Immagini della pagina
PDF
ePub

489

ont été composées sur le même sujet par Euripide, Garnier, Racine, Pradon et M. Hoffmann. DAUNOU.

ANTIQUITÉS GRECQUES DU BOSPHORE CIMMÉRIEN, publiées et expliquées par M. Raoul-Rochette, membre de l'Institut (académie royale des inscriptions et belles-lettres), et de la légion d'honneur, l'un des administrateurs - conservateurs de la Bibliothèque du Roi: un vol. in-8.o de 236 pages, avec quatre planches de médailles et dix d'inscriptions. Paris, chez Firmin Didot père et fils, rue Jacob, n.o 24, 1822.

MALGRÉ les travaux des critiques qui, depuis la renaissance des lettres, se sont exercés sur les écrivains anciens que le temps a respectés, la combinaison et l'arrangement des faits de certaines parties de l'histoire laissent encore à desirer; aussi quand même les documens historiques resteroient dans l'état où ils sont maintenant, les érudits à venir trouveroient encore dans la discussion de ces précieux débris, une abondante moisson d'aperçus nouveaux. Mais si, parmi les faits de l'antiquité qu'il reste à éclaircir, il en est sur lesquels un examen plus approfondi peut jeter une nouvelle lumière, il en est d'autres que la plus grande sagacité ne pourroit parvenir à expliquer dans l'état actuel de nos connoissances, parce que ce sont des fragmens isolés d'un ensemble tout-à-fait détruit: souvent il suffiroit, pour nous faire deviner le noeud d'une vérité historique, qu'une seule médaille nouvelle ou qu'une inscription de quelques lignes vînt s'interposer entre deux faits dont nous n'apercevons pas la liaison.

Nous devons donc toute notre reconnoissance à ceux qui recueillent ces fragmens précieux, et qui, à l'aide des rapprochemens que fournissent une critique judicieuse et une érudition profonde et variée, parviennent à les coordonner avec l'histoire, en signalant les notions nouvelles qui peuvent y être contenues.

Ces réflexions préliminaires s'appliquent sur-tout à l'ouvrage que nous annonçons, et donnent d'avance une idée du genre d'utilité qu'il peut offrir.

Les anciens ne nous ont transmis qu'un très petit nombre de notions sur l'histoire des villes grecques qui occupoient le contour entier du Pont-Euxin celle des villes bâties sur le Bosphore Cimmérien consiste

[ocr errors]

en un très-petit nombre de passages isolés, qui nous apprennent des noms et très-peu de faits. Des deux dynasties qui se succédèrent au Bosphore, celle des Leuconides est la seule qui, indépendamment de ces passages d'auteurs anciens, nous soit connue par des monumens. Déjà plusieurs savans s'étoient attachés à les recueillir et à les expliquer; tels sont de Boze, le P. Souciet, Froelich, Eckhel, Visconti, et tout récemment MM. Léon de Waxel et Koehler. Leurs travaux sont rappelés et appréciés par M. Raoul-Rochette, dans une introduction où il expose briévement, mais d'une manière complète, l'histoire des travaux dont les antiquités du Bosphore ont été jusqu'ici l'objet.

Celles qui font la matière de son ouvrage, consistent en inscriptions et en médailles ; elles lui ont été communiquées en grande partie par M. de Stemptousky, colonel au service de Russie, lequel possède un riche cabinet d'antiquités grecques à Odessa, et se livre avec beaucoup de zèle aux recherches qui peuvent le rendre plus riche encore; les autres sont tirées d'une collection considérable, également formée à Odessa par M. de Blaramberg, conseiller d'état de Russie. M. Raoul-Rochette consigne, dans cette introduction, l'hommage de sa reconnoissance envers M. de Stemptousky, qui ne s'est pas borné à lui envoyer des dessins fort soignés des monumens qu'il possède, mais qui lui a communiqué plusieurs idées ingénieuses sur la nature et l'explication de ces

monumens.

Le premier est une inscription trouvée, en 1807, dans un des nombreux tumulus qui environnent Kertsch, l'ancienne Panticapée. Quoique très-courte, mutilée et même assez peu importante par son objet, autant du moins qu'on peut le deviner, elle est cependant précieuse, en ce qu'elle constate, par un monument de cette espèce, l'existence de l'ère du Bosphore, laquelle jusqu'ici ne s'est trouvée marquée que sur les médailles. L'inscription se termine par l'énoncé d'une date ainsi conçue, cv To AKY ÉTEL, v penvì Aúspy, «dans la 424. année, au mois » Dystrus, ce qui en fixe l'époque à l'an 128 de notre ère. Le mot Dystrus, nom d'un mois macédonien, pourroit faire croire que la forme de l'année employée au Bosphore avoit été empruntée au calendrier macédonien; mais M. Raoul-Rochette reconnoît qu'il ne faudroit pas trop presser la conséquence, puisqu'on trouve plusieurs noms de mois macédoniens chez les peuples qui suivoient un calendrier différent; c'est ce que Corsini a prouvé pour les Corinthiens et leurs colons de Sicile, et ce qui l'est encore par l'hémérologe de Florence pour plusieurs villes grecques de l'Asie. Il est donc vraisemblable que le même mélange de mois indigènes, grecs et macédoniens, existoit dans le calendrier des

villes du Bosphore: l'auteur établit ce fait par une autre inscription inédite d'Olbiopolis, qui contient une dédicace de plusieurs archontes à Achille Pontarque; elle se termine par cet énoncé remarquable :

