Immagini della pagina
PDF
ePub

paroles, plus modestes et plus simples encore que celles que je vous rapporte. J'étais presque honteuse de mon message, en comparant en moi-même la charité des gens du monde à celle que prescrit la religion. Combien je trouvais cette dernière plus grande et plus universelle !

...

Madame L. Sw. BELLOC.

Quels soins vraiment touchants ne prodiguent-elles pas aux malades! qui ne se souvient de leur abnégation, de leur dévouement héroïque, aux jours où le choléra sévissait, en 1832, aux jours où elles portaient leurs soins délicats aux blessés des guerres de Crimée et d'Italie? Les infidèles euxmêmes versaient des larmes d'attendrissement à la vue de cette douceur, de cet empressement intelligent autour des malades, et de la noble simplicité avec laquelle ces femmes admirables bravent la mort. Quelle patience angélique! quelle résignation sublime! Une délicatesse et une grâce parfaites rendent bien plus précieux encore les services de ces anges consolateurs. Les soins les plus pénibles ne les rebutent jamais. Quelle sympathie généreuse pour les misères humaines ! avec quelle sainte joie elles courent au-devant des privations, des souffrances et des dangers! elles semblent remercier ceux qu'elles peuvent soulager; elles trouvent des mots consolants pour toutes les douleurs. Et quand même une noire ingratitude serait la seule récompense de tant de soins maternels, elles n'en seraient pas surprises l'amour de Jésus et la prière les consolent de tous les mécomptes et de toutes les fatigues. Ces existences pures et dévouées sont toutes consacrées au Seigneur la piété leur rend tout facile. Que de vertus dans le cœur d'une bonne religieuse ! Des maisons de Sœurs prospèrent en Orient, et même les infidèles ne sauraient se soustraire à une influence si douce et si bienfaisante. Casimir WOLOWSKI.

[blocks in formation]

foutefois, pour vivre, il leur fallait travailler; et leur isolement les y aurait contraints, si la vertu ne leur en avait fait une loi. Pensez-vous que le jeûne, les macérations, les veilles prolongées auxquels ils se vouaient, le dénûment de toutes les commodités de la vie, pussent s'accorder avec la paresse, ce vice honteux, le dernier des sept péchés capitaux?

Quant aux religieux proprement dits, leur vie se trouvait soumise à des règlements précis autant que sages. Ils n'agissaient point capricieusement ou d'après l'inspiration de leur zèle, mais se laissaient diriger par des hommes qui devaient leur autorité à l'élection; et cette élection à la grande renommée de leurs vertus.

Le travail était la condition première de l'admission dans la communauté. Prenons pour exemple l'ordre le plus nombreux de l'Egypte, et dont les constitutions servirent de modèle à la plupart des monastères : la congrégation de Tabenne.

Habile ou non, chaque religieux devait, pour sa tâche, fournir une natto par jour. Et quand, par quelque circonstance fortuite, le débit de ces produits n'avait pu s'opérer, ils défaisaient leur travail pour le recommencer, afin que l'oisiveté leur restât inconnue. De plus, o admirable pénétration de l'homme intérieur! d'après l'article 83 de la Discipline, le manque de travail é ait la punition expressément réservée au paresseux !

Devançant les essais et les théories de nos nouveaux économistes, la règle de Tabenne classait les religieux selon leurs aptitudes, les associait pour les travaux selon les facultés acquises. Comme dans le Phalanstère, imaginé de nos jours, elle divisait les hommes par groupes, portant chacun le nom d'une lettre de l'alphabet, afin que leur appellation ne fût une occasion d'orgueil ou d'humiliation pour aucun d'eux. Il y avait là des vanniers, des tanneurs, des Torgerous, des foulons, des jardiniers, des cordonniers, des menuisiers, des copistes. Le prêtre Apelle, ancien serrurier, travaillait à la forge, la dignité du sacerdoce n'autorisant pas le désœuvrement. Deux bateaux étaient, affectés au transport des objets confectionnés sur les marchés voisins, d'où l'on rapportait des matières à mettre en œuvre.

