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placés dans des conditions différentes. Les eaux abondantes en poissons, en mollusques, sont éminemment fertilisantes: les eaux chargées de sulfate de fer ne sont pas nuisibles, quand elles se répandent sur un sol calcaire capable de décomposer le sel ferrugineux, qui est un vrai poison pour les plantes. Les eaux calcaires produisent de bons effets dans les sols siliceux.

Sir H. Davy se déclare en général contre le système des jachères; cependant il reconnoît des circonstances où il peut être avantageux. Par exemple, des sols sablonneux qui se couvrent continuellement d'herbes, et qui ne gagneroient rien par l'écobuage, sont susceptibles de s'améliorer par le repos : mais il ne faut point oublier que les parties terreuses du sol n'absorbent rien à l'atmosphère, ainsi que plusieurs auteurs l'ont dit pour soutenir le système des jachères. Les jachères d'été ont des inconvéniens que les jachères d'hiver n'ont point: dans celles-ci, l'expansion de la glace, les alternatives de sécheresse et d'humidité, divisent le sol, et l'humus est moins disposé qu'en été à se dissiper en produits volatiles.

L'auteur, en traitant des assolemens, cite pour exemple la méthode de MM. Coke et Gregg: il examine ensuite plusieurs des causes qui peuvent épuiser un sol, et, à ce sujet, il rapporte un phénomène remarquable que voici. Dans un petit espace de terrain, on voit se développer des champignons d'une espèce qu'il ne nomme pas; à ceux-ci succèdent d'autres individus qui végètent au dehors de l'espace qui étoit occupé par les premiers, de inanière que d'année en année les champignons s'étendent de plus en plus ; et comme ils le font circulairement, on a donné au phénomène le nom de cercle magique. M. Wollaston pense que les champignons épuisent l'engrais qui se trouve dans l'espace où ils se développent, de sorte que ceux qui leur succèdent ne peuvent se nourrir qu'au dehors de cet espace: mais les débris des premiers fertilisent le sol sur lequel ils ont cru, et le rendent propre à la végétation des graminées. Sir H. Davy pose en fait que les sols s'épuisent toutes les fois qu'on y récolte plus de végétaux qu'on n'y met d'engrais. Il explique ainsi comment il est arrivé que la Sicile et plusieurs contrées de l'Afrique septentrionale et de l'Asie mineure, qui donnoient autrefois de riches récoltes de blés, sont devenues stériles.

L'auteur termine son ouvrage par des considérations sur la manière de nourrir les bestiaux, et sur les herbes qui sont les plus propres à former des prairies permanentes. C'est d'après les quantités de substance nutritive contenues dans les plantes à une époque déterminée de leur vie, qu'on peut établir leur valeur respective; et sir H. Davy estime

que ces quantités sont représentées par la proportion de matière que chacune d'elles cède à l'eau. Cependant ce ne sont pas toujours les herbes qui donnent le plus de substances alimentaires au moment de la récolte des foins, qui doivent être choisies à l'exclusion de toute autre; car, si l'on veut avoir des fourrages verts pendant les différentes saisons, on est obligé de cultiver, concurremment avec les premières, les herbes qui sont plus nutritives qu'elles au printemps, ou qui donnent plus de regain en automne : ainsi, au commencement du printemps, l'alopécure des prés et le poa printanier surpassent en qualité toutes les autres herbes, tandis qu'au mois de juillet ils sont inférieurs à la grande fétuque et au fléau des prés. Il est encore nécessaire, avant de se décider sur le choix des espèces de fourrage, d'avoir égard à la nature du terrain. La substance nutritive des plantes se compose, selon l'auteur, d'amidon, de sucre, d'albumine (végétale) ou de glutineux, d'extrait coloré, d'amer, de sels, et quelquefois de tannin. De ces principes immédiats, l'amer, le tannin, l'extrait et les sels, sont les moins nutritifs; mais l'amer et le tannin ont la propriété de faciliter la digestion. Peut-être auroit-il été convenable que, dans la méthode générale que sir H. Davy a prescrite pour estimer la proportion de la substance alimentaire des végétaux, il eût conseillé de traiter chaque végétal par l'eau froide d'abord, ensuite par l'eau bouillante. En effet, si le végétal soumis à l'analyse contient à-la-fois de l'amidon et de l'albumine en quantité notable, on ne pourra dissoudre ces principes que par les traitemens successifs que nous indiquons, parce que l'albumine se coagulant par la chaleur, elle est insoluble dans l'eau chaude; et en second lieu, l'amidon étant insoluble dans l'eau froide, il ne seroit pas dissous si on se contentoit d'appliquer ce liquide à la plante sans en élever la température.

