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d'Aristote étoit l'ouvrage le moins connu de ce grand homme. Il n'a jamais existé de chaire de droit public dans nos universités. Les littérateurs ne cherchoient, dans les anciens, que les choses d'agrément; les philosophes se bornoient à ce qui regarde les sciences spéculatives; les magistrats et les jurisconsultes n'avoient ni le temps ni la volonté de faire des recherches qui leur paroissoient plus curieuses qu'utiles.

Nous naissons dans des sociétés formées. Nous y trouvons des lois et des usages; nous ne regardons point au-delà: il faut que les événemens donnent l'éveil à la philosophie. Aussi, parmi nous, la politique a été un des derniers objets vers lesquels les philosophes ont tourné leurs méditations.

L'Allemagne, divisée depuis des siècles en une foule de petits Etats, qui ont des intérêts particuliers et un intérêt commun; qui forment une société de sociétés, une espèce de république; qui ne compte que des princes pour citoyens, et dans laquelle les questions les plus délicates ont été fréquemment agitées, l'Allemagne, dis-je, étoit destinée, par sa constitution, à être le berceau de la raison publique. C'est là où l'on a commencé à se douter qu'il y a un droit politique général, qui a fondé les sociétés humaines, et qui les conserve. C'est là où Grotiùs, Puffendorff, Barbeyrac et autres, ont jeté les premiers fondemens de ce droit. Malheureusement, leur érudition étouffoit leur génie; ils abandonnoient la raison naturelle, quand ils ne pouvoient l'appuyer sur aucun texte positif; la plus légère autorité leur rendoit le courage, mais ils eussent rougi de parler sans autorité.

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Ailleurs, l'uniforme monotonie de nos grands Etats modernes, le voile qui cachoit leur administration, les entraves mises presque partout à la liberté de la presse, étoient autant d'obstacles aux progrès des lumières, sur les matières de législation et de gouvernement. Nous étions moins avancés sur ces matières, pendant le règne de Louis XIV, et jusqu'au milieu de celui de Louis XV, que nous ne l'avions été dans les siècles que nous nous plaisons quelquefois à ler barbarés. Comme, dans les guerres civiles, on a besoin des hommes, on laisse agiter leurs droits, on reconnoît leurs franchises, pourvu qu'on puisse compter sur leur secours. Toutes les maximes d'Etat, tous les principes populaires ont été fixés dans des momens de crise. Quand la puissance est raffermie et rassurée, l'ignorance renaît souvent avec la tranquillité.

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Veut-on rencontrer, dans notre législation et dans nos écrivains, quelques règles favorables au corps de la nation, quelques principes raisonnables de liberté? il faut précisément recourir à des lois oubliées, et à des livres surannés.

Les ordonnances d'Orléans (1), de Moulins (2) et de Blois (3) prohiboient les lettres de cachet, et elles défendoient aux sujets d'y obéir.

(1) Art. CXI.

(2) Art. LXXXI.

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(3) Art. CCLXXXI. — Unum mihi superest de privatâ principis epistolâ quandam interdum fatigatus importunis flagitationibus, quasi impar scribit vel ad judices, vel ad alios, quibus eo modo invitus quipiam imperat, vulgò dicimus LETTRES DE CACHET, quam ut nullius esse momenti volunt constitutiones Aurelianensis art. CXI et Blesensis art. CCLXXXI. MOR

L'avocat-général Servin (1), sous Henri IV, soutenoit et développoit ces grandes maximes, que l'autorité des princes n'est point absolue; qu'elle est limitée par la loi, et qu'ils l'exercent dans l'intérêt des peuples. L'avocat-général de Gueïdan, sous Louis XV, faisoit brûler, par le parlement de Provence, une brochure qui retraçoit les mêmes maximes, et il crioit à la sédition et au blasphème.

Nous lisons dans Dumoulin, sur la Coutume de Paris, qu'il n'y a que des courtisans et des flatteurs qui puissent dire que les ordonnances des rois forment le droit commun du royaume, tandis qu'il est incontestable, ajoute-t-il, que le droit commun du royaume n'existe et ne peut exister que dans les coutumes générales, qui sont le dépôt des usages adoptés par la nation entière (2). Les jurisconsultes qui sont venus après

J'oserai dire

NAC., L. Pen. ad Cod. de diversis Rescriptis. que les officicrs ne doivent avoir aucun égard aux lettres que le roi leur pourroit envoyer pour décider les questions qui seroient pendantes devant eux; car ils doivent présumer que c'est par surprise qu'elles ont été obtenues..... L'on doit tenir le semblable de toutes les autres lettres signées en commandement, qui sont contraires aux lois générales du royaume, s'il n'y a expresse dérogation, et des lettres de cachet que les ordonnances réprouvent et défendent à tous les juges d'y avoir aucun égard, à cause de la facilité qu'il y a à les obtenir. C. LEBRET., de la Souveraineté du Roy., liv. II, chap. 9; Euv. in-fol. Paris., Quesnel, 1642, p. 118.

