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existoient sans interruption, gens æterna in quâ nemo nascitur, et qui conséquemment jouissoient toujours de leurs possessions sans les mettre dans le commerce. Cette circonstance autorisoit le prince à exiger un dédommagement, qui étoit appelé droit d'amortissement. Il a varié selon les temps et selon les lieux. Les corporations donnoient la valeur des fruits, tantôt de quatre ans, tantôt de six ou de huit; ce droit étoit réclamé lors de l'acquisition, et ensuite à des époques déterminées où il étoit censé que l'immeuble auroit passé dans d'autres mains, s'il étoit resté dans le commerce.

De même que les gens de main-morte étoient soumis au droit d'amortissement, les roturiers qui acquéroient un fief, étoient soumis au droit de FRANC FIEF.

Il paroît que dans le XIII. siècle, et à l'occasion des croisades, plusieurs nobles ayant vendu leurs fiefs à des roturiers, le roi exigea une redevance pour prix de laquelle le fief restoit en franchise, tant que l'acquéreur y résidoit. Cette redevance étoit réclamée de temps à autre, moins pour grossir les revenus de l'état, que pour consacrer le principe qu'une possession territoriale ne pouvoit conférer la noblesse.

Les rois accordoient souvent à des villes, à des communautés d'habitans, l'exemption de ce droit.

On donnoit aussi le nom de fiefs à des rentes féodales, à des dîmes inféodées, &c. Le droit étoit même exigé quelquefois à raison des personnes, quand il s'agissoit de leur affranchissement.

Assez généralement les mutations de fiefs produisoient au roi le cinquième du prix de la vente, dans les pays coutumiers, et le sixième dans les pays de droit écrit. Pour un fief acquis par legs ou par droit de succession en ligne collatérale, on ne payoit que le revenu d'une année.

Il faut se souvenir que, dans les principes de la féodalité, le fief ou héritage eût été réversible à défaut d'héritier direct; le droit de fief n'étoit donc qu'une sorte de transaction avec le nouveau propriétaire.

Le droit de RÉGALE, qui procure au roi la jouissance des bénéfices pendant la première année de leur vacance, est aussi ancien que la monarchie. Les papes et les conciles l'avoient toujours respecté. Quand Boniface VIII voulut y porter atteinte, une assemblée des trois ordres, convoquée par Philippe le Bel, l'encouragea à maintenir les droits de la couronne, et il rendit l'ordonnance du 23 mars 1302. Benoît XIII, succédant à Boniface VIII, les reconnut expressément. Les ordonnances de plusieurs rois, et sur-tout celles de Philippe de Valois, ont consacré de nouveau les principes admis en France à l'égard de la régale.

Le droit d'AUBAINE, ce droit d'hériter de l'aubain ou ALIBI NATUS,

étoit fondé sur la loi romaine, et il fut exercé par nos rois. Quelques-uns firent des ordonnances favorables aux étrangers, sur-tout aux commerçans. J'indiquerai de préférence une ordonnance de Louis le Hutin, par laquelle ce prince renonce à tous droits d'aubaine à l'égard des professeurs et des écoliers de l'université de Paris.

Les étrangers et les bâtards qui s'établissoient en France, payoient un droit de CHEVAGE; les étrangers qui s'y marioient, un droit de FORMARIAGE; et si la femme étoit française et libre, on exigeoit quelquefois le tiers ou la moitié de ses biens.

Le droit d'hériter des BÂTARDS fut disputé au roi par les seigneurs, dont les prétentions furent souvent réprimées par des ordonnances.

Celui de succéder aux personnes mortes ab intestat et sans héritiers légitimes, fut nommé DESHÉRENCE. D'abord il n'avoit été exercé que par les rois; les seigneurs l'exigèrent ensuite, et enfin les rois le reprirent,

Les rois jouissoient aussi du droit d'ÉPAVE, c'est-à-dire, ils s'approprioient les choses égarées ou abandonnées dont l'ancien maître étoit inconnu. Une ordonnance du 15 avril 1360 place l'épave parmi les droits domaniaux.

Quoique, d'après la loi romaine, les TRÉSORS TROUVÉS n'appartinssent pas au prince, nos rois rendirent des ordonnances qui leur en attribuèrent une part.

Ils percevoient le dixième sur le produit des MINES, un vingtième sur celui des CARRIÈRES de marbre et de pierre; le droit doubloit selon les circonstances. Le droit de MARQUE consistoit en un dixième sur la valeur des métaux.

