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divulgués se colportent de toutes parts. Mais dès que le Juste a expiré sur la croix, que l'innocent a payé pour le coupable, que la rédemption est accomplie, nul ne s'informe plus des prédictions, ne s'inquiète sur les sacrifices à offrir; les troupeaux ne sont plus décimés; et quand ensuite, s'efforçant de rétablir les autels brisés de l'Olympe, un empereur vient sacrifier dans un vieux temple de l'Asie, à toute peine le Pontife trouve-t-il une victime, et il est réduit à la prendre lui-même dans sa basse-cour. On coupe le cou à une oie! Dans une de ses lettres, Julien déplore cette mesquinerie.

Résumions:

Durant trente siècles, l'univers attendit un sauveur. Depuis dix-buit cents ans, on a cessé de l'attendre. Pourquoi ce changement soudain dans l'espoir des nations? De l'aveu même des impies, le christianisme est universel. Tous les hommes ont confessé une faute à expier, — ont cherché par le sang cette expiation; tous étaient persuadés que l'innocent devait payer pour le coupable, attendaient un RÉDEMPTEUR. L'histoire atteste qu'un homme est venu, a opéré des prodiges. Ces prodiges, ses ennemis, les Juifs, Celse, Porphyre, l'apostat Julien, les reconnaissent. J.-J. Rousseau déclare d'ailleurs que « les faits de Socrate, dont personne ne doute, sont moins attestés que ceux de JésusChrist. » — Sans crime, cet homme est mis à mort. Le témoignage est unanime sur ce point. Il est encore certain que depuis l'immolation du Juste sur le Calvaire, les peuples ont cessé d'attendre le REDEMPTEUR, - que l'expiation n'est plus cherchée dans l'effusion du sang. A cela que répondre ? Il est également constant que le Christ n'a rien inventé, qu'il n'est pas venu pour détruire, mais pour relever, pour élargir, - pour libéraliser la loi et le monde.

Toutes les notions vraies, existant dès l'origine, devenues défaillantes et confuses au milieu des populations, il les a appelées à lui, Verbe éternel, et les proférant, les a douées d'une vie immortelle. Ainsi pour ne parler que d'un seul sacrement, le premier, le baptême, le divin législateur ne l'a point créé, mais consacré par son institution. Avant sa venue, la purification_par l'eau était établie chez les Perses. Les Egyptiens, les Grecs la connaissaient. A Rome, une fête célébrait le jour où l'onde lustrale purifiait le nouveau-né. Les Parsis recevaient le baptême. Les mêmes ablutions existaient au Mexique.

Nous retrouvons cet usage au Yucatan, aux Canaries, chez les Thibétains, aux Indes. Preuve nouvelle de l'antiquité, de l'identité, de l'universalité du christianisme; - Et quand le grand Bossuet s'écrie: « Voilà douc la religion toujours uniforme, ou plutôt toujours la même, depuis l'origine du monde. Ou y a toujours reconnu le même

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Dieu pour auteur, le même Christ comme sauveur du genre humain. » Le philosophisme ne peut le contredire; car il reconnaît aussi que « le christianisme est dans son principe une religion universelle, qui n'a rien d'exclusif, rien de local, rien de propre à tel pays, etc..» Après tous ces faits, qu'objecter encore contre la foi? N'est-on pas forcé de conclure avec JeanJacques, que, « quand tous ces signes se trouvent réunis, c'en est assez pour persua der tous les hommes, les sages, les bons et le peuple; tous, excepté les fous incapables de raison, et les méchants qui ne veulent être concaincus de rien (1). »

Dans son expiation, le Christ résuma toutes les douleurs de l'humanité, et dans son enseignement toutes les traditions de la săgesse antique.