Les Solitaires étaient done des hommes qui travaillaient, priaient, mangeaient et s'édifiaient en commun, ne tirant de leur labeur que la satisfaction de soulager des infirmes, des voyageurs, des pauvres. C'est pourquoi ils laissaient à la masse le dividende auquel personnellement chacun d'eux avait droit. Et comme l'exemple des faiblesses mondaines aurait été dangereux dans cette communauté, toute de déronement, on n'y était admis qu'après une double initiation.

Dans le première, on soumettait l'orgueil, l'on éprouvait la charité. Sénateur, charprétendant devenait serviteur de tous,

[graphic]

le portier. Sous sa direction, pendant un an, il soignait les voyageurs, les pauvres, es étrangers. Au bout de ce temps, il passait sous les ordres d'un décurion, car les groupes étaient subdivisés en décuries.

Ici l'on s'assurait que la patience, la soumission, l'amour de fa paix et du travail du récipiendaire, lui permettraient cette vie de famille. C'est donc bien à tort qu'on a cru qu'il suffisait, pour devenir moine, d'être poltron, malpropre et fainéant.

Un homme de génie et d'érudition, qui fut avocat, rhéteur, naturaliste, théologien, oraleur, fondateur d'ordre, frère de deux évêques, évêque lui-même, et, par-dessus tout cela, un illustre saint, Basile le Grand, après avoir parcouru l'Egypte, la Syrie, la Palestine, la Mésopotamie, visitant les Ascètes les plus renommés, donna il y a déjà près de quatorze siècles, à ces prétendus paresreux, le nom qui leur appartient véritablement; il les appela « PHILOSOPHES. »

En effet, les philosophes, les hommes vrais amants de la sagesse, ne sont-ce pas ceux-là qui, pour la chercher, ayant abandonné les distractions et les soius des affaires

matérielles, se trouvent riches, parce qu'ils savent se contenter de peu? Celle désignation est d'autant plus exacte, que, d'après les récentes définitions, la philosophie n'est autre chose que l'application de la réflexion aux phénomènes de l'objectif et du subjectif, c'est-à-dire le plus grand usage de la faculté de penser. Les Solitaires, passant, par profession, plusieurs heures de la journée à Pintuition mentale, preuant le Créateur, le Verbe, les plus hautes questions de la vie pour sujet de leur étude spirituelle, pouvaient donc légitimement porter le nom de Philosophes.

Mais cette philosophie n'était point purement spéculative, oiseuse et stérile, comme celle de notre Université. Elle portait des fruits de grâce et de bénédiction. Elle faisait, au besoin, des théologiens, des orateurs, des martyrs. Et cette philosophie se développait dans la retraite, la vertu, la frugalité, le travail. Dans les règles de vie que saint Basile écrivit pour ses « PHILOSOPHES,» il n'oubliait point les métiers et l'apprentissage des jeunes gens qui se destineraient à la vie philosophique. Il prévoyait les cas de transport sur des marchés lointains, pour le débit plus avantageux des produits du monastère; et traçait la conduite à tenir dans ces occasions.

N'insistons pas, car l'imputation de nonchalance et d'inutilité portée contre les Solilaires est assez réfutée par les faits. Prier et travailler, c'est-à-dire, honorer Dien et servir les hommes, est-ce là une condition honteuse? De ces solitudes tant décriées par le vieux libéralisme, il sortit la production. et l'édification; de bonnes maximes, et,' ce qui vaut mieux, de bous exemples. Quant au reproche d'avoir abandonné la chose publique, de s'être borné au salut de son âine, sans songer à celle d'autrui, en s'enfermant

dans un égoïsme superstitieux, il est assez démenti par l'histoire..

Au vice profond de l'administration, que pouvaient des efforts isolés? les empereurs prenaient-ils conseil des particuliers? désiraient-ils être éclairés sur les besoins des peuples, et parer à de désastreuses éventualités? et d'ailleurs quels souverains étaitil permis de servir?

