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mands, pendant que les Espagnols semblaient abandonner complètement les Carolines et les Palaos, des missionnaires protestants américains se sont installés sur plusieurs îles; leur établissement remonte à plus de vingt ans. Presque tout le commerce des produits de l'archipel est entre les mains de maisons allemandes; un consul allemand y réside, et c'est pour répondre à la demande de ses nationaux que l'Allemagne étend son protectorat sur les Carolines et les Palaos. Nous n'avons pas à prendre parti dans le débat; nous nous contenterons de résumer impartialement l'histoire de la découverte de ces îles, et d'en donner une description aussi complète que possible.

De l'aveu même des auteurs espagnols, c'est un marin portugais, Diego Roche ou Rocha, qui le premier signala, en 1526, l'existence de quelques îlots dans ces parages; il les revit deux ans plus tard, pendant une seconde exploration. En 1529, Saavedra, dans le voyage qu'il entreprit pour aller des Indes orientales à la Nouvelle-Espagne, à travers le Pacifique, reconnut un groupe d'îles que l'on suppose être les Ulithi (groupe Mac-Kensie). Ce Saavedra est celui qui, le premier, eut l'idée de creuser un canal à travers l'isthme de Darien, en utilisant le lac Nicaragua. Il eût peut-être entrepris ce travail gigantesque si la mort n'était venue le surprendre peu de temps après son départ des îles Marshall, qu'il avait surnommées les îles des Bons Jardins. En 1543 Villalobos et en 1565 Legaspi, deux marins espagnols, eurent connaissance de nombreux groupes d'iles, probablement les Palaos et quelques îlots de la partie occidentale des Carolines.

L'Anglais Francis Drake, qui porta un coup si fatal au commerce et aux colonies espagnols, suivit en 1579 la route tracée par Magellan, et, traversant l'océan Pacifique, découvrit des îlots sans nom, qu'il appela îles Thieves, au sud d'Eap; c'était sans doute le groupe des Matelotas. En 1595, Querosa vit une grande île à l'est de l'archipel, que l'on suppose être Ponape ou Ascension, et Lorenzo Barrito releva, non loin de là, quelques îlots inhabités. Vers 1626, la flotte de Nassau parcourait l'océan Pacifique, donnant la chasse aux navires espagnols; sur sa route, elle découvrit deux îles qui doivent être Eap (Yap) et Tromelin (Fais). Soixante ans plus tard, le pilote Francesco Lezcano reconnaissait de nombreux îlots dans ces parages; il ne put en indiquer la position exacte, et l'on ignore de quel groupe il s'agit. Il les appela Carolines, en l'honneur du roi Charles II qui régnait à cette époque, et ce nom fut donné à tout l'archipel; plus tard, on les désigna sous le nom de Nouvelles-Philippines, mais cette appellation n'a pas prévalu.

Vers la fin du XVIIe siècle, les Espagnols établis aux Philippines et

aux îles Mariannes obtinrent quelques renseignements sur les Carolines par des naturels de ces îles que les vents contraires et la tempête avaient jetės hors de leur route; en 1705, un certain Serano put dresser une carte, bien imparfaite il est vrai, de l'archipel et l'envoyer au pape Clément XI. C'est alors que les Jésuites de la mission de Manille résolurent d'aller s'établir aux Carolines. Au mois de novembre 1710, des missionnaires, accompagnés de quelques soldats, quittèrent les Philippines; après une traversée longue et dangereuse, ils atteignirent Sansoral, petite île de corail située dans le groupe des Palaos. Les prêtres qui allèrent à terre furent massacrés par les indigènes. La tentative du P. Cantova, en 1731, n'eut pas plus de succès. Ce religieux aborda avec le P. Victor Valter dans l'île d'Ulithi et resta trois mois avec son compagnon; puis il l'envoya chercher des auxiliaires à Manille. Quand celui-ci revint, après un an d'absence, tout le personnel de la mission avait été massacré. Dans une lettre écrite peu de temps avant sa mort, le P. Cantova a donné d'intéressants détails sur les indigènes; on lui doit en outre une carte du groupe d'Ulithi.