Sa doctrine la voici expliquée par luimême : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme et de toutes les forces. Voilà le plus grand et le premier des commandements. Le second lui est semblable: « Tu aimeras ton prochain comme toimême. » Ces deux commandements renferment toute la loi et les prophètes, En effet, là est tout. — Aussi le disciple bien-aimé, celui qui se reposa sur le sein de son maître, parvenu à une extrême vieillesse, n'ayant plus assez de vigueur pour semer la parole, distribuait-il au peuple ces mots comme suprême enseignement : « Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres! - Mes bienaimés, aimons-nous les uns les autres, parce que la charité vient de Dieu; et tout homme qui n'aime point, ne connaît point Dieu, car Dieu est amour. Dieu est amour. Si quelqu'un dit j'aime Dieu, et ne laisse pas de hair son frère, c'est un menteur; car, comment celui qui n'aime point son frère, qu'il voit, peut-il aimer Dieu qu'il ne voit pas ?-Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres! »

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Visiblement le principe éternel d'amour et de charits allait s'éteignant dans les ténèbres de l'égoïsme; le Christ l'a rallumé de son souffle puissant. L'immolation de l'amour de soi pour faire place à l'amour d'au trui tel est le précepte qu'il a introduit dans le monde. - Les sacrifices et le mérite y sont contenus. et le bien de l'humanité entière en découle.

A ce dernier aspect, l'auteur de l'Esprit des Lois jette celle exclamation: « Chose admirable I la religion chrétienne, qui semible n'avoir d'objet que la félicité de l'autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci. Pénétré d'un sentiment pareil, un protestant qui fut publiciste et orateur à la chambre des députés, Benjamin Constant, parlait en ces termes de la religion : « Elle est le centre commun où se réunissent au-dessus de l'action du temps et de la portée du vice, toutes les idées de justice, d'amour, de l berté, de pitié qui, dans ce monde d'un jour, composent la dignité de l'espèce humaine; elle est la tradition permanente de

(1) J.-J. Rousseau, Lettres de la Montagne, p. 89.

re qui est beau, grand et bon; à travers l'avilissement et l'impiété des siècles, la voix éternelle qui répond à sa vertu dans sa langue, appelle du présent à l'avenir, de la terre au ciel; le recours solennel de tous les opprimés dans toutes les situations, la dernière espérance de l'innocence qu'on immole et de la faiblesse que l'on foule aux pieds. » Convenons-en, si notre religion est la vérité la plus douce au cœur, la plus consolante pour l'âme, elle est encore la plus salisfaisante à la raison, la plus démontrée, la plus démonstrative, la plus tangible.

Aussi, en présence du consentement unanime des nations, du témoignage de tous les temps, de toutes les races, devant l'étonnante concordance des travaux de l'érudition moderne, après avoir secoué la poussière des siècles, vérifié les curieuses annales de l'espèce humaine; retrouvant toujours une croyance identique, permanente, universelle, nous nous sommes sentis émus d'admiration et de respect. Et nous avons salué l'étendard de la miséricorde, le gibet de l'esclave! cette croix, jadis emblème de servitude et d'ignominie, aujourd'hui signe d'affranchissement et de salut, élevée aux regards des peuples, comme dans le désert ce serpent d'airain, dont la vue guérissait les blessures. Et, par les clartés de la science, guidés au temple du catholicisme, nous y sommes entrés. Et ce qu'ont enseigué les apôtres et leurs successeurs sur la chaire de Pierre le pêcheur d'hommes, nous l'acceptons. Et fidèlement soumis à la docIrine de notre sainte mère l'Eglise, nous lui reconnaissons, même humainement, la possession du fondement le plus solide de la certitude. Et nous croyons! nous croyons; mais, hélas !... comment agissons-nous !

Quant à vous, que nous aimons pour le présent et l'avenir, hommes loyalement engagés dans la recherche de la vérité, l'évidence de ces fails, nous l'espérons, vous aura également persuadés. Comme nous Vous aurez ouvert vos yeux au jour. Lors donc que vous vous rencontrerez avec des ignorants superbes, hostiles à nos croyances; lorsqu'ils élèveront contre la grandeur de Dieu, la sublimité des mystères, de téméraires objections, vous leur opposerez, non Votre sens particulier, votre sentiment personnel, mais ce langage universel de la foi qu'ont parlé dans tous les siècles les habitants du globe; vous répondrez par l'attestation éternelle du genre humain au vain argument d'un orgueil isolé: le temps Il faut savoir le faire. est venu de parler. - Pour justifier la foi, il suffit de montrer de ses œuvres.