Etait-ce Constance, assassin de sa famille, bas hypocrite, patron de l'hérésie, fauteur de discordes cléricales, qui institua le gouvernement des eunuques, des espions de cour, des maîtres d'hôtel, des barbiers et autres seigneurs domestiques? Elait-ce l'apostat Julien, calomniateur du Christ, détracteur de l'Evangile, esprit vaniteux et rétrograde, adorateur du passé, adulateur des sophistes, courtisan des rhéteurs, toujours entouré d'augures, de victimaires, de grammairiens, de charlatans; travaillant de cœur à rétablir le crédit de maître Jupiter, l'honneur de la dame Junon, vantant les lympe, la grande matrone Cybèle, dont il charmes surannés de là douairière de l'Ose faisait le chevalier, envers et contre les habitants de Pessinonte, insoucieux de cette beauté émérite? Fallait-il l'aider dans ses

plans, tandis qu'il condamnait à l'ilotisme intellectuel les populations chrétiennes ? Devait-on soutenir Valens, félon et couard, qui faisait assassiner des rois alliés, violait le droit des gens, mettait en crédit des empoisonneurs et des astrologues; vouait au grands fonctionnaires, s'ils avaient le malimassacre les érudits, les philosophes et les heur de porter un nom commençant par les lettres THEOD. Fantasque scéléral, qui pourvoyait de chair humaine ses ourses, et se faisait inquisiteur de la foi hérétique?

Force est d'en convenir: les catholiques ne pouvaient rien pour l'empire, rien que prier le Ciel d'en avoir pitié.

Les Solitaires remplirent la seconde phase de l'évolution chrétienne. Ils créèrent les modèles de ces associations que, de nos jours, on cherche à recomposer, moins le célibat et l'élément religieux, pourtant unique ciment qui puisse assurer leur du- ' rée. Le monde avait vu le martyre et le triomphe; on lui apprit la prière et la pénitence.

Les Cénobites du Nil et de la Palestine furent les restaurateurs de la vie contemplative. Les pénitents indous et les Santons du Gange, dont le mérite consiste uniquement à garder des ongles crochus, des cheveux sales, une immobilité hébétante, ou à consumer leurs jours à des génuflexions, des pirouettes, des prostrations dégradantes avaient ridiculisé, en l'exagérant, la sainteté de la retraite et de la méditation; nos anachorètes réhabilitent la vie solitaire. Ils montrent aux hommes curieux de jouissances, poursuivant les plaisirs, saus jamais atteindre au bonheur, comment la philosophie chrétienne conduit à la félicité terrestre par la sérénité de l'âme, eu réglant leur cœur d'après l'Evangile. A la société cor

rompue de cette époque, aux villes insatiables d'émotions, de spectacles, de festins, et qui prolongeaient aux flambeaux les divertissements du jour, à ces praticiens pour lesquels toute volupté était émoussée, à ces esprits blasés, flottants, mécontents d'autrui et d'eux-mêmes, insoucieux de la gloire et du sort de la patrie, à ces chrétiens de naissance, qui cherchaient, dans les augures et la divination par les entrailles, quelques secrets du lendemain, quelque issue aux fiévreuses agitations de leur malaise, les Solilaires offraient un remède en action, une guérison en exemple Ils prouvaient que l'on peut être heureux sans palais, sans luxe, sans esclaves, sans chars, sans villas et sans concubines.

Les Solitaires ne se bornaient point à prier pour les hommes oublieux du Créateur, ils conservaient intacte la tradition, la doctrine catholique. Ils formèrent, du fond des déserts, une garde vigilante contre l'hérésie. Parmi eux, Forthodoxie trouva son dernier refuge en Orient. Et ce fut dans une de leurs grottes, à Bethléem, que saint Jérôme nous conserva le plus admirable chaut de nos livres saints, le poëme de Job.

ROSELLY DE LORGUES.
SOLITUDE

ET SOUVENIRs d'enfance.