Jusqu'en 1817, les Carolines et les Palaos furent visitées par des navigateurs de toutes les nationalités, mais le nombre des îles, leur position exacte et l'hydrographie des mers qui les baignent étaient absolument ignorés. A cette époque, Kotzbue en explora quelquesunes, dont il fixa la latitude. MM. de Freycinet, à bord de l'Uranie; Duperrey, commandant la Coquille; Dumont d'Urville avec l'Astrolabe, et Lutke, capitaine du Seniavine, parcoururent tout l'archipel, visitè. rent tous ses îlots et donnèrent les premiers renseignements certains sur les Carolines et ses habitants.

En résumé, c'est un navigateur portugais qui le premier a signalé les Carolines, et si, par la suite, le plus grand nombre de ces îles ont été découvertes par des marins espagnols, il est à supposer que ceuxci n'ont rien fait pour s'en assurer la possession; c'est aux travaux de trois capitaines français et de deux officiers russes que l'on doit la connaissance exacte de ces îles, dont les Espagnols revendiquent aujourd'hui la propriété.

L'archipel des Carolines fait partie de cette portion de l'océan Pacifique que l'on désigne sous le nom de Micronésie, à cause du nombre incalculable d'îles, d'îlots et de récifs dont il est hérissé. Il est situé au sud des Mariannes ou Ladrones, à l'ouest des Marshall et au nord de la Nouvelle-Guinée; à quatre degrés à l'ouest des Carolines, sont les îles Palaos ou Pelew. Les Carolines s'étendent en longueur, de l'Est à l'Ouest, entre 134° et 162° de longitude Est de Paris. La plus

septentrionale des îles, Ulithi, est traversée par le 10 de latitude Nord, et la plus méridionale est par 4o de latitude au nord de l'équateur. L'archipel se compose de plus de cinq cents flots, dont la majeure partie ne sont que des atolls, des récifs de corail, produit du travail de milliards de zoophytes pendant les siècles passés. Le nombre des îles véritables n'est que de quarante-huit; mais comme chacune d'elles est entourée d'un certain nombre d'îlots, on peut dire que l'archipel comprend quarante-huit groupes; quarante-trois sont composés d'îles basses et formées de coraux; cinq sont en basalte, avec de vastes rudiments de corail à leur base. L'espace occupé par tous les flots et par la mer qui les baigne présente une superficie de quarantecinq mille lieues carrées. On peut diviser l'archipel en trois grands groupes séparés par deux larges canaux: le groupe oriental, dont la principale île est Ponape ou Ascension; le groupe du centre, qui contient la réunion d'îlots connus sous le nom de Hogoleu; le groupe occidental, dont la plus grande île est Eap ou Yap.

L'ensemble des îles basses, qui sont, ainsi que nous l'avons vu, les plus nombreuses, offrent un aspect à peu près uniforme; elles sout couvertes d'une végétation luxuriante, et, vues de la mer, font l'effet d'un impénétrable bouquet de verdure émergeant du sein des flots. Les îles hautes, au contraire, semblent un bloc de rocher dont les sommets atteignent jusqu'à près de 3,000 pieds de haut. Autour de la plupart de ces îles se dressent des récifs qui s'étendent souvent fort loin, formant d'immenses lagons qui rejoignent d'autres iles; leur centre est hérissé de rochers de corail élevés; une ou deux passes souvent très étroites donnent accès aux proas et aux navires d'un faible tirant d'eau ; pendant les tempêtes, ces mers parsemées d'écueils sont des plus dangereuses et ont longtemps été la terreur des navigateurs. Dans le groupe oriental, les principales îles sont: Ponape ou Ascension, Kusai ou Strong et Mokil ou Duperrey.

