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Le lit, le costume des hommes et des femmes, la cuisine, le service de table, sont racontés par M. de Vaublanc avec de menus détails fort curieux; le tout mêlé d'histoires que devroient bien lire nos inventeurs de romans.

Puis le caractère national est peint dans les fêtes et dans les jeux; il est peint aussi dans les guerres, qui alors étoient un jeu et une fête. Déjà M. Michaud nous avoit fait aimer ses croisés, avec leur mélange de bravoure et de raillerie, de bonhomie et de fierté: M. de Vaublanc ravive ces souvenirs. Toutefois, de caractère primitif garde ses imperfections, et toujours reparoît le Gaulois de César, léger, inconstant, prompt à adopter les nouveautés, áðtenter lex hasards et à se décourager; ou le Gaulois de Caton, qui aime avant tout deux choses, bien combattre et finement parler. Peuple singulier, aimé et envié des autres peuples, et de qui couroit, au temps de Charlemagne, un dicton grec, traduit en deux versed Jokes

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Les vertus sérieuses se mêlent aux défauts aimables; vous le voyez par les récits d'hospitalité et de fêtes publiques. Puis apparoissent les jeux, des danses, la chasse, le faucon surtout, avec ses prouesses. Dans ces récits de vie privée, le livre de M. de Vaublanc est plein de charme; et ainsi, passant des choses graves aux jeux légers, le savant écrivain arrive à la fin de ses études par un sujet qui couronne tristement toutes les œuvres humaines, par des tableaux de sépulture et par des images de mortem. Oldersmi arra,iosgaila 20%

Les usages funèbres du moyen-âge étoient principalement restés vivants à Saint-Denis. La Révolution françoise qui ne pouvoit rien supporter des vieux siècles, s'en alla disperser ces reliques saintes. Pendant ce temps, dit M. de Vaublanc, le dernier roi de la vieille monarchie mouroit par la main des hommes enivrés du vin de la colère divine, et il leur pardonnoit, car lui aussi étoit fils de saint Louis. » C'est sur cette im

pression de douleur que s'achève ce grand et bel ouvrage, et enfin l'auteur s'écrie :

<< Adieu, nobles chevaliers! adieu, pâles figures d'anachorètes, trouvères galants et doux visages de femmes ! adieu, mœurs vives et singulières d'un temps évanoui dans l'abîme des siècles ! nous vous quittons à regret pour retourner aux réalités du présent. Puissent ces pages devenir utiles à ceux qui voudront aussi vous connoître. Que les amis de l'histoire nationale profitent de nous, comme nous avons profité de nos devanciers; qu'ils élèvent un monument plus durable à la gloire de la France, et qu'ils répètent, comme nous l'avons fait, du fond de notre cœur, en observant cette grande époque et en pensant à celle qui commence, qu'ils répètent le cri des Croisades: Diex aie!

Telle est la conclusion du livre : et je ne m'étonne pas que l'auteur se sépare avec peine de toute cette poésie du donzième siècle qui ne revivra plus. Heureux toutefois, puisque l'amour des études le peut consoler des tristesses de la vie contemporaine! heureux aussi, puisqu'il lui a été donné de faire aimer des temps que plusieurs trouvoient juste de dédaigner!

M. de Vaublanc a eu le secret de concilier, dans son langage, l'admiration du passé et le respect du présent. Son enthousiasme est mêlé de critique; quelquefois même, son blâme est sévère, peut-être injuste, et par exemple, s'il juge des actes dont la violence s'explique par le zèle d'un siècle de foi, il semble trop se souvenir de quelques-unes des idées d'un siècle sceptique; ceci s'applique particulièrement à la guerre des Albigeois, guerre lamentable, mais qu'il est peu philosophique de déplorer seulement comme une guerre de fanatisme. C'est aussi la seule restriction à tant d'éloges dus au savoir historique et à la raison chrétienne de l'écrivain.

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Mais qu'il soit loué sans réservé d'avoir, dans cette variété de sujets, où se mêle de grand et le naïf, l'héroïque et le vulgaire, gardé le soin de la langue et du style. Rare mérite en nos temps de composition précipitée, où le fond est vide, où

la forme est vaine, où l'élégance même est trompeuse. C'est qu'il a fui le contact de nos lettres si tristement gâtées par les passions de la politique. Hélas! et pour tout dire, M. de Vaublanc fait ses livres loin de nous. Munich, cette Athènes nouvelle, lui prête son repos; mais la France ne cesse pas de l'inspirer. Ainsi s'explique le caractère calme et pur de cet ouvrage, qu'on diroit fait pour une société lettrée, et où le talent et le travail seroient assurés de leur part de gloire (1). LAURENTIE.

VARIÉTÉS BIBLIOGRAPHIQUES.

CONVENTION NATIONALE.

INSTRUCTION PUBLIQUE.

SECOND RAPPORT SUR LE VANDALISME, PAR GRÉGOIRE (2).
Séance du 8 Brumaire, l'an III.

CITOYENS,

Vous avez mis sous la sauve-garde de la loi tous les monuments des sciences et des arts. Beaucoup de districts se sont empressés de concourir à l'exécution des mesures que vous avez prises pour arrêter les destructions; mais dans d'autres, nous venons vous le dire avec douleur, les destructions continuent.