Les dimanches et les jours de fête, j'ai souvent entendu dans le grand bois, à travers les arbres, les sons de la cloche lointaine qui appelait au temple l'homme des champs. Appuyé contre le tronc d'un ormeau, j'écoutais en silence le pieux murmure. Chaque frémissement de l'airain por

tait à mon âme naïve l'innocence des mœurs champêtres, le calme de la solitude, le charme de la religion, et la délectable mélancolie des souvenirs de ma première enfance, Oh! quel cœur si mal fait u'a tressailli au bruit des cloches de son lieu natal, de ces cloches qui frémirent de joie sur son berceau, qui annoncèrent son avénement à la vie, qui marquèrent le premier battement de son cœur, qui publièreut

dans tous les lieux d'alentour la sainte allégresse de son père, les douleurs et les joies plus ineffables encore de sa mère ! Tout se trouve dans les rêveries enchantées où nous plonge le bruit de la cloche natale: religion, famille, patrie, et le berceau et la tombe, et le passé et l'avenir.

CHATEAUBRIAND.

LES SOPHISTES.

Que contiennent les écrits des philosophes les plus connus? Quelles sont les leçons

(1) Tout le monde veut enseigner à bien faire et personne ne veut l'apprendre; nous sommes tous devenus docteurs, et nous avons cessé d'être chré tiens. J.-J. ROUSSEAU. (2) L'Eglise catholique met un frein très-salutaire aux écarts de la raison humaine, qui ne trouve ni fond ui rive, quand elle vent sonder l'abime des choses. › J.-J. ROUSSEAU.

de ces amis de la sagesse? A les entendre, ne les prendrait-on pas pour une troupe de charlatans, criant, chacun de son côté, sur une place publique : Venez à moi, c'est moi seul qui ne trompe point (1)?....

Défiez-vous de ces cosmopolites, qui vont chercher au loin, dans leurs livres, des devoirs qu'ils dédaignent de remplir, autour d'eux. Tel philosophe aime les Tartares, pour être dispensé d'aimer ses voisins. O grands philosophes! que ne réservezvous, pour vos amis et pour vos enfants, ces leçons profitables; vous en recevriez bientôt le prix !....

Fuyez ceux qui sèment dans les cœurs des hommes de désolantes doctrines... Sous le hautain prétexte qu'eux seuls sont éclairés, vrais, de bonne foi, ils nous soumettent impérieusement à leurs décisions tranchantes, et prétendent nous donner, pour tes vrais principes des choses, les inintelligibles systèmes qu'ils ont batis dans leur imagination. Du reste, renversant, détruisant, foulant aux pieds tout ce que les hommes respectent, ils ôtent aux affligés la dernière consolation de leur misère, aux puissants et aux riches le seul frein de leurs passions: ils arrachent du fond du cœur le remords du crime, l'espoir de la vertu; et se vantent encore d'être les bienfaiteurs du genre humain. Jamais, disentils, la vérité n'est nuisible aux hommes; je le crois comme eux; et c'est, à mon avis, une grande preuve que ce qu'ils enseignent n'est pas la vérité.....

Je consultai les philosophes, je feuilletai leurs livres; j'examinai leurs diverses opinions: je les trouvai tous, fiers, affirmatifs, dogmatiques même, dans leur scepticisme prétendu, n'ignorant rien, né prouvant rien, se moquant les uns des autres; et ce point commun à tous, me parut le seul sur lequel ils ont tous raison.

Triomphants quand ils attaquent, ils sont sans vigueur en se défendant. Si vous pesez les raisons, ils n'en ont que pour détruire: si vous comptez les voix, chacun est réduit à la sienne; ils ne s'accordent que pour disputer. Les écouter n'était pas le moyen de

sortir de mon incertitude. Je conçus que l'insuffisance de l'esprit humain (2) est la sité de sentiments, et que l'orgueil est la première cause de cette prodigieuse diverseconde.....

Ah! ne me parlez plus de philosophie! je méprise ce trompeur étalage, qui ne con siste qu'en vains discours; ce fantôme, qui n'est qu'une ombre, qui nous excite à menacer de loin les passions, et nous laisse comme un faux brave à leur approche (3).

