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ne pas remarquer que, dans les additions et corrections qu'il a placées à la fin de son second volume, M. Langlès s'est cru obligé d'annoncer, avec autant d'empressement que s'il eût été favorable à son opinion, un ouvrage nouveau de M. J. Davy, dans lequel cette opinion est au contraire combattue par quelques-unes des raisons que nous venons d'y opposer. Cette bonne foi mérite des éloges, et devroit être imitée par tous ceux qui recherchent sincèrement la vérité. La partie de la question relative à la conformité qu'on croit observer entre le style des monumens de l'Hindoustan, de l'Egypte et de la Nubie, sera sans doute reprise et discutée dans le second article que j'ai annoncé. Il me suffit d'avoir dégagé de cette discussion les faits qui peuvent avoir rapport à un système de philosophie très-ancien et très-remarquable, et qui a exercé de l'influence sur une grande partie de l'ancien continent. Je ferai encore observer, au sujet du bouddhisme, que les auteurs anglais n'offrent, pour l'histoire de cette secte célèbre, que des renseignemens tout-à-fait insuffisans, et que ceux même qui l'ont le plus étudiée, n'en parlent que sur le témoignage des Brahmanes, fort suspects en pareille matière. II ne faut donc pas s'étonner si l'exposition des dogmes bouddhiques que M. Langlès leur a empruntés, n'est ni aussi complète, ni aussi satisfaisante que celle du système brahmanique. Ce qu'on lira avec plus de fruit, c'est un résumé rapide des fables et des attributions mythologiques qui s'appliquent aux principales divinités du polythéisme hindou. Mais un point très-important, qu'on regrettera peut-être de ne pas voir encore complétement éclairci par les recherches de M. Langlès, c'est l'époque relative des deux sectes principales de l'Inde, celle des Brahmanes et celle des Bouddhistes. L'auteur croit que la prépondérance et l'extension de cette dernière doctrine dans la presqu'île, ne sont pas antérieures à l'ère chrétienne (1). Cependant, tout le porte à conjecturer que les Djaïns et les Bouddhistes sont antérieurs aux Brahmanes dans la presqu'ile (2): « Nouvelle preuve, ajoute-t-il, en faveur de mon opinion, » que cette partie de l'Inde doit sa civilisation à l'Abyssinie, d'où » Bouddha étoit évidemment originaire, et non pas au haut Hindoustan. » M. Buchanan, qui croit, comme moi, les Djaïns antérieurs dans ces » contrées aux Brahmanes, qui les persécutèrent et les supplantèrent, » comme ceux là avoient aussi persécuté et supplanté les Bouddhistes, >> cite, en faveur de leur antiquité, trois inscriptions conservées, la première dans un temple djaïn, elle date de 22 de J. C.; les deux » autres dans des couvens djaïns, de 80 et de 119, de J. C.... »

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Ailleurs il rappelle que « Gautama (c'est un des noms de Bouddha), » trois ou quatre cents ans avant l'ère chrétienne, fut aussi à sa manière » l'apôtre et le réformateur de l'Inde, et sur-tout du Tibet, dont les » cérémonies et les costumes religieux semblent offrir quelque con»formité avec les nôtres (·). » Et dans un quatrième endroit (2): « Quoique nous n'ayons pas de documens bien authentiques sur la » fondation du bouddhisme, son antériorité à l'égard du christianisme » n'est pas même douteuse. » Je ne chercherai pas, dans le reste du livre, ni dans les autres ouvrages du même auteur, la mention des faits qu'on pourroit opposer à ces assertions, et qui montreroient, d'après des autorités bien connues, le bouddhisme établi dans l'Inde au x." siècle avant notre ère, apporté de l'Inde à la Chine, l'an 65 de J. C., du Bengale au Tibet vers la même époque (3), &c. Les passages seuls seuls que je viens de transcrire fidèlement, font voir que ce point d'histoire réclame encore de nouveaux éclaircissemens.

La Notice historique de la presqu'ile de l'Inde, est le dernier morceau du premier volume dont il me reste à présenter l'extrait. L'auteur partage, avec plusieurs membres les plus habiles de la société asiatique de Calcutta, l'idée que les Hindous n'ont point eu de livres historiques, et par conséquent qu'ils n'ont pas les bases d'une chronologie positive. Il est du moins certain, comme le dit M. Langlès, que les recherches les plus actives des savans anglais, n'ont encore procuré la découverte d'aucun document historique d'une authenticité satisfaisante. Mais je ne sais si les travaux mêmes de quelques-uns de ces savans, les dates qu'ils rapportent, les inscriptions historiques dont ils font mention, les synchronismes qu'ils citent, quoiqu'en petit nombre (4), les chroniques qui ont été traduites dans plusieurs idiomes vulgaires (5), n'autorisent pas à espérer qu'en continuant ces mêmes recherches on sera plus heureux à l'avenir. Quoi qu'il en soit, M. Langlès n'ayant que l'intention de donner un aperçu excessivement rapide de l'histoire de la presqu'île, l'exiguité de ses matériaux pour une époque reculée s'accorde parfaitement bien, comme il le dit lui-même, avec le laconisme qui lui est prescrit. Une demi-page comprend tout ce que les écrivains grecs et latins ont conservé de faits de ce genre, sans discussion. Deux pages conduisent à

