle s'élevait presque jus« qu'aux nuages. Les palmes ondoyantes des cocotiers de la plage << déployaient leurs feuilles vertes décoratives contre l'ardoise << d'une mer presque tranquille. Ses sens percevaient l'éclat de << l'écarlate et de l'ocre parmi le vert des taillis. Ces odeurs de « fruits, de fleurs et de fumée provenant du four ouvert de Chanca << dans l'ombre du calebassier, les rires aigus des femmes indigènes << dans leurs huttes, la chanson du rouge-gorge, le goût salé de

1. Cabbages and Kings, page 57.

2. Ibid. page 170.

« la brise, le diminuendo des petites vagues le long du rivage et « graduellement, un petit point qui grandissait jusqu'à être une << tache dans la perspective uniforme de la mer pour devenir « l'Idalia. »

Dans certaines histoires faisant partie d'autres volumes O Henry nous conduit à San Juan, où «l'eau potable contient de petits jardins zoologiques », et à Guaya, Smellville-by-the-Sea, Buncoville-on-the-Beach, à Panama où cette « Irritation du canal a commencé. » Il nous dit que La Paz est « un vrai Paradis Perdu quant à l'élégance de la scène et à la beauté de la géographie », et il explique « Comme vous devez le savoir, l'ilot de Rotona est à vingt milles de la république sud-américaine, à laquelle il sert de port. Il dort doucement dans une mer souriante, sans travailler, sans filer, nourri par les Tropiques, où tout mûrit, cesse, et se détache vers la tombe. »

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De ces histoires, quatre se déroulent en Amérique Centrale, une au Mexique et dix dans l'Amérique du Sud. Mais elles n'ajoutent rien aux impressions des tropiques révélées dans le premier volume d'O Henry. Il semble écrire du point de vue lointain de l'homme du Nord. Par exemple, quand il nous introduit à Mercutio, ville d'eau officielle de Venezuela, il nous dit : << Imaginez Coney Island traduit en espagnol et vous comprendrez Mercutio». Un habitant de New York, qui n'aurait pas vu cette ville, aurait la même impression générale : « Il y avait des bains de mer, des combats de taureaux, des « fiestas » et du scandale ». Suivant dans l'intérieur du Venezuela les fortunes de l'héroïne, captive des Peaux Rouges de Corrabio, il nous dit simplement : « Le village était un amas de rochers et de cabanes de terre battue, dans la profondeur d'une forêt ». On en conclut qu'O Henry luimême n'a pas connu l'intérieur. Les détails descriptifs ayant quelque arôme d'authenticité disparaissent quand la caravane quitte les environs de la ville. Sans doute O Henry n'a jamais fait la route lui-même.

Il décrit plus minutieusement les ports qu'il a visités. Par exemple: «La Paz, la Belle, une petite ville sans hâvre, étouffée « dans le vert vivant du ruban qui borde les pieds d'une mon<< tagne perçant les nuages. Une triste ville péruvienne, asile de «<fugitifs ». Il ne fait que mentionner les Philippines, en citant l'habitude sauvage d'une certaine tribu de « Head Hunters. » Il appelle simplement Majoda «une petite ville sur la côte Pacifique

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