Défions-nous d'une philosophie en pa

(3) Par ses principes, la philosophie ne peut faire aucun bien, que la Religion ne le fasse encore mieux, et la Religion en a fait beaucoup, que la philosophie ne saurait faire.

Je ne sais pourquoi l'on veut attribuer au progrès de la philosophie, la belle morale de nos livres. Cette morale, tirée de l'Evangile, était chrétienne avant d'être philosophique.... Les préceptes de

[blocks in formation]

SOTTISE ET BÉTISE.

La sottise est un ridicule choquant qui n'excite que le mépris. On s'en amuse avec malignité, et l'on se plaît à le voir humilié, parce qu'il offeuse. La bêtise, au contraire, est un défaut innocent et naïf dont on s'amuse sans le hair. On passerait sa vie avec celui dont la bêtise est le caractère : la vanité s'en accommode, ou, pour mieux dire, elle s'y complaît. Mais la sottise est pour l'amour-propre un ennemi d'autant plus importun qu'il n'est pas digne de sa colère; aussi dans la société n'y a-t-il rien de plus fatigant! La sottise est la gaucherie de l'esprit qui se pique d'adresse; l'ineptie de l'esprit qui se pique d'habileté ; la maussaderie de l'esprit qui prétend se donner des grâces; la fausse finesse de l'esprit qui veut être malin; la lourdeur de celui qui veut être léger; surtout la suffisance de celui qui fait le capable. C'est une assurance hardie qui va de bévue en bévue avec une pleine sécurité; une vanité dédaigneuse qui se croit supérieure en toutes choses, et dont les prétentions, toujours manquées et toujours intrépides, sont le contraste perpétuel d'un orgueil excessif, et d'une excessive médiocrité. La bêtise est une intelligence émoussée, une longue enfance de l'esprit, un dénûment presque absolu d'idées, une extrême inhabileté à les combiner et à les mettre en œuvre; et, soit habituelle, soit accidentelle, comme elle nous donne sur elle un avantage qui flatte notre vanité, elle nous amuse, sans nous causer ce plaisir Emalin que nous goûtons à voir châtier la sottise. Ainsi la sottise est comique et n'est point plaisante; la bêtise, au contraire, est plaisante et n'est point comique.

MARMONTEL.

SOUFFRANCES (DES)

Nous ne sommes pas Chrétiens pour être riches et pour vivre dans les plaisirs. Il ne fallait pas pour cela faire de Christianisme; il n'y avait qu'à laisser le monde, comme il était, sous l'empire de l'opinion et de la passion. La vie chrétienne est une vie crucifiée à moins que d'aimer la croix, il faut renoncer à la foi.

Que dit l'Evangile ?« Bienheureux sont ceux qui pleurent Malheur à vous, riches, qui avez votre consolation dans ce monde !» Voilà le langage du Saint-Esprit. Mais il semble que ce soit présentement un langage barbare qui ne s'entende plus qu'au Canada

Platon sout souvent très-sublimes; mais combien n'erre-t-il pas quelquefois, et jusqu'où ne vont pas ses erreurs? Quant à Cicéron, peut-on croire que, sans Platon, ce rhéteur eût trouvé ses Offices? L'Evangile seul est, quant à la morale, toujours sûr, Loujours vrai, toujours unique, et toujours semiblable à lui-même........ ›

et au Japon, où les fidèles courent au martyre. Il faut effacer l'article des souffrances de l'Evangile de l'Europe. Croyons-nous que la félicité consiste dans les larmes, et que les riches soient malheureux? Cependant c'est un article de foi dont la croyance n'est pas moins nécessaire au salut que celle de la Trinité et de l'Incarnation.

Il a fallu que le Fils de Dieu mourût en croix pour prendre possession de sa gloire. Tous les saints ne sont entrés dans le ciel que par la voie des souffrances. Prétendons-nous que ce qui a tant coûté au Fils de Dieu et aux saints ne nous coûte rien? La croix est le partage et la marque des élus. Une âme qui ne souffre rien, et qui ne veut rien souffrir, a le caractère d'un réprouvé. Il faut nécessairement souffrir en ce monde ou en l'autre. Le Père BоUHOURS.