Aussi haut que puisse remonter l'histoire, nous trouvons la servitude des femmes, l'esclavage des races, l'oppression des pauvres, l'humiliation des clients, une inégalité de conditions qui semble établir entre les castes des natures différentes, des créations distinctes. Le Christ paraît et introduit sur la terre la liberté, la fraternité, la charité. Il émancipe la femme, affranchit l'es

clave, délivre l'indigence du poids de la richesse, sauve l'ignorance du joug de la science orgueilleuse. Il comble les distances qui séparaient les hommes. 11 élève le prolétaire à la dignité de la personne. Il fonde l'égalité jusqu'alors incomprise.

En vain le philosophisme prétend-il que l'enseignement du Sauveur existait avant sa venue; que tout ce qu'a dit le Christ, d'aufres non moins habiles l'avaient dit déjà ; Et c'est là que Jésus n'a rien inventé. surtout la preuve irrécusable, le sceau de sa divinité ! C'est d'avoir, sans rien instituer de nouveau, renouvelé l'univers ! Par son essence, la vérité subsistant éternelle, le Christ ne pouvait la créer à son avénement. Elle était. Il s'est borné à la montrer, à la rappeler à l'homme. Mais d'où vient donc que les philosophes d'Athènes, d'Alexandrie, soutenus par de doctes et puissants disciples, des monarques, des dotations, des honneurs publics, n'avaient pu faire germer une doctrine utile, et que Jésus de Nazareth, né dans une étable, fugitif, haï, persécuté, et enfin mort du supplice des derniers scélérats, a changé la face du monde! D'où vient que, sans prescrire d'affranchir l'esclave, il l'a délivré; que, sans publier qu'il réhabilitait la femme, il l'a restituée à sa première condition? Comment se fait-il que chaque idée de son enseignement, déjà promulguée par Zoroastre, Buddha, Confucius, Pythagore, Socrate, fût demeurée inféconde et stérile pour l'humanité? N'est-ce point parce que seul le Verbe pouvait, en la proférant, lui donner la vie? ROSELLY De Lorgues.

RATIONALISTE CONVERTI (UN). (Extrait de l'Eloge de M. Droz, couronné par l'Académie de Besançon.)

Un des principaux caractères du genre de M. Droz dans ses compositions morales, c'est qu'il associe le lecteur à ses investigations, et qu'il semble même s'appuyer sur lui pour mieux atteindre le but de ses études. Persuadé que le plus grand obstacle à la recherche de la vérité est la prétention de l'avoir trouvée, il se garde bien d'affecter un ton tranchant et dogmatique. Veut-il obtenir la solution d'un problème de la science politique et morale, il s'interroge sur les moyens qui s'offrent d'abord comme les plus simples et les plus naturels de découvrir la vérité, il rassemble les données les plus claires, il écarte les circonstances inutiles ou superflues, il évoque tour à tour des idées accessoires et complémentaires qui étendent, fortifient et parfont ses raisonnements, et il arrive ainsi par degrés à satisfaire son lecteur et lui-même, en lui exposant enfin ce qu'il croit être la solution désirée. Il y a dans cette manière de procéder quelque chose d'affectueux, de doux, d'insinuan', qui plaît et attache, et l'on écoute les leçons d'un professeur aussi engageant, avec la confiance que l'on donnerait aux enseignements d'un père révéré,

d'un ami vertueux. C'est ainsi que Socrate qui lui manquait, se retrouvera au point de devait instruire ses disciples.