(1) Actions notables et plaidoyez de messire Loys SERVIN, conseiller du roy en son conseil d'estat, et son advocat general en sa cour de parlement : in-4o. Rouen, L. Londet, 1629.

(2) Novi quidam scioli (ut Petrus Rebuffus) aut adulatores

Dumoulin, ont modestement enseigné que les coutumes n'avoient de force que par la tolérance des rois. Beaumanoir (1) loue l'usage où l'on étoit, de son

temps,

d'indemniser le particulier dont on prenoit le bien pour quelque ouvrage public. Dans nos temps modernes, on avoit transformé en maxime d'Etat, le prétendu droit qu'a la cité de prendre le domaine d'un citoyen, sans l'indemniser.

Loiseau, dans son Traité des Seigneuries (2), refuse de placer le droit de lever impôt, sans le consen

aulici, jus commune Francorum vocant constitutiones regia. sed fallunt et falluntur : regiæ enim constitutiones, etiamsi sint communes toti regno, ut edicta quamvis particularia in re subjectâ, generalia verò in personis : non tamen faciunt jus commune et generale respectu politiæ et gubernationis universalis, à quâ tam longè absunt, quàm à Pandectis. Non sunt enim aliquid quàm placita particularia, pro majore parte temporaria et momentanea, et sæpiùs quæstuaria..... Franci et Galli semper habuerunt consuetudines quasdam generales et communes..... Et illæ consuetudines erant jus peculiare et commune Francorum et Gallorum..... Et quanquam tractu temporum multiplicatæ sint et diversificatæ consuetudines locales..... tamen semper remanserunt jura quædam generalia et pecularia Francorum. DUMOULIN, Comm. ad Consuet. Paris., tit. I, nos 106 et 107. Op. t. I, p. 22, in-folio. Parisiis, E. Desallier 1681. (1) Coutume de Beauvoisis.

(2) A l'égard de faire des levées de deniers sur le peuple, j'ai dit que les plus retenus politiques tiennent que les rois n'ont droit de les faire, par puissance réglée, sans le consentement du peuple, non plus que de prendre le bien d'autrui, parce que la puissance publique ne s'étend qu'au commandement et autorité, et non pas à entreprendre la seigneurie privée du bien des particuliers. Chap. III, no 42, sur les Régales, nos 79-80 et 81.

tement des peuples, dans la classe des droits royaux. Il soutient que les anciens seigneurs n'avoient que la garde et la tuition des places, des chemins, des promenades publiques; qu'ils n'en avoient point le domaine, et que la justice qu'ils exerçoient, ou qu'ils faisoient exercer, étoit moins un honneur ou une propriété qu'un devoir. Après Loiseau, on n'a parlé que de la patrimonialité des justices seigneuriales; on a considéré les seigneurs, comme vrais propriétaires des régales; on a dit que le droit des peuples, pour le consentement de l'impôt, étoit abrogé ou proscrit.

Ayrault, dans son Ordre judiciaire (1), veut que la procédure criminelle soit publique. Dans l'ordonnance de 1670, qui est la dernière loi royale intervenue sur l'instruction des crimes, on supprime jusqu'aux adjoints, que des lois précédentes donnoient au juge qui informoit.

Sous Henri IV, on publie l'édit de Nantes, et on proclame la tolérance. Sous Louis XIV, l'édit de Nantes est révoqué, et on persécute.

Saint Louis avoit jeté les fondemens des libertés de l'Eglise gallicane (2); il avoit marqué les limites qui défendent les droits de l'empire contre les entreprises

(1) Liv. III, art. 3, no 56 jusqu'à la fin, in-4°. Lyon, 1642, p. 361-381.

(2) Et de bien d'autres. C'est sous son règne que les grands du royaume n'hésitèrent pas à déclarer à la reine Blanche, régente pendant l'absence du roi, que les emprisonnemens étoient contraires à la liberté du royaume, parce que personne, en France, ne pouvoit être privé de ses droits que par les voies judiciaires. — Pars maxima optimatum petierunt de consuetu

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