SOUMISSION RAISONNABLE.

Dieu ne peut ni se tromper, ni me tromper. Il serait donc insensé de ne pas croire ce qu'il a dit.

Tous ne sont pas obligés de raisonner sur la religion, mais tous sont obligés de l'étudier avec bumilité. Il n'est pas possible à tous de faire des recherches; mais Dieu vient au secours des faibles. L'ignorant croit, et sa foi le sauve, parce que la grâce lui tient lieu de lumière; tandis que, d'autres fois, le savant ne croit pas, parce qu'il se refuse à la grâce: il s'aveugle ou par trop de confiance, ou par l'ambitiou de se singulariser, ou par le désir de briser le frein des passions; mais Dieu confond l'orgueil de son âme, ou le déréglement de son cœur.....

Nous ne saurions être trop en garde contre cette raison, qui ne cherche souvent à nous prouver que ce qu'il nous plaît de croire. Ne permettons pas aux passions de nous séduire; ne murmurons pas contre la morale qui les condamne; aimons la vérité qui nous gêne, adorons-la et soumettons-nous. CONDILLAC (1), OEuvres.

SOUMISSION ET USAGE DE LA RAISON.

1. La dernière démarche de la raison, c'est de connaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent. Elle est bien faible, si elle ne va jusque-là.

2. Il faut savoir douter -où il faut, assurer où il faut, se soumettre où il faut. Qui ne fait ainsi n'entend pas la force de la raison. Il y en a qui pèchent contre ces trois principes, ou en assurant tout comme démonstratif, manque de se connaître en démonstration; ou en doutant de tout, manque de savoir où il faut se soumettre;

Le chrétien n'a besoin que de logique pour être vertueux. J.-J. ROUSSEAU. (1) Littérateur et métaphysicien. ‹ Quelques-uns de ses systèmes présentent des interprétations favorables aux idées philosophiques; ce qui rend cet auteur dangereux.› Voy. La Harpe, De Maistre.

ou en se soumettant en tout, manque de savoir où il faut juger.

3. Si on soumet tout à la raison, notre religion n'aura rien de mystérieux et de surnaturel. Si on choque les principes de la raison, notre religion sera absurde et ridicule.

4. La raison, dit saint Augustin, ne se soumettrait jamais si elle ne jugeait qu'il y a des occasions où elle doit se soumettre. I est donc juste qu'elle se soumette quand elle juge qu'elle doit se soumettre, et qu'elle ne se soumette pas quand elle juge qu'elle ne le doit pas faire mais il faut prendre garde à ne se pas tromper.

5. La piété est différente de la superstition. Pousser la piété jusqu'à la superstition, c'est la détruire. Les hérétiques nous reprochent cette soumission superstitieuse. C'est faire ce qu'ils nous reprochent, que d'exiger cette soumission dans les choses qui ne sont pas matière de soumission.

Il n'y a rien de si conforme à la raison que le désaveu de la raison dans les choses qui sont de foi. Et rien de si contraire à la raison que le désaveu de la raison dans les choses qui ne sont pas de foi. Ce sont deux excès également dangereux, d'exclure la raison, de n'admettre que la raison.

6. La foi dit bien ce que les sens ne disent pas, mais jamais le contraire. Elle est au-dessus et non pas contre. PASCAL.

SPECTACLE GÉNÉRAL DE L'UNIVERS.

Il est un Dieu; les herbes de la vallée et les cèdres de la montagne le bénissent, l'insecte bourdonne ses louanges, l'éléphant le salue au lever du jour, l'oiseau le chante dans le feuillage, la foudre fait éclater sa puissance, et l'Océan déclare son immensité. L'homme seul a dit: Il n'y a point de Dieu.