(1) Tom. II, p. 61. — (2) Tom. 1, (2) Tom. 1, p. 204. (3) Conférez dans ce Journal (janvier 1821, p. 6) les diverses opinions sur l'époque de l'origine du bouddhisme, avec quelques faits entièrement nouveaux, qui peuvent servir à la déterminer chronologiquement. (4) Voyez sur-tout la préface du Dictionnaire sanskrit de M. Wilson. — (5) J'en ai indiqué quelques-unes dans ce Journal, janvier 1821, p. 7.

l'établissement de l'islamisme dans la presqu'île ; et ce n'est qu'à partir de cet événement que l'auteur entre dans quelques détails sur l'histoire des dynasties musulmanes de la presqu'île. Il s'étend davantage sur les révolutions de ces derniers temps, et sur les guerres qui ont mis l'Hindoustan au pouvoir des Anglais. M. Langlès a sans doute jugé que ces faits, qui sont mieux connus, intéresseroient davantage les lecteurs européens. Enfin, après avoir amené son récit jusqu'à la destruction consommée de la puissance du Peïschouah, le 8 avril 1819, il cite cette phrase du marquis d'Hastings: « Les radjepouts sont délivrés de la » tyrannie la plus révoltante et la plus opiniâtre qui ait jamais pesé sur » l'espèce humaine. » Et il ajoute ces réflexions propres à consoler ceux qui voient avec quelque peine l'antique patrie des Brahmanes sous le joug d'une puissance européenne : « Les radjepouts préfèrent certaine» ment le gouvernement paternel et pacifique de la compagnie, à la » débile et rapace administration des radjahs, leurs compatriotes, » et au despotisme atroce des insatiables nabâbs musulmans. Nous » croyons sans peine à l'alégresse des Hindous, à leur reconnoissance » envers leurs libérateurs, et à leur empressement pour reprendre des » occupations pacifiques trop long-temps interrompues. En cultivant » leurs terres, ils ne craignent plus d'en voir les moissons dévastées par » d'impitoyables brigands. Ils ourdissent avec sécurité, et avec la patience » qui les caractérise, ces tissus délicats, moelleux et diaphanes, aussi » recherchés maintenant par les Européens, qu'ils l'ont toujours été par >> les Asiatiques de l'un et l'autre sexe. Enfin depuis le cap Comorin jus» qu'aux montagnes Himâlâ et au Setledje, c'est-à-dire, dans une » étendue d'environ six cents lieues, le gouvernement britannique, » le nom d'Hastings et ceux de ses compagnons d'armes, sont honorés » et chéris par plus de quatre-vingts millions d'habitans. »>

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Je ne parlerai point de l'exécution typographique de l'ouvrage de M. Langlès: elle est telle qu'on peut l'attendre de M. P. Didot l'aîné; c'est assez dire qu'elle ne laisse rien à desirer. Je passerai pareillement sous silence les belles planches qui font l'ornement des deux volumes, et qui, pour la plupart, n'ont aucun rapport aux morceaux géographiques et historiques que je me suis simplement proposé d'analyser. Je sortirois des bornes que je me suis prescrites, en parlant de celles qui représentent des pagodes, des hypogées, ou d'autres monumens d'architecture. Quant à celles qui offrent des costumes, des instrumens, des objets d'art, des figures de dieux ou de héros, qui ont été copiées sur des dessins pris dans les pays, sur des miniatures indiennes, si elles peuvent devenir l'objet de quelques remarques utiles, ces remarques n'échappe

ront pas à l'habile rédacteur qui s'est chargé de suppléer à l'insuffisance de ce premier extrait.

J. P. ABEL-RÉMUSAT.

LA SCANDINAVIE vengée de l'accusation d'avoir produit les peuples barbares qui détruisirent l'empire de Rome, par M. Graberg de Hemso, membre de l'Académie royale des sciences de Stockholm, correspondant de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, &c. Lyon, J. B. Kindelem, 1822, in-8.o, 250 pages.