C'est le lieu d'examiner la valeur philosophique des systèmes de morale rapprochés et arrangés par M. Droz, et d'apprécier l'influence qu'ils peuvent avoir pour corriger et diriger les actions humaines. Le premier désavantage de ces systèmes est de présenter les mêmes inconvénients que ceux qu'ils devaient remplacer dans l'esprit de l'auteur. En effet, ils portent sur la même base, ils partent du même principe, et, par consé quent, ce qui manquait à l'autorité des premiers systèmes manque également aux derniers. Qu'importe que ceux-ci soient conçus avec plus d'adresse, et qu'ils offrent même une certaine perfection relative? Les uns et les autres sont pareillement des combinaisons artificielles, un exercice de l'esprit, rien de plus. Montrez-nous l'autorité qui oblige la raison de l'homme à s'y soumettre. Où est la sanction qui le contraint de les mettre en pratique? Vous ne sauriez répondre. C'est ce que l'auteur lui-même reconnaîtra plus tard dans ses Aveux: «Plus on observe, plus on voit qu'il ne suffirait point d'enseigner une morale pure, qu'il faut donner encore la force de la suivre... Choisissez dans le nom bre de nos systèmes de morale celui que vous jugerez le meilleur examinez ses effels saus partialité il a très-peu d'influence; il exerce l'esprit bien plus qu'il ne pénètre 'âme. Si quelques philosophes paraissent tirer de grands avantages de la théorie qu'ils aiment, ce sont ceux qui, doués d'une rare fermeté de caractère, communiquent à leur théorie la force individuelle qui existe en eux-mêmes. La religion soutient ses disciples; nos systèmes ont besoin que nous les soutenions: nous sommes trop faibles pour obtenir ainsi de grands résultats. »>

Après avoir confessé que le système du déisme est trop flexible, que sa théorie est, pour ainsi dire, trop élastique, il remarquera que la morale évangélique elle-même perdrait sa force si on la séparait des dogines el du culte. Or, tandis que d'un côté la philosophie ne laissera plus d'abri où sa raison puisse se retrancher, de l'autre les dogmes et les mystères de la religion continueront de révolier sa raison. Des troubles et des perplexités infinies viendront l'assaillir, et il prendra la résolution désespérée de ne plus penser (1)! Qu'est devenu le temps où le philosophe écrivait que le plus sûr moyen pour être heureux est de beaucoup réfléchir? Il a voulu suivre les lumières de la seule raison naturelle, et la raison, aidée de tous les secours de la philosophie, n'aura fait que le replonger dans des ténèbres sans fin et dans un labyrinthe sans issue! C'est ainsi que M. Droz, après avoir parcouru le cercle des sciences morales, mais docile à la voix de sa conscience qui le stimulait sans relâche à l'enquête du trésor

(1) Aveux d'un philosophe, pag. 34 et 35.

départ de tout chrétien, au catéchisme. Dieu
le permettait pour témoigner une fois de
plus qu'il est toujours prêt à recevoir les
hommes affamés de la justice. Il les accueille
sur le soir avec la même bonté qu'à la pre-
mière heure. parce que sa libéralité inépui-
sable a des récompenses infinies pour tous
ses amis, et que devant le juge qui sonde les
reins et les cœurs, souvent les derniers de-
viennent les premiers. M. Droz dut alors ad-
mirer la prévoyance et la bonté de ce Dieu
qui a mis la vérité à la portée des simples
et des enfants, sans obliger l'homme, pour
la connaître, à se livrer à des études ar-
dues et à des méditations abstraites. Ne
s'était-il
s'était-il pas lui-même écrié autrefois,
dans un de ces moments où un rayon de
lumière vient percer les ombres du scep
ticisme: « Oh! que la nature se fat mon-
trée peu prévoyante, si, pour nous éclairer
sur nos devoirs, les doctrines scientifiques
eussent été nécessaires (2)! »