[ocr errors]
[ocr errors]

ΠΟΥΡΘΑΙΟΣ ΠΟΥΡΘΑΙΟΥ ΑΡΧΟΝΤΕΥΩΝ ΕΝΔΕΚΑΤΟΝ ΛΟΝΚΑΙΔΙΣΚΟΥ ΕΥΡΥΟΣ ΤΟΣΙΑΔΟΥ ΑΡΧΟΝΤΕΥΩΝ ΕΝΔΕΚΑΤΟΝ ΔΡΟΜΑΠΑΙΔΗΝ. Purthæus fils de Purthæus, archonte pendant le onzième mois.... Euryus, fils de Tosiade, archonte pendant le onzième mois Dro» mapæde.» M. Raoul-Rochette reconnoît un nom de mois dans le mot Dromapade; ainsi les mois étoient exprimés à-la-fois et par un nom particulier, et par l'indication du rang qu'ils tenoient dans l'année : cette considération l'engage à lire plus haut APOMAПAIAHN à la place de AONKAIAIEKOr, et cette conjecture, assurément très-vraisemblable pour le sens, n'a contre elle que l'extrême différence des deux mots, qui ont si peu de rapport entre eux, qu'on ne conçoit pas comment le copiste de l'inscription a pu prendre l'un pour l'autre ; on se demande aussi pourquoi, les deux mois étant les mêmes, on n'a pas mis en une fois, . . . ἀρχοντεύοντες ἐνδέκατον Δρομαπαίδην. Je crois qu'il y a encore dans l'énoncé de cette date une difficulté qui ne sera levée complètement que si l'on découvre un monument analogue. Peut-être confirmera-t-il la conjecture de M. Raoul-Rochette, et prouvera-t-il que mes scrupules ne sont pas fondés.

La dédicace à Achille et l'épithète de Pontarque, qui est donnée à ce héros, ne sont pas moins dignes d'attention. M. Raoul-Rochette les explique en les rattachant habilement au culte rendu à Achille en divers lieux de la côte du Pont-Euxin, et notamment à Olbiopolis, selon le témoignage de Dion Chrysostome.

[ocr errors]

Il passe ensuite à l'explication d'une inscription très-curieuse, et qu'il qualifie «< une des plus précieuses pour l'histoire du Bosphore, que » le temps ait laissé venir jusqu'à nous. » Elle est ainsi conçue : « Xénoclide, fils de Posis, a consacré ce temple à Diane Agrotère (ou Chasseresse), Pærisade fils de Leucon étant archonte du Bosphore » et de Theudosie, et étant roi des Sindes, des Torètes et des Dan» dariens. » M, Raoul-Rochette explique d'abord quelques particularités de détail, telles que la vraie orthographe des noms de Parisade et de Theudosie, et une irrégularité de construction qui consiste en ce que le mot ἄρχοντος est suivi du nominatif βασιλεύων ; il examine ensuite le surnom de Agoria donné à Diane sur ce monument. Diane Agrotère avoit des temples en plusieurs lieux de la Grèce, dans l'Attique, dans la Mégaride, l'Achaïe et l'Élide; il est donc assez singulier qu'une inscription du Bosphore soit la première sur laquelle on trouve le nom de

