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mais le cardinal Baronius qui en fait mention dans ses annales où il l'a fait graver (1), assure qu'il l'a vue dans le cabinet du célèbre antiquaire Fulvius Ursinus.

Avec de si heureux auspices, l'empereur descendit dans la plaine et fit donner le signal du combat, après s'être muni du signe de la croix et après avoir exhorté ses soldats à regarder les protecteurs qui les conduisoient et non pas le nombre de leurs ennemis; mais comme il remarqua que son avant-garde paroissoit un peu étonnée et marchoit lentement à la vue de cette multitude d'ennemis qui s'étendoit de toutes parts, et occupoit les postes avancés pour l'envelopper, il descendit de cheval, et courant se mettre à la tête des premiers rangs, il s'écria plusieurs fois avec une sainte confiance: où est donc le Dieu de Théodose! (2)

Ces paroles furent bientôt suivies de deux grands événemens qui firent absolument changer la face des deux armées. Théodose, suivi d'un fort petit nombre des siens, passoit rapidement de l'aile droite à l'aile gauche de son armée, pour aller rassurer ses troupes auxiliaires qu'Argobaste pressoit déjà et qui étoient sur le point de plier, lorsqu'il vit venir à lui par derrière le comte Arbétion, avec un gros corps de cavalerie ennemie, qui, s'étant avancé par les détroits des montagnes, sembloit prêt à tomber sur lui, et qui auroit pu l'accabler avant qu'il eût pu être secouru.

A cette vue, Théodose s'arrêta et se mit en état de défendre sa vie avec le peu de gens qui l'accompa

(1) Baron. An 394.

(2) Ambr, in fun, Theod.

gnoient. Mais Arbétion, baissant les armes, se rangea de son côté avec les escadrons qu'il commandoit, et son exemple fut bientôt suivi d'un assez grand nombre d'officiers et de soldats qui prirent soudainement le même parti.

S IV.

Le Ciel se déclare pour Théodose par un phénomène prodigieux.

Le second événement fut et bien plus extraordinaire et bien plus décisif. Eugène, qui, de la hauteur où il étoit dans un riche pavillon, découvroit tout ce qui se passoit dans la plaine, aperçut de loin Théodose qui s'avançoit à la tête d'un corps de troupes peu nombreuses, mais fort animées par l'exemple de leur chef, et résolues de vaincre ou de mourir avec lui. A cette le tyran demanda d'où pouvoit venir cette résolution à des gens déjà vaincus. Il dit que son ennemi désespéré cherchoit à mourir les armes à la main, et il ordonna qu'on le lui amenât, s'il se pouvoit, vivant et enchaîné.

vue,

Mais dès qu'on fut de part et d'autre à la portée des traits, le Ciel se déclara ouvertement pour Théodose par un prodige jusqu'alors inouï, et les deux chefs invisibles, qui lui avoient promis la victoire, commencèrent à s'acquitter de leur promesse et à lui faire sentir des effets visibles d'une puissante protection. Les traits que les soldats d'Eugène lançoient, furent repoussés par une main invisible, et, retournant avec violence contre ceux qui les avoient jetés, ils les fai

soient périr par leurs propres armes. Au contraire, les flèches qui partoient du côté de Théodose étoient arrachées par une force supérieure des mains des soldats, et, poussées rapidement au-delà de leur portée, elles faisoient aux ennemis de profondes et mortelles blessures.

Un vent impétueux (1) qui se leva tout à coup du sommet des Alpes entre l'orient et le septentrion, et au milieu du temps le plus serein, sembloit être l'instrument dont Dieu se servit pour opérer ce prodige. Ce vent, mêlé d'orages et de tourbillons, soufflant directement contre les troupes d'Eugène, leur arrachant leurs boucliers des mains, les fatiguant par une épaisse poussière qui, poussée contre leurs yeux, les empêchoit de voir et de respirer, renversant les hommes avec leurs chevaux, les exposant aux traits qu'on leur lançoit de toute part, sans qu'ils pussent ni attaquer ni se défendre, les mit en peu de temps dans un si étrange désordre, que, mettant les armes bas, ils implorèrent la clémence du vainqueur, et les plus résolus s'écrièrent qu'ils étoient venus combattre les hommes et non pas Dieu.