Tandis que la sagesse de vos décrets atteste la sollicitude des législateurs pour étouffer l'ignorance et faire triompher les lumières; tandis qu'à votre voix les hommes à talents sortent des cachots et que le génie relève sa tête humiliée, la barbarie et l'esprit contre-révolutionnaire tiennent sans cesse le poignard levé pour assassiner les arts. Une horde de scélérats

(1) Cet article a paru dans le journal l'Union.

(2) Nous avons réimprimé dans le Bulletin les premier et troisième rapports de Grégoire sur le Vandalisme révolutionnaire, nous espérons que le second, aussi curieux que les deux autres, et que sa rareté nous avoit empéché de découvrir, sera agréable à nos lecteurs. Cette pièce renferme les dé tails les plus intéressants sur les dévastations commises durant les mauvais jours de notre histoire. (Note de l'éditeur).

veulent par ces moyens faire haïr la liberté, qu'en dépit de leurs efforts le peuple françois ne cessera d'aimer qu'en cessant d'exister.

La correspondance du comité d'instruction publique et de la commission temporaire des arts nous a fait connoître de nouvelles dégradations.

Nous avons pensé qu'il falloit leur donner de la publicité, afin de signaler les coupables, de placarder l'opprobre sur leurs fronts, et de prémunir sans cesse les bons citoyens contre les erreurs de l'ignorance et les insinuations de la perfidie.

A Ussel, à Saumur, à Lons-le-Saunier, les livres, les tableaux et d'autres objets rares ont été vendus à très-vil prix.

A Mont-de-Marsan, deux belles statues par Mazetti ont été mutilées; d'autres ont failli subir le même sort.

A Reims, on a mutilé un tombeau d'un beau travail, et précipité d'une hauteur de vingt pieds un tableau de ThaddéeZuccharo; le cadre a été brisée : la toile dégradée a été retrouvée dernièrement sur les marches d'un escalier.

A Melun, une belle statue de marbre blanc a été cassée. A Fontainebleau, un tableau magnifique est en cendres, et l'on a brisé une statue de fleuve en bronze qui avoit été exécutée sous la direction de Léonard de Vinci.

Au Muséum des plantes, on a outragé le buste de Linnée. A Bayeux, des commissaires instruits et patriotes ont sauvé la fameuse tapisserie dont la broderie attribuée à Mathilde, femme de Guillaume le Bâtard, représente les expéditions de son mari dans la grande et la petite Bretagne. Pour la seconde fois ce monument échappe à la destruction, car il faillit périr en 1562, dans le temps des guerres civiles; et dans l'irruption vandalique qui vient d'avoir lieu; mais plusieurs statues d'un bon style, et la presque totalité des tableaux qui se trouvoient à la cathédrale et dans les autres églises de Bayeux, sont anéantis.

A Douai, on avoit donné l'ordre de brûler tous les livres

concernant le culte : ce qui pouvoit anéantir la moitié des bibliothèques; car, la limite à cet égard n'étant pas tracée, à quel terme pouvoit s'arrêter la fureur?

A Etain, depuis les anciens inventaires on a volé dans les bibliothèques des ci-devant capucins et de la ci-devant abbaye de Châtillon.

A Saint-Serge, près d'Angers, l'église des ci-devant bénédicins contenoit des groupes précieux; on les a brisés. Deux belles statues (le saint Roch et le saint Sébastien) avoient échappé à cette rage dévastatrice; elles viennent d'être détruites, et plus de cent beaux orangers ont péri, faute de soins. A Villefranche, département du Rhône, étoient une orangerie et une serre-chaude : tout est détruit.

A Marly, beaucoup de statues sont bien conservées, mais qui n'auroit le cœur navré, en voyant dans un coin un amas de bras et de jambes cassés à des chefs-d'œuvre ?

A Toulouse, on conservoit les registres des sentences originales de l'Inquisition. Limborch, qui a fait l'histoire de l'Inquisition, ne s'étoit procuré qu'avec beaucoup de peine la lecture de ces manuscrits, actuellement ils sont détruits.

A Verdun, des municipaux, ayant à leur tête un nommé Carache, ont brûlé des tableaux précieux et des statues. Les amis des arts regrettent surtout une Vierge de Houdon et un Christ mort, de grandeur naturelle : ce chef-d'œuvre de sculpture, d'un dessin plus correct et d'un ciseau plus hardi, peutêtre, que le monument de saint Mihiel, faisoit l'admiration des étrangers. Un artiste estimable s'étant présenté à la place de l'exécution, afin de conjurer la fureur, offrit de payer chèrement une main pour apprendre à dessiner à ses enfants; il fut repoussé par les clameurs de la rage, et n'échappa que par le silence et la fuite.

A Versailles étoit une magnifique tête de Jupiter, dont l'historique mérite une courte digression. Il paroît assez bien prouvé qu'elle date de 442 ans avant l'ère vulgaire, qu'elle est un ouvrage du célèbre Myron, et qu'elle a fait partie du Jupiter

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