Ses deux dernières productions vont marquer une phase nouvelle dans cette vie si égale et si régulière; je veux parler des Pensées sur le Christianisme, et des Aveur d'un philosophe chrétien. On a vu combien ses recherches sur la science de la morale avaient été loin de procurer à sa conscience le repos qui manquait à son bonheur pour être complet. Cette imperfection des systèmes moraux le tourmentait dans sa vieillesse. Sa longue expérience et son amour des hommes lui faisaient souhaiter, avec toute l'ardeur d'une âme qui connaît le prix des vrais biens, de découvrir la vérité tout entière, et de pouvoir la communiquer aux âmes que le même désir aiguillonnait. La morale chrétienne lui semblait parfaite, mas il ne pouvait se résoudre à aduiettre les dogmes, les mystères, les miracles. Toutes ces obscurités d'une religion révélée troublaient son intelligence et déconcertaient sa raison. En vain se représentait-il les innombrables bienfaits que le christianisme a semés sur le monde, l'impulsion prodigieuse qu'il imprimée à la marche de la civilisation; en vain se sentait-il attendri par cette unité spirituelle que la religion établit entre les hommes les plus opposés de principes et d'opinions politiques, qu'elle oblige à s'entr'aimer et à se secourir mutuellement: sa raison récalcitrante n'aurait voulu se soumettre qu'à la condition d'être juge, même des dogines et des mystères les plus relevés, et d'être admise à rejeter ce qui se refuserait à sa compréhension. Sur ces entrefaites, une grande épreuve vint désoler son âme : l'être accompli qui lui avait donné quarautesept années d'un bonheur sans mélange lui fut enlevé, et la douleur qu'il ressentit con tribua à hater le triomphe de la vérité dans son cœur. N'éprouvail-il pas plus que personne le besoin de penser qu'un jour on re

(2) De la Philosophie morale, lome Il des OEuvres, pag. 119.

verra les êtres qu'on regrette, et que les chastes liens formés sur la terre se resserreront dans le ciel ? Il se ressouvint que dans le temps de ses études morales, des doutes sur la puissance des théories philosophiques venaient parfois le troubler. La morale des philosophes, faite pour quelques esprits à part, jamais ne réussit à améliorer de grandes masses d'hommes, et, lorsqu'il pensait que l'émancipation de la classe nombreuse exige que l'enseignement moral s'adresse à tous les degrés d'intelligence et pénètre dans toutes les âmes, il voyait avec effroi le levier qu'employaient les anciens philosophes, et qu'il avait cru si fort, se courber sous le poids qu'il nous est nécessaire de soulever. Ainsi, soit qu'il réfléchit sur ses propres angoisses, soil qu'il portat ses regards sur la société, partout la religion lui semblait nécessaire, et tout lui faisait souhaiter qu'elle fût vraie. Tout à coup une idée s'offre à lui et le pénètre d'espérance. Il lui avait été facile de voir l'utilité de la religion, ses bienfaits sont sous nos yeux; mais, pour qu'il se rendit compte de sa vérité, il était indispensable qu'un homme éclairé par ses études et revêtu d'une mission, vint suppléer aux lumières du philosophe. I alla trouver un prêtre. C'est dans le livre de M. Droz qu'il faut lire les touchants détails de sa conversion, dans ces Aveux, qui semblent écrits par un laique héritier de la plume de Fénelon. Le disciple est d'abord ému de la mansuétude, de l'humilité qu'il trouve dans le ministre de paix: «Il sentit, nous dit-il, qu'il n'était qu'un profane et qu'il était en face d'un chrétien. Le digue prêtre lui explique l'intime corrélation des dogmes et des mystères avec la morale; il lui montre le rôle important et légitime que conserve la raison dans l'examen des faits sur lesquels reposent les croyances religieuses, notamment celui-ci s'il est vrai que Dieu a parlé, auquel cas il ne reste qu'à se soumettre; il lui expose les faits historiques relatifs à la mission du Christ et des apôtres, lesquels sont démontrables comme tous les faits d'histoire, et se résument dans l'éclatant évé nement de la résurrection de Jésus-Christ; il lui prouve la possibilité, la réalité des miracles qui confirment la doctrine; il lui fait reconnaître que le dogme, les mystères et les miracles ne sont pas moins vrais que la morale, si l'on ne veut faire du Christ un imposteur; enfin la divinité du Rédempteur apparaît dans son évidence, et le philosophe prononce, avec une joie inexprimable, la profession de foi des martyrs: Je suis chrétien. François PERENNÈS.

RECHERCHE DE LA VÉRITÉ.