Théodose leur accorda volontiers la grâce qu'ils demandoient; mais ce fut à condition qu'ils lui livreroient à l'heure même le tyran, qui, voyant accourir à lui une troupe de ses officiers et de ses soldats, et ne doutant nullement d'une pleine victoire, demanda d'abord si on ne lui amenoit pas Théodose, comme il l'avoit ordonné. Mais, pour toute réponse, il fut pris lui-même et mené à ce prince, qui lui fit sur le champ trancher la tête, après lui avoir reproché sa perfidie,

(1) Oros. Ruf. 1. 2. — Socr. 1. 4. Theod. l. 5. -Soz. l. 7.

le meurtre de Valentinien, l'usurpation de l'empire, et les idoles de Jupiter et d'Hercule qui furent brisées, et les morceaux furent distribués aux soldats victorieux.

Le malheureux Arbogaste, après avoir erré deux jours par les montagnes, désespéra de pouvoir échapper à ceux qui le cherchoient pour le prendre et se passa lui-même deux épées l'une après l'autre au travers du

corps.

Telle fut la signalée et miraculeuse victoire que l'empereur Théodose remporta sur le tyran Eugène, ou, pour mieux dire, que la religion elle-même remporta sur l'idolâtrie : puisqu'Arbogaste et Flavien, en partant de Milan pour les Alpes, déclarèrent publiquement et du consentement d'Eugène, que leur dessein étoit d'abolir absolument à leur retour la religion des Chrétiens, de contraindre les clercs à prendre les armes et de faire une écurie de la célèbre Basilique de Milan.

Les auteurs originaux qui vivoient dans ce tempsJà et qui en ont écrit l'histoire, et en particulier Ruffin, Théodoret, Socrate et Sozomène, sont tous d'accord entr'eux sur cet événement. Orose qui écrivoit dix-huit mois après, circonstancie exactement les faits que nous avons détaillés. Tous ces auteurs ajoutent que le jour même de la bataille, cette victoire fut annoncée à Constantinople par des voies extraordinaires. Ils disent qu'un possédé qu'on exorcisoit publiquement dans l'église de saint Jean-Baptiste, que Théodose avoit fait bâtir à l'Hebdomon, fut enlevé en l'air par le démon, et qu'il se mit à dire des injures à ce saint précurseur du Sauveur, en lui reprochant qu'avec sa tête coupée il venoit de le vaincre sur les Alpes. Ruffin assure

qu'environ ce même temps, se trouvant dans la Thébaïde avec quelques autres personnes auprès du célèbre solitaire saint Jean d'Égypte, ce saint homme leur annonça, par un esprit prophétique, la victoire de Théodose, dont on ne reçut la nouvelle que plusieurs jours après, et qu'il les exhorta d'en rendre grâces à 'Dieu.

SV.

Saint Augustin interroge lui-même des soldats qui s'étoient trouvés à la bataille.

Mais rien de plus précis, de plus formel et de plus remarquable que ce que saint Augustin raconte ladessus dans son cinquième livre de la Cité de Dieu (1). Il commence par assurer que Dieu, dévoilant l'avenir à Théodose, lui annonça par avance cette victoire, et qu'il la remporta bien plus par les armes de la prière que par celles de ses soldats (2). Il rapporte ensuite deux circonstances mémorables qu'il assure avoir apprises de la bouche même des soldats d'Eugène. La première c'est que leurs armes, ou leur dévenoient inutiles, en leur étant comme arrachées des mains; ou leur donnoient la mort, étant repoussées et tournées contre eux-mêmes. La seconde circonstance c'est qu'un rapide tourbillon poussoit violemment tous les traits qu'on leur décochoit du côté de Théodose (3).

(1) Cap. 26.

(2) Orante magis quàm feriente.

(3) Extorta sibi esse de manibus quæcumque jaculabantur: cum à partibus Theodosii in adversarios vehemens ventus, iret et nonsolùm quæcumque in eos jaculabantur concitatissimè raperet, verùmetiam ipsorum tela in eorum corpora retorqueret.

On peut voir, sur cet événement, l'histoire de Théodose le grand, par Fléchier.

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