L'OPINION que M. Graberg de Hemso entreprend de réfuter comme injurieuse à sa patrie, a été soutenue au contraire par plusieurs savans du nord pour la plus grande gloire de cette contrée. Suivant eux, c'est lui faire outrage que de lui contester le titre de pépinière des nations, fabrica generis humani, vagina gentium. A notre avis, les questions historiques de cette espèce ne touchent aucunement à l'honneur des peuples actuels; et, de quelque pays qu'on soit, on n'a qu'un seul intérêt réel dans ces recherches, celui de la vérité. Il s'agit de savoir si, comme l'affirme Jornandès, les Scythes ou Goths étoient originaires de la Scandinavie ou Scanzie, c'est-à-dire, des contrées les plus septentrionales de l'Eu

rope.

Pour traiter cette question dans toute son étendue, peut-être seroit-il à propos de distinguer trois époques ou périodes différentes; d'abord les temps antérieurs à l'ère vulgaire, puis les cinq premiers siècles de cette ère, enfin le moyen âge; car on a supposé, dans chacune de ces périodes, des irruptions de peuples du nord sur les contrées méridionales. ..

Il y a peu de difficultés à l'égard du moyen âge; il est indubitable que du VI. au x. siècle, des Scandinaves ont ravagé les côtes et plusieurs pays de l'Europe, qu'ils se sont établis en diverses provinces d'Angleterre, de Russie, de France et d'Italie. M. Graberg soutient seulement qu'il n'en faut pas conclure que la Scandinavie fût alors très-peuplée. Il prétend qu'il n'y avoit parmi ces forbans, qu'un assez petit nombre de Danois, de Norwégiens et de Suédois; que la plupart étoient Saxons, Belges, Anglais, Français même, et que d'ailleurs l'effroi qu'ils inspiroient, entraînoit à prendre une idée fort

exagérée de leur multitude. Des écrivains modernes ont déjà fait cette dernière observation, et les historiens du moyen âge attestent qu'il se mêloit aux troupes normandes beaucoup de brigands qu'elles recrutoient dans les pays mêmes qu'elles envahissoient successivement. Toutefois, lorsqu'en 891 quatre-vingt-dix mille Normands( Northmanni, disent les chroniques) entrent dans la Meuse et dévastent la Belgique, n'a-t-on pas lieu de penser qu'ils sont en effet, pour la plupart, des hommes du nord! Au surplus, cette discussion n'est qu'incidente dans le livre de M. Graberg. C'est sur-tout à la période antérieure qu'il s'attache il veut prouver, 1.° que les peuples barbares qui ont détruit l'empire romain n'étoient point scandinaves; 2.° que tout au contraire la Scandinavie elle-même fut inondée, envahie, à la fin du IV.° siècle, par des Asiates, par un peuple originaire d'Asie. Ces deux propositions divisent immédiatement son ouvrage.

Pour prouver la première, il envisage d'abord le local de la Scandinavie, tel qu'il pouvoit exister avant la dissolution de l'empire romain. Depuis long-temps on parloit des Scythes, quand les Scandinaves étoient encore ignorés, Pythéas a décrit le premier l'île Basilie, qui sans doute n'est pas distincte de celle que Jornandès a depuis nommée Scanzia. Des monts escarpés, des roches arides, des forêts impénétrables, des neiges et des glaces sous un ciel nébuleux, voilà tout ce que Pythéas a vu dans la Basilie. Mais l'autorité de ce voyageur, sur laquelle M. Graberg se fonde, a été souvent contestée. Outre que ses relations ne nous sont connues que par des citations et des extraits, on sait que Polybe et Strabon les jugeoient inexactes et pleines de fictions. Bayle et d'autres modernes souscrivent à ce jugement sévère; et parmi ceux mêmes qui rendent hommage à l'habileté de Pythéas, et qui lui attribuent les premiers progrès de la géographie mathématique, quelques-uns révoquent particulièrement en doute sa descente dans les contrées septentrionales, dont il paroît n'avoir connu que les noms celtiques; ils le soupçonnent de s'être borné, sans aller sur les lieux, à recueillir les notions que pouvoient lui en donner les habitans des Gaules. Quoi qu'il en soit, M. Graberg commence par supposer que la Scandinavie étoit, dans ces temps antiques, presque inhabitée, et par conséquent incapable de vomir sur le midi de l'Europe des armées nombreuses, même six ou sept siècles après Pythéas. Il est persuadé que la Scandinavie entière n'étoit point alors plus avancée que ne l'est aujourd'hui la Laponie, où l'on trouve à peine un homme par lieue carrée.

D'où venoient donc ces Goths ou ces barbares, quel que soit leur nom, qui, dans les premiers siècles de l'ère vulgaire, se sont avancés au nord Gg

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