A la fin de la Chimie agricole on trouve des tables qui ont été dressées par M. George Sinclair, jardinier du duc de Bedfort. Ces tables font connoître quatre-vingt-dix-sept espèces d'herbes propres à la nourriture des bestiaux et des bêtes de somme, sous les rapports qui "intéressent le plus l'agriculteur. Ainsi on y trouve, 1.° le poids de récolte verte que chaque espèce de plante est susceptible de donner dans une étendue de terrain déterminée; 2.° le poids de la récolte après son desséchement; 3.° le poids de la matière nutritive contenue dans la même récolte. Cette détermination a été faite pour un grand nombre de plantes à deux époques de leur végétation, savoir, au moment de la floraison et au moment où les graines commencent à mûrir.

Quoiqu'on puisse critiquer plusieurs points de la Chimie agricole, et

l'ordre d'après lequel les faits sont exposés, parce qu'il a nécessité quelques répétitions, cependant l'auteur a le grand mérite d'avoir le premier appliqué la chimie à l'ensemble de l'agriculture, et d'avoir démontré les avantages que la société peut retirer de cette application. La manière dont sir H. Davy envisage la composition des terrains, et les causes qui sont susceptibles d'en modifier l'influence dans la culture, Ja méthode qu'il prescrit pour améliorer les terres peu fertiles, les principes qu'il pose pour tirer le meilleur parti possible des engrais, les réflexions qu'il fait relativement à l'action de ces substances sur les végétaux, soit qu'on la considère en général, soit qu'on la considère pour chacune d'elles en particulier, enfin les explications qu'il donne de plusieurs procédés ruraux, sont autant d'objets qui méritent de fixer l'attention des lecteurs, et qui caractérisent les Elémens de chimie agricole comme ouvrage d'un homme supérieur. A mesure que l'étude des sciences physiques se répandra parmi les agriculteurs, on appréciera davantage tous les services que l'auteur a rendus.

E. CHEVREUL,

VOYAGE À L'OASIS DE THÈBES et dans les déserts situés à l'orient et à l'occident de la Thébaïde, fait pendant les années 1815, 1816, 1817 et 1818, par M. Frédéric Cailliaud (de Nantes); rédigé et publié par M. Jomard, &c. &c.; 2 vol, grand in-fol., première livraison.

EN rendant compte, dans ce Journal, des Voyages de M. Belzoni (1), et parlant d'une inscription grecque découverte sur le piédestal d'un obélisque de Philé, par M. Banks, et depuis copiée par M. Belzoni et par M. Cailliaud, M. Letronne observoit (2), au sujet de ce dernier, que, selon toute apparence, en ceci comme en bien d'autres choses, ce jeune et intéressant voyageur seroit prévenu ou viendroit trop tard. C'est effectivement ce qui lui est arrivé, non-seulement en ce qui règarde l'inscription de Philé, laquelle a été publiée et fort bien expliquée par M. Letronne lui-même (3), mais encore à l'égard de plusieurs de ses

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(1) Décembre 1820, pag. 714 et suiv. (2) A l'endroit cité, pag. 718.(3) Voyez le Journal des Savans, novembre 1821. Les observations de M. Letronne ont été publiées séparément sous ce titre : Eclaircissemens sur une inscription grecque contenant une pétition des prêtres d'Isis dans l'ile de Philé, à Piolémée Evergète 11.

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plus curieuses découvertes. C'est pour nous une raison de plus de hâter le compte que nous devons rendre d'un Voyage qui a perdu, par une publication tardive, une partie du mérite ou, du moins, de l'à-propos de la nouveauté. Cette réflexion nous autorise peut-être aussi à remarquer qu'à force d'apporter de soins et d'embellissemens à cette publication, l'éditeur a, bien innocemment sans doute, contribué à en retarder l'époque, et conséquemment à en diminuer l'intérêt. Il nous semble que, s'il se fût borné à publier le journal même de M. Cailliaud, avec le petit nombre de notes et d'éclaircissemens nécessaires à ce journal, le public, admis plutôt à la connoissance des travaux du voyageur, ne lui en eût que mieux payé le prix de ses services; M. Belzoni, qui n'a fait que marcher, à l'est du Nil, sur les traces de M. Cailliaud, ne l'eût pas prévenu, auprès des lecteurs européens, par des critiques souvent injustes, toujours trop rigoureuses, et l'éditeur se fût épargné la peine qu'il a prise pour faire figurer, à côté de la grande description de l'Egypte, par la beauté des gravures, par le format et l'exécution du texte, un voyage qui, dans la réalité, ne semble pas comporter un pareil luxe typographique, mais qui, réduit à des dimensions modestes comme ses résultats, peut encore paroître à-la-fois intéressant et neuf.