Saint Justin, né à Sichem, eu Palestine, avait reçu une éducation distinguée, et était versé dans toutes les langues cultivées alors. Quoique élevé, dans les ténèbres du paganisme, il montra toujours un amour ardeut

LEÇONS ET EXEmp. de litt. chrétienne.

pour la vérité, qu'il cherchait sans cesse et dans toutes les écoles. Après avoir essayé d'une multitude de sectes philosophiques, sans pouvoir rien trouver de propre à le fixer, il se livra à la lecture des prophètes; il nous apprend lui-même les particularités de sa conversion, en ces termes:

« D'abord, je me mis entre les mains d'un Stoïcien. Mais, voyant, après un certain l'Etre créateur, parce que ce maître n'en sacours de leçons, que je n'apprenais rien de vait rien lui-même, et qu'il estimait peu ce genre d'étude, je le quittai pour m'attacher à un péripatéticien. Celui-ci m'eut à peine sordide, il me parla de présents et de résouffert quelques jours, qu'avec une avidité tribution. Cette vénalité d'âme me parut indigne d'un sage de profession, et me le fit qui avait beaucoup de célébrité, et plus enlaisser avec mépris. Je vis un pythagoricien vais la musique et les autres parties des macore de suffisance. Il me demanda si je sathématiques, qu'il regardait comme un prélude nécessaire pour dégager notre esprit faciliter la perception des choses intellecdes objets grossiers et terrestres, et pour lui tuelles; j'ignorais ces arts, et ne pouvais les apprendre qu'avec beaucoup de temps; ce qui m'engagea à tenter si je ne réussirais pas mieux avec les platoniciens. L'un des principaux d'entre eux s'était fixé dans mon voisinage. Je prenais un plaisir infini à ses gagnais. Dans cette prévention, je cherchais leçons, et je crus m'apercevoir que j'y la solitude pour méditer plus tranquille

ment.

« Un jour que j'étais dans un lieu écarté, sur le rivage de la mer, je me vis suivre par un vieillard de fort bonne mine. La douceur et la gravité, mêlées l'une avec l'autre dans. son air et toutes ses démarches, me frapperent extraordinairement. Je m'arrêtai pour le considérer avec plus d'attention, mais sans lui rien dire; il m'en témoigna sa surprise. Bientôt la conversation devint intéressante. I la fit tomber sur ce que j'avais tant à cœur d'apprendre. Mais, après avoir donné quelques éloges à mon émulation, il me reprocha d'aimer plus les spéculations que les œuvres, et me fit entendre que la science à laquelle j'aspirais était toute pratique. Je lui demandai respectueusement ce qu'il me convenait de faire. « Longtemps avant que vos philosophes existassent, répondit-il, il y a eu dans le monde des hommes justes, amis de Dieu, el inspirés par son esprit. On les appelle prophètes, parce qu'ils ont prédil des choses futures qui sont effectivement arrivées. Leurs livres, que nous avons encore, contiennent des instructions lumineuses sur la première cause et la dernière fin de tous les êtres. On y trouve beaucoup d'autres articles dont la connaissance doit intéresser un philosophe. Ils n'employaient, pour établir la vérité, ni les disputes, ni les raisonnements subtils, ni ces démonstrations abstraites qui sont au-dessus de la portée du commun des hommes. On les croyait 1. 39

sur leurs paroles, parce qu on ne pouvait se refuser à l'autorité qu'ils recevaient de leurs miracles et de leurs prédictions. Ils inculquaient la créance d'un seul Dieu, le père et le créateur de toutes choses, et de JésusChrist, son Fils, qu'il a envoyé au monde. Quant à vous, ajouta-t-il, demandez avec instance à l'Etre suprême de vous ouvrir les portes de la lumière et les routes de la vérité. Les choses dont je viens de vous entretenir sont de nature à ne pouvoir être comprises, à moins que Dieu et Jésus-Christ n'en donnent l'intelligence. »

Après avoir ainsi parlé, le vieillard se retira et Justin ne le vit plus.

Saint JUSTIN. Dialogue avec le juif Tryphon (1).

LA RECONNAISSANCE.

Si nous sommes obligés envers tous les hommes à des sentiments affectueux et à de bienveillantes manières, combien n'en devons-nous pas avoir pour ces êtres généreux qui nous ont donné des preuves d'amour, de compassion, d'indulgence!

A commencer par nos parents, que personne, après nous avoir généreusement prêté secours d'actions ou de conseils, n'ait à nous reprocher notre peu de mémoire de ses bienfaits.