Au prix de la vente des bois provenant des forêts domaniales, au montant des amendes et des confiscations prononcées à cause des délits qu'on y commettoit, il faut joindre les revenus du droit de PACAGE, pour la permission d'y faire paître les animanx, le droit de RAMAGE, pour la faculté d'y couper des rameaux et des branches.

Un droit exorbitant étoit perçu sur le prix de la vente des bois appartenant à des particuliers; il s'appeloit GRUERIE, et en Normandie

TIERS ET DANGER.

J'ai eu occasion d'annoncer que plusieurs détails relatifs aux MONNOIES sont épars en divers discours placés en tête de différens volumes; l'auteur a su y ajouter des recherches très-intéressantes, et former du tout un corps de doctrine qui ne laisse plus rien à desirer sur cette

matière.

Les AMENDES et CONFISCATIONS, qui étoient souvent prononcées,

soit qu'elles eussent été déterminées par la loi, soit qu'elles eussent été laissées à l'arbitrage des juges, accroissoient le revenu du domaine. Quelquefois des seigneurs, des communes, et même des particuliers, avoient leur part des amendes.

Les principes sur la confiscation n'étoient pas les mêmes pour toutes. les différentes parties de la France; en plusieurs pays, elle n'étoit pas effe admise. Je citerai, entre autres, les lettres de Jean II, portant que les habitans du pays de Gascogne ne seroient jamais soumis à la confiscation. Il n'excepte que l'attentat direct commis contre la personne du roi. La coutume de Berry n'admit aussi que cette seule exception: la coutume de Bretagne rejetoit aussi la confiscation, &c. Cette sage législation offre un singulier contraste avec la jurisprudence féodale qui prononçoit la confiscation des meubles pour un démenti donné au seigneur, ou le vol d'un lapin dans une garenne, et qui, entre autres, adjugeoit au seigneur les biens de l'homme mort subitement, c'est-àdire, sans confession.

Les confiscations des biens des juifs étoient l'effet de principes qui sont, pour ainsi dire, hors de la législation. Les rois n'appliquoient pas des lois existantes; ils prononçoient arbitrairement, et sans jugement préalable, la peine qui frappoit une classe entière. Il en étoit de même de ces marchands italiens ou lombards, tour-à-tour tolérés et dépouillés comme les juifs. Il arrivoit même que, moyennant une redevance qui, de la part du roi, devenoit une sorte de complicité, ils obtenoient la permission d'exercer leur trafic usuraire.

Ce premier discours est terminé par l'indication de quelques autres droits perçus dans l'administration de la justice et relatifs à cette acninistration, tels que les droits de GREFFE, les droits sur les GEOLES, les droits du SCEAU, ceux du TABELLIONAT, les droits sur les ACTES et les PROCÉDURES JUDICIAIRES.

Il m'a paru que l'ordre de la classification eût permis de parler dans ce premier discours de quelques droits dont il n'est question que dans le discours suivant, qui traite des impositions. Je conçois les motifs qui ont pu déterminer l'auteur; mais je préfère d'indiquer ici les droits de gîte, de prise, la corvée, le champart, les droits de lods et ventes, parce qu'ils étoient plutôt du domaine royal, que le résultat des lois sur les impôts.

Pour acquitter le droit de GÎTE, il falloit recevoir, loger et même nourrir durant trois jours, et une seule fois par an, le roi, ses officiers et sa suite, quand il voyageoit, ou même les personnes qui le représentoient; ce droit étoit souvent abonné.

Le droit de PRISE consistoit à prendre, pour le roi, pour ses officiers, pour les seigneurs et pour les troupes, de quoi les nourrir eux et leurs chevaux pendant une journée. Quoique la loi ordonnât un dédommagement, les particuliers étoient rarement dédommagés.

Les hommes, les femmes et les animaux pouvoient être soumis à la CORVÉE. Le travail des hommes et des femmes étoit requis pendant la moisson ou les vendanges. Le travail des animaux l'étoit pour le labour des terres et le transport des fruits et des denrées. Ce droit varioit selon les lieux et les pays; souvent on le rachetoit en argent.

Le cens et terrage ou CHAMPART étoit une redevance foncière consistant en une partie des fruits due annuellement par le domaine foncier qui y étoit assujetti; il n'étoit pas requérable, mais portable: le taux étoit différent selon les lieux.