Il est juste cependant d'observer que, si les découvertes de M. Cailliaud ont perdu, par les soins mêmes que l'éditeur s'est donnés pour les faire valoir, une partie de leur importance primitive, ces retards n'ont pas été non plus tout-à-fait inutiles et à la renommée de l'auteur et à l'exactitude de sa relation. L'attention vivement excitée par les premiers récits que fit M. Cailliaud de son voyage à l'est du Nil, vérifia bientôt ce qu'il y avoit de réel et de neuf dans les faits rapportés par će voyageur, ou d'inexact et d'erroné dans l'application qu'il en faisoit lui-même, ou peut-être que d'autres en faisoient pour lui. Ainsi la découverte d'une ville antique située au milieu des mines d'émeraude, non loin des bords de la mer Rouge, dans laquelle M. Cailliaud crut d'abord avoir retrouvé la Bérénice des anciens, se réduisit, après la visite de M. Belzoni aux mines d'émeraude, à la découverte d'une centaine, plus ou moins, d'habitations, pro bablement anciennes ou du moins très-dégradées, qui avoient servi aux ouvriers employés à l'exploitation de ces mines. Le nom de Bérénice, qui se trouvoit sur le journal primitif de M. Cailliaud, par une erreur facile à expliquer et certainement très-excusable, a donc disparu de la relation publiée par M. Jomard; et ce n'est là ni la moins importante ni la seule rectification que les retards dont j'ai parlé et le savoir de l'éditeur aient apportée à la rédaction de ce voyage.

J'abrége ces observations préliminaires, pour donner, le plus suc

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cinctement possible, une idée des voyages de M. Cailliaud. « Avant » de pénétrer dans les déserts de l'ouest, M. Cailliaud, favorisé par » un hasard heureux, avoit découvert, au mont Zabarah, les fameuses » mines d'émeraude, qui n'étoient connues que par les passages des au»teurs et par les récits des Arabes. Presque entièrement oublies » depuis un grand laps d'années, elles restoient stériles pour les gou» verneurs du pays. Le voyageur les retrouve presque dans l'état où les » ont laissées les ingénieurs des rois Ptolémées. Il pénètre dans une » multitude d'excavations et de canaux souterrains, pratiqués jusqu'à >> une assez grande profondeur.... Il continue l'exploitation et rap» porte à Mohammed Ali Pacha jusqu'à dix livres d'émeraude; puis il » trouve auprès de là les ruines d'une petite ville, habitée jadis pro» bablement par les mineurs, des temples gréco-égyptiens, avec des » inscriptions fort curieuses. » A Dieu ne plaise que je veuille porter la moindre atteinte à l'estime d'un voyageur que tant de zèle recommande à l'estime publique! Mais il me semble que, dans l'enthousiasme, fort légitime à beaucoup d'égards, de M. Jomard pour les découvertes de M. Cailliaud, il entre tant soit peu d'exagération. Il me semble que ce hasard heureux qui a favorisé M. Cailliaud dans la découverte des mines d'émeraude, s'explique assez naturellement par la commision donnée à ce jeune voyageur de marcher à la recherche des mines situées dans le désert, à l'est du Nil, et sur-tout par la fidélité des guides qui le conduisent en sept jours droit à la montagne de Zabarah, où se trouvent celles d'émeraude. Il n'est peut-être pas non plus très-exact de dire que ces mines n'étoient connues que par les passages des auteurs et les récits des Arabes, et qu'elles étoient presque entièrement oubliées depuis un grand laps d'années. Dans un mémoire sur les mines d'émeraude, qui fait partie de. la collection de ses Mémoires géographiques et historiques sur l'Egypte (1), M. Étienne Quatremère a rassemblé tous les témoignages des écrivains arabes du moyen âge, tels que l'auteur du Meselek-el-Absar, Masoudy et Makrisy, qui prouvent que ces mines ont été, à diverses reprises, exploitées par les Arabes, et même par les Turcs, jusqu'au temps de Prosper Alpin. M. Cailliaud avoue lui-même, page 74 de sa Relation, qu'une tradition rapporte qu'Aly. Bey a exploité ces carrières il y a environ quatre-vingts ans. Il est difficile à croire que des traditions si récentes në se soient pas conservées parmi les tribus du désert; et la mémoire de ses guides a probablement autant de part dans la découverte de M. Cailliaud, que le hasard heureux dont parle M. Jomard. Les mêmes té

(1) Deux volumes imprimés à Paris, en 1811, tom. II, p. 180.

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