Envers les autres personnes, nous pouvons quelquefois être sévères dans nos jugements et peu prodigues d'amabilité, sans commettre une faute grave; mais envers celui qui nous fut utile, il ne nous est plus permis de négliger la plus petite attention pour ne pas l'offenser, pour ne lui causer aucune sorte de déplaisir, pour ne porter aucune alteinte à sa réputation, et pour nous montrer, au contraire, prompts à le défendre et à le

consoler.

Beaucoup de gens, lorsque celui qui leur fait du bien prend, ou semble prendre une trop haute idée de ce qu'il a fait pour eux, s'en irritent comme d'une impardonnable indiscrétion, et prétendent que cela les délie de l'obligation de la reconnaissance. Beaucoup de gens, parce qu'ils ont la bassesse de rougir d'un bienfait reçu, sont ingénieux à supposer qu'il a eu lieu par intérêt, par ostentation, ou par quelque autre indigne motif, et pensent excuser ainsi leur ingratitude. Beaucoup d'autres, aussitôt qu'ils sont en position, s'apprêtent à rendre le bienfait pour se débarrasser du poids de la reconnaissance, et ils croient ensuite pouvoir sans crime se soustraire à tous les égards qu'elle impose.

Toutes les subtilités pour justifier l'ingratitude sont vaines: l'ingrat est un être vil; et, pour ne pas tomber dans une semblable bassesse, il faut que la reconnaissance ne

soit pas mesquine; il faut absolument qu'elle surabonde.

Si le bienfaiteur s'enorgueillit des avantages que tu lai dois; s'il n'a pas envers toi la délicatesse que tu lui voudrais; s'il ne l'est pas clairement prouvé que des motifs géné reux l'aient porté à l'être utile, il ne l'appar-' tient pas de le condamner. Jette un voile sur ses torts vrais ou possibles, et ne considère que le bien que tu as reçu de lui. Considère ce bien, lors même que tu l'aurais rendu, et rendu au centuple.

Il est permis quelquefois d'être reconnaissant sans publier le bienfait reçu; mais chaque fois que ta conscience te dit qu'il y a une raison de le publier, qu'aucune basse honte ne t'arrête; confesse-toi l'obligé de la main amie qui t'a secouru. « Il y a souvert de l'ingratitude à remercier sans témoin,» dit l'excellent moraliste Blanchard.

Celui-là seul est bon qui se montre re connaissant de tous les bienfaits, même des plus petits; la reconnaissance est l'âme de la religion, de l'amour filial, de l'amour pour ceux qui nous aiment, de l'amour pour la société humaine, à qui nous sommes redevables de tant de protection et de dou

ceurs.

En cultivant la reconnaissance pour tout le bien que nous recevons de Dieu ou des hommes, nous acquérons plus de force et de calme pour supporter les maux de la vie, el une plus grande disposition à l'indulgence et au dévouement pour aider nos semblables. SILVIO PELLICO.

LA REDEMPTION.

De même que la Trinité renferme les tion contient les merveilles de l'homme el secrets de l'ordre métaphysique, la Rédempl'histoire de ses fins et de son cœur. Avec quel étonnement, si l'on s'arrêtait un peu dans de si hautes méditations, ne verrait-on pas s'avancer ces deux mystères, qui cachent dans leurs ombres les premières intentions de Dieu et le système de l'univers! La Trinité confond notre petitesse, accable nos sens de sa gloire, et nous nous retirons anéantis devant elle. Mais la touchante Rédemption, en remplissant nos yeux de lar mes, les empêche d'être trop éblouis, et nous permet du moins de les fixer un moment sur la croix.

On voit d'abord sortir de ce mystère la doctrine du péché originel, qui expliqne l'homme. Sans l'admission de cette vérité, connue par tradition de tous les peuples, une nuit impénétrable nous couvre. Comment, sans la tache primitive, rendre compte du penchant vicieux de notre nature, combatiu par une voix qui nous annonce que nous fumes formés pour la vertu ? Comment l'aptitude de l'homme à la douleur, comment

(1) Le jeune philosophe retira de cet entretien une grande estime pour les prophètes, et peu de temps après il se fit chrétien,

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