Le droit perçu sur la transmission des immeubles ou les mutations de propriété, s'appeloit droit DE LODS ET VENTES: ordinairement c'étoit le douzième du prix. Quand un fief étoit vendu, le droit étoit plus fort et s'appeloit QUINT. Si le changement de propriétaire s'opéroit autrement que par la vente, il en coûtoit seulement le revenu d'une année : on l'appeloit RACHAT.

Dans un autre article, je rendrai compte des deux autres discours, qui sont, comme celui-ci, le résultat de longues recherches, d'un examen trèsapprofondi et d'une sagacité heureusement exercée. Dans les notes qui sont au bas du texte des ordonnances, on trouve souvent des explications savantes de mots latins du moyen âge et de mots de l'ancien idiome français, des étymologies heureusement expliquées. J'en citerai quelques exemples, et je saisirai cette occasion pour démontrer combien l'étude du style des ordonnances est utile et nécessaire aux savans qui veulent connoître les origines, les variations et les progrès de la langue française.

RAYNOUARD.

ESSAI SUR LES INSTITUTIONS DE SAINT-LOUIS, par Arthur Beugnot fils, avocat à la cour royale de Paris; ouvrage couronné en 1821 par l'Académie des inscriptions et belles-lettres. A Paris, chez Levrault, in-8.°, 464 pages.

L'ACADÉMIE avoit proposé une question conçue en ces termes : << Examiner quel étoit, à l'époque de l'avénement de S. Louis au trône,

» l'état du gouvernement et de la législation, et montrer quels étoient, » à la fin de son règne, les effets des institutions de ce prince. » Ces deux mots de gouvernement et de législation ont servi de division à l'ouvrage de M. Beugnot. Dans un premier livre, il recherche quels changemens se sont opérés, durant le règne de S Louis, dans l'organisation et dans l'exercice des divers pouvoirs politiques, et comment ces changemens ont influé sur les progrès de l'agriculture, de l'industrie, du commerce tant intérieur qu'extérieur. Le second livre présente l'analyse des lois du même prince, en matière civile, criminelle, féodale et religieuse. Quoiqu'il y ait des points de contact entre les détails de ces deux livres, puisque les lois contribuent à régulariser l'exercice des pouvoirs, à modifier l'état des personnes et des choses, le plan qui vient d'être exposé est néanmoins aussi méthodique qu'on le pouvoit desirer; car il amène et distribue, de la manière la plus heureuse, tous les faits et toutes les discussions que la matière embrasse: il ne laisse nulle part rien d'obscur, et n'entraîne aucune répétition inutile.

Après avoir rapidement tracé l'histoire du système féodal depuis l'institution des bénéfices réels et des bénéfices d'honneur, d'abord séparés, puis confondus, d'abord amovibles, puis perpétuels et même héréditaires, jusqu'aux premiers coups portés à ce régime par les rois capétiens, prédécesseurs de S. Louis, M. Beugnot s'arrête un instant aux troubles qui éclatèrent durant la minorité de ce prince, et il prend la peine de réfuter les historiens qui ont dit que son droit au trône étoit contesté par les grands, même que le seigneur de Coucy avoit été élu roi de France après la mort de Louis VIII (1). Joinville (2) dit seulement que le roi fut heureux d'avoir « en sa joenesce l'aide de Dieu; car » sa mère venue de Espaigne n'avoit ne parens ne amis en tout le » royaume, et pour ce que les barons virent le roi enfant et la royne sa » mère feme estrange, firent-ils du comte de Bouloigne oncle le roy, >> leur chievetain, et le tenaient aussi comme seigneur. » Les manoeuvres des grands n'avoient pour but que d'ôter la régence à la reine Blanche: le droit du jeune Louis IX n'étoit pas mis en question, quoiqu'il n'eût pas été sacré du vivant de son père, non plus que celui-ci du vivant de Philippe Auguste. Mais M. Beugnot va plus loin; il soutient que si Hugues Capet et ses successeurs jusqu'à Louis VII inclusivement, prirent la précaution de conférer d'avance le titre de roi à leurs héritiers présomptifs, ce n'étoit point, quoi qu'on en ait dit, pour affermir dans feur maison la succession à la couronne. Ceci donneroit lieu à une dis

(1) Lalouette, Hist. de Coucy, I. VIII. — (2) Pag. 16.

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