Il n'a donc jamais, celui-là, dans ses infortunes, levé les yeux vers le ciel, ou, dans son bonheur, abaissé ses regards vers la terre? La nature est-elle si loin de lui qu'il ne l'ait pu contempler, ou la croit-il le simple résultat du hasard? Mais quel hasard a pu contraindre une matière désordonnée et rebelle à s'arranger dans un ordre si parfait?

On pourrait dire que l'homme est la pensée manifestée de Dieu, et que l'univers est son imagination rendue sensible. Ceux qui ont admis la beauté de la nature comme preuve d'une intelligence supérieure auraient dû faire remarquer une chose qui agrandit prodigieusement la sphère des merveilles c'est que le mouvement et le repos, les ténèbres et la lumière, les saisons, la marche des astres, qui varient les décorations du monde, ne sont pourtant successifs qu'en apparence, et sont permanents en réalité. La scène qui s'efface pour nous se colore pour un autre peuple; ce n'est pas le spectacle, c'est le spectateur qui change. Ainsi Dieu a su réunir daus son ouvrage la durée absolue et la durée progressive: la première est placée dans le temps, la se

conde dans l'étendue : par celle-là, les grâces de l'univers sont unes, infinies, toujours les mêmes; par celle-ci, elles sont multiples, finies et renouvelées : sans l'une, il n'y eût point eu de grandeur dans la création; sans l'autre, il y eût eu monotonie.

Ici le temps se montre à nous sous un rapport nouveau: la moindre de ses frac tions devient un tout complet, qui comprend tout, et dans lequel toutes choses se modifient, depuis la mort d'un insecte jusqu'à la naissance d'un monde : chaque minute est en soi une petite éternité. Réunissez donc en un même moment, par la pensée, les plus beaux accidents de la nature, suppo sez que vous voyez à la fois toutes les heures du jour et toutes les saisons, un matin de printemps et un matin d'automne, une nuit semée d'étoiles et une nuit couverte de nuages, des prairies émaillées de fleurs, des forêts dépouillées par les frimas, des champs dorés par les moissons, vous aurez alors une idée juste du spectacle de l'univers. Tandis que vous admirez ce soleil qui se plonge sous les voûtes de l'occident, un autre observateur le regarde sortir des régions de l'aurore. Par quelle inconcevable magie ce vieil astre, qui s'endort fatigué et brûlant dans la pourpre du soir, est-il, en ce moment même, ce jeune astre qui s'éveille, humide de rosée, dans les voiles blanchissantes de l'aube? A chaque moment de la journée, le soleil se lève, brille à son zénith et se couche sur le monde; ou plutôt nos sens nous abusent, et il n'y a ni orient, ui midi, ni occident vrai. Tout se réduit a un point fixe d'où le flambeau du jour fai éclater à la fois trois lumières en une seule substance. Cette triple splendeur est peulêtre ce que la nature a de plus beau; car, en nous donnant l'idée de la perpétuelle magnificence et de la toute-puissance de Dieu, elle nous montre aussi une image éclatante de sa glorieuse Trinité.

Conçoit-on bien ce que serait une scène de la nature, si elle était abandonnée au seul mouvement de la inalière? Les nuages, obéissant aux lois de la pesanteur, tomberaient perpendiculairement sur la terre, ou monteraient en pyramides dans les airs; Finstant d'après, l'atmosphère serait trop épaisse ou trop raréfiée pour les organes de la respiration, La lune, trop près ou trop loin de nous, tour à tour serait invisible, tour à tour se montrerait sanglante, couverte de taches énormes, ou remplissant seule de son orbe démesuré le dôme céleste. Saisie comme d'une étrange folie, elle marcherait d'éclipses en éclipses, ou, se rou lant d'un flanc sur l'autre, elle découvrirait enfin cette autre face que la terre ne connaît pas Les étoiles sembleraient frappées du mene vertige; ce ne serait plus qu'une suite de conjonctions effrayantes: ioul à coup un signe d'été serait atteint par un sigue d'hiver; le Bouvier conduirait les Pléiades, elle Lion rugirait dans le Verseau; là des astres passeraient avec la rapidité de l'éclair; ici ils pendraient immobiles; quel

« IndietroContinua »