cette déesse. Ici, M. Raoul-Rochette se livre à une discussion intéressante sur le trait principal de l'inscription de la reine Comosarye, déjà expliquée par M. de Koehler. Cette inscription précieuse contient la dédicace de deux statues, faite par Comosarye, femme de Parisade à deux divinités dont les noms sont exprimés ainsi, ΙΣΧΥΡΩΙ ΘΕΩΙ ANEPIEI KAI AZTAPAI. M. de Kohler reconnoît dans ces deux divinités Apollon et Diane, dont les noms auroient été exprimés par des mots chaldéens. M. Raoul-Rochette adopte l'idée qu'elles sont identiques avec Apollon et Diane; mais il trouve assez étrange que, sur un monument grec, on ait désigné des divinités grecques par des dénominations prises dans une langue étrangère. Il observe que, sur toutes les inscriptions grecques connues du Bosphore, c'est toujours par un nom grec et des surnoms pris dans cet idiome, que les divinités sont désignées. D'après ces considérations, il doute que l'inscription rapportée par M. de Kohler, soit, quant aux mots Anergès et Astara, parfaitement conforme au monument original, et en conséquence il propose de lire EXAEPIEI KAI AZTEPIAI, deux dénominations qui, en effet, conviennent à Apollon et à Diane. Le nom d'Astérie étant, comme l'observe l'auteur, celui d'une sœur de Latone, a pu être donné à Diane; quant à Exps, c'est le surnom ordinaire d'Apollon. A la vérité EKAEPTEI suppose le nominatif EKAEPгHE, forme inconnue; mais cette difficulté ne seroit peut-être pas très-sérieuse. Toute la question repose sur un fait: les noms sont-ils, dans l'original, tels qu'ils ont été rapportés ! C'est ce dont il n'est pas difficile de s'assurer, s'il est vrai que l'original soit à SaintPétersbourg. Je ne dois pas omettre de dire que, dans le cours de cette discussion, l'auteur fait une digression curieuse sur le culte des Gètes; il confirme par des rapprochemens nouveaux l'opinion de Potter, relativement à l'identité du personnage appelé Achicarus par Clément d'Alexandrie, et Achaïcarus par Strabon. Faute de m'être souvenu de la note de Potter, je n'avois su que faire de cet Achaïcarus dans ma traduction de Strabon, et j'avois confessé franchement mon ignorance.

Revenant à l'inscription de Xénoclide, M. Raoul-Rochette en signale le trait le plus important qui se trouve dans ces deux mots, Parisade fils de Leucon; ils démontrent l'existence d'un Parisade I.", fait d'ailleurs établi par des textes de Diodore et de Dinarque, et en même temps ils prouvent la justesse de l'attribution qu'on avoit faite à ce prince de la célèbre médaille d'or du cabinet du Roi. Ainsi, M. Visconti auroit eu tort, dans son Iconographie, d'attribuer cette médaille à un second Parisade inconnu dans l'histoire. Les raisonnemens sur lesquels ce grand antiquaire appuyoit son hypothèse son

réfutés par M. Raoul-Rochette, qui examine et discute avec soin les textes relatifs à cette partie de l'histoire du Bosphore; il rectifie plusieurs fausses interprétations, et il établit, contre l'opinion de quelques antiquaires, que Parisade et les princes de sa dynastie exerçoient au Bosphore l'autorité de monarque, et ont pu y prendre le titre de roi.

Toutes les idées que l'auteur développe à cet égard sont confirmées par la médaille de Leucon, qui n'avoit jamais été publiée et dont il donne une gravure très-fidèle: on y voit d'un côté une tête qui est celle d'Hercule; au revers sont l'arc et la massue, symboles propres à ce dieu, et la légende ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΛΕΥΚΩΝΟΣ. Cette médaille ne porte pas en elle-même la preuve évidente qu'elle appartient au Leucon de l'histoire, et il ne seroit pas impossible qu'elle eût été frappée par quelque autre prince de ce nom qui auroit régné dans l'intervalle de temps embrassé par les livres de Diodore que nous n'avons plus. M. Raoul-Rochette toutefois, après plusieurs discussions dans lesquelles il va au devant de diverses difficultés, établit d'une manière très-satisfaisante que la médaille de Leucon appartient au seul roi de ce nom dont l'existence soit bien constatée. D'ailleurs, et c'est une observation que l'auteur m'a communiquée à l'appui de son opinion, deux nouveaux exemplaires de la médaille de Leucon, trouvés dans un tumulus, près de Kertsch, et publiés par M. de Blaramberg, dans une dissertation dont M. Raoul-Rochette est l'éditeur, et qui est déjà imprimée, prouvent que la tête qu'on voit sur la médaille de Leucon, est bien véritablement Hercule; il y reconnoît le style et la fabrique du temps de Philippe.

Parmi les discussions relatives aux médailles de Leucon, on doit distinguer l'examen du passage où Polyen dit que Leucon, pour doubler la valeur de la monnoie courante, y fit mettre un autre caractère (ămov imbaλwv zaenmeg): on avoit entendu ce mot d'une contre-marque ; M. Raoul-Rochette l'entend d'un nouveau type, d'une nouvelle empreinte, et il explique de cette manière la différence de type et de fabrique qu'on observe dans les autres médailles de Leucon.

Sans entrer ici dans la discussion de ce point, l'un des plus curieux que peut présenter l'histoire monétaire des anciens, et sur lequel j'aurois une opinion un peu différente de celle de l'auteur, je me contenterai de signaler à l'attention des savans les observations nouvelles que M. Raoul-Rochette a recueillies sur les contre-marques, objet tant débattu par les numismatistes modernes. Il pense que l'usage de ces signes additionnels avoit pour objet d'augmenter la valeur de la

« IndietroContinua »