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les titulaires, mais ne définissent pas les fonctions: pour régler leur exercice, il faut recourir aux lois qui les ont instituées.

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Ici, les textes sont tout les inductions, les raisonnemens n'ont par eux-mêmes aucune autorité; ils ne tirent leur force que de leur parfaite conformité avec le texte et l'esprit de la loi. Autrement, ce seraient donc les jurisconsultes qui décideraient de la compétence des fonctionnaires !

<< Surtout sous un gouvernement constitutionnel qui est éminemment le gouvernement du droit; où chaque citoyen peut dire à tout instant au fonctionnaire le plus élevé, comme au plus mince employé : Vous n'avez pas le pouvoir de faire telle chose de quel avantage n'est-il pas d'avoir un texte de loi à opposer ou à invoquer ?

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Mais, ces lois de compétence, où sont-elles? Enfouies dans un recueil officiel qui comprend maintenant plus de quatrevingts volumes! Perdues au milieu d'une foule d'actes législatifs et réglementaires, dont le nombre s'élève aujourd'hui à plus de quarante mille!

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« En effet, il n'existe pas de lois générales sur la compétence des fonctionnaires. La plupart des compétences résultent de lois de détail, d'articles isolés, qui progressivement, et selon le besoin des tems, ont conféré telle ou telle attribution, tantôt à une autorité, tantôt à une autre, suivant la tendance du jour.»

Ajoutez à cela que les dénominations de diverses fonctions ont changé plusieurs fois, sans que pour cela la compétence ait changé : seulement, les pouvoirs ont été transportés d'une autorité à une autre; des intendans aux administrateurs de département; des administrateurs de département aux préfets; quelquefois sans modification, d'autres fois avec des nuances. Qu'on ne s'étonne donc pas du grand nombre de lois comprises dans le Recueil des lois de compétence. C'est assurément de tous les travaux dont se compose la collection de M. Dupin, T. XXV. Février 1825.

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celui qui a exigé le plus de tems et d'attention. Là, les lois ne se classaient pas uniquement par leur titre; il fallait interroger le fonds même des dispositions; il y avait à prendre dans presque toutes les lois. Il a donc fallu tout lire, pour tout extraire c'est une peine que peu de gens avaient prise avant lui; et il n'aura guère d'imitateurs. D'ailleurs, son ouvrage dispensera désormais de se livrer à d'aussi pénibles recherches.

M. Dupin n'a pas seulement recueilli les lois relatives à la compétence de quelques fonctionnaires; il a opéré plus en grand: il a rassemblé les lois sur la compétence des fonctionnaires de toutes les hiérarchies: et, comme il a joint à son ouvrage une table des matières très-étendue, très-soignée, et telle que l'auteur seul était capable de l'exécuter lui-même, chaque fonctionnaire, en cherchant le nom qui désigne sa fonction, est sûr d'y trouver, ralliées sous le même mot, toutes les indications qui s'y rattachent.

En tête du premier volume, se trouve une introduction où l'auteur agite des questions de la plus haute importance. 1 parle du pouvoir et de la compétence en général : il remonte à l'origine du pacte social d'où dérivent tous les pouvoirs: il distingue le pouvoir de fait et le pouvoir de droit; le pouvoir physique et le pouvoir moral; il définit la souveraineté ; et dans toutes ces questions qui ont assurément leur délicatesse et leur difficulté, on retrouve perpétuellement le logicien exact, le bon citoyen et l'ami constant des principes de la monarchie constitutionnelle.

Donnons-en un exemple. M. Dupin met en avant cette proposition: « Que la même masse de pouvoirs existe également chez tous les peuples. »-« Seulement, dit-il, le jeu et l'exercice des différens pouvoirs varient selon la forme diverse des gouvernemens, plus ou moins parfaits, plus ou moins concentrés; tantôt accumulés dans la main d'un despote ou divisés dans celles de la démocratie; tantôt remis aux soins d'une aristocra

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tie plus ou moins éclairée, plus ou moins généreuse, plus ou moins désintéressée, plus ou moins amie des libertés publiques et de l'intérêt du pays; tantôt enfin, répartis avec sagesse et dans de justes proportions entre le monarque, les grands et les classes intermédiaires de la société.- Mais, quelle que la forme des gouvernemens, aucune section du peuple, aucun individu ne peut s'attribuer à soi-même une part quelconque de l'autorité publique. C'est à des usurpations de ce genre, poursuit notre auteur, qu'on doit attribuer l'établissement de l'anarchie féodale: elle s'est élevée, petit à petit, sur les ruines de l'autorité royale, qu'elle a fini par annuler, et au mépris des droits de la nation, qu'elle a réduite en un dur et honteux esclavage. La même masse de pouvoir existait toujours dans la nation; mais quelle difference! Au lieu d'un législateur unique, à la place de Charlemagne proclamant ses capitulaires au milieu de l'assemblée des Francs, des milliers de législateurs particuliers sont venus fausser le droit commun pour le tourner à leur profit personnel! Chacun a battu ou plutôt altéré monnaie. Au lieu d'un seul genre de guerre, celle de la nation en masse levée contre ses ennemis extérieurs, on a vu les guerres privées de château à château, de ville à ville, de province à province, de vassal à suzerain, du sujet à son roi. A la place d'une justice unique, pure, impartiale, émanant du prince pour la protection uniforme des citoyens, on a vu les justices patrimoniales, les procureurs fiscaux, et avec eux les confiscations et toute espèce d'arbitraire et de vexations; jusqu'à l'époque où, se relevant de ses ruines à l'aide des communes affranchies, le pouvoir royal sut rappeler à lui, par le droit, tout ce que la féodalité lui avait ravi par le fait. »

Assurément, il est impossible de retracer avec plus de vigueur et de rapidité cette longue partie de notre histoire, où les usurpations de l'aristocratie féodale avaient pris la place d'un gouvernement régulier, avaient anéanti l'ancienne légis

lation, et compromis les droits du trône autant que ceux de la nation.

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Après ces notions générales, M. Dupin aborde la grande question de la division des pouvoirs. « Leur confusion produit l'anarchie leur concentration crée le despotisme; leur juste répartition assure le bonheur du peuple et la durée du pouvoir.» Venant à l'application, il montre qu'en France le gouvernement n'a jamais été absolu. Il rappelle les paroles que saint Louis, au lit de mort, adressait à son successeur: « Beau fils, maintiens les franchises et libertés de tes subjets, et les tiens en faveur et en amour; cette formule du serment de nos rois à leur sacre : « Je promets à mon peuple que je ferai usage de mon autorité pour la conservation de son droit et des lois;

et Laroche Flavin qui, en parlant des moyens d'opposition qui existaient de son tems, les appelle de « bonnes et sûres brides pour tempérer le pouvoir et empêcher que la monarchie n'aille à l'abandon par la volonté effrénée d'un seul. »

M. Dupin en tire cette conséquence, que l'auteur de la Charte, en donnant à la France une constitution libre et monarchique, suivant les expressions de la Charte elle-même, n'a réellement fait que renouer la chaîne des tems anciens avec celle des tems modernes.

Il analyse ensuite les élémens du gouvernement actuel, énumère les diverses branches d'administration publique, sous chacune desquelles viennent se ranger des fonctionnaires plus ou moins subordonnés, ce qui constitue la hiérarchie : « sorte d'échelle le long de laquelle le pouvoir descend du trône jusqu'au dernier employé, et remonte ensuite jusqu'au trône en parcourant les mêmes degrés. »

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Lorsqu'il s'agit de déterminer la compétence d'une autorité quelconque, deux choses sont d'abord à considérer, la juridiction et le territoire. Ici, l'auteur entre dans de savans dé

veloppemens, où nous ne le suivrons pas, sur la nature des juridictions, leurs diverses espèces, l'étendue des ressorts, le pouvoir d'exécution, et autres questions de doctrine qu'il résout avec les lois romaines et les principes du droit public. Il parle ensuite des récusations qui frappent d'incompétence les divers fonctionnaires : et partant du principe du droit naturel et de pudeur publique (ce sont ses expressions), qui ne permet pas que l'on puisse être juge dans sa propre cause, il déclare que, dans son opinion, ce principe n'admet aucune exception. Il l'applique aux administrateurs aussi bien qu'aux juges. Il l'applique même aux chambres législatives. « Ainsi, dit-il, si quelque pair ou député avait un intérêt direct et personnel à ce qu'une loi passât, en bonne et droite conscience, il devrait s'abstenir de voter. » M. Dupin appuie sa théorie sur l'exemple de saint Louis qui, dans une occasion mémorable, où il était personnellement intéressé à la décision, se récusa de lui-même, et laissa aux barons le soin de juger pour ou contre lui.

Nous ne pouvons étendre plus loin cette analyse ; il nous suffit de dire que l'ouvrage abonde en réflexions justes, semées de traits piquans qu'on aime d'autant mieux à rencontrer, que la matière en paraît moins susceptible.

La Collection de lois publiée par M. Dupin est un véritable service rendu à la science. A l'aide des divers recueils qu'il a composés, il devient facile à présent de refondre la législation; de faire, non plus de ces lois de détail qui s'ajoutent les unes aux autres et ne font qu'accroître la difficulté de les connaître toutes et l'embarras de les bien appliquer; mais des lois générales qui comprennent tous les cas particuliers. Une ordonnance royale, du 21 août 1824, a nommé une commission chargée de présenter des projets d'ordonnances générales destinées à remplacer les dispositions des ordonnances, décrets et arrêtés antérieurs. L'idée en est bonne. On doit seu

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