Ponape est située par 6° 55' de latitude Nord et 156° 5' de longitude Est; c'est une des plus importantes des groupes élevés et basaltiques de l'archipel; elle est presque circulaire et mesure de cinquante à soixante milles de pourtour; au centre s'élève un pic de 2,680 pieds de haut. Le groupe de Ponape est composé de plusieurs îles entourées par un récif de soixante et dix à quatre-vingts milles de circonférence; au centre s'élève l'île principale, tandis que douze ou quinze îlots basaltiques plus petits se dressent non loin d'elle. Vu du Nord, cet ensemble de roches escarpées et de récifs autour desquels se dessinent de longues lignes d'écume blanchâtre, est très pittoresque et rendu plus frappant encore par la végétation qui couvre l'île. Depuis les pics

les plus élevés jusqu'à la mer, où pousse toute une forêt de mangliers, l'île est entièrement couverte de verdure si épaisse que, n'étaient la fumée qui s'élève au-dessus des habitations et les nombreuses pirogues que montent les indigènes, on la croirait inhabitée. Sa population est d'environ 5,000 habitants. Les missionnaires protestants américains des îles Sandwich ont fondé un établissement dans cette île; ils possèdent un petit navire à l'aide duquel ils visitent les différents îlots du groupe. Là aussi est le siège d'une importante maison allemande.

Ponape possède à Port-Métalanien des ruines curieuses dont l'origine est pour les ethnologistes un problème jusqu'alors insoluble. Sur le bord d'un petit ruisseau s'élève un mur fait de prismes basaltiques; il est long de cent mètres et haut de onze environ. Une sorte de porche s'ouvre sur la crique; il a quatre pieds de haut, et il est formé par un énorme bloc de basalte posé en travers; en le franchissant, on pénètre dans une vaste cour entourée d'un mur de dix mètres de hauteur. Tout autour de cet enclos et à l'intérieur règne une terrasse de deux mètres sur quatre de large, également construite avec des fûts de basalte. Il est difficile au premier abord, à cause des envahissements de la végétation, d'embrasser d'un coup d'œil l'ensemble de la cour; mais, si l'on parvient à monter sur la terrasse, on distingue un espace carré divisé en trois parties égales par des murs très bas et courant du Nord au Sud; au centre de chacun de ces compartiments est une chambre fermée, de quatre mètres carrés environ, construite et couverte avec des fûts de basalte. A sa base et y compris la terrasse, le grand mur circulaire a environ six mètres d'épaisseur; en hauteur, il dépasse la terrasse de plus de deux mètres. Quelques-uns des fûts employés pour la construction de ces murs, et notamment de celui de la façade, ont huit mètres de longueur et deux mètres de circonférence.

On ne trouve pas de roches basaltiques dans le voisinage de cet édifice; elles n'existent que dans la chaîne centrale de la partie nord de l'île, à dix milles au moins de Port-Métanalien; pour y arriver, il faut traverser une contrée montagneuse et souvent obstruée par la végétation; il a donc fallu, pour apporter ces masses, les descendre jusqu'à la côte et les transporter par eau. L'opinion, émise par quelques savants, que ces constructions sont l'œuvre de la race actuelle ou des boucaniers espagnols, n'est pas soutenable; l'origine de ces édifices est aussi ignorée que celle des énormes figures trouvées dans les archipels du Pacifique oriental. Dans d'autres îles des Carolines, on trouve des monuments semblables et des « Mounds », longs de cinquante mètres et hauts de quatre; mais ceux de Ponape sont de beaucoup les plus importants.

Kusai ou Strong est la plus orientale des Carolines; elle est située par 5° 20' de latitude N. et par 160° 46' de longitude E. Au centre s'élèvent trois pics tellement séparés que l'on croirait voir trois petits îlots distincts; ce n'est qu'en approchant que l'on distingue les terres basses qui les réunissent. Comme Ponape, l'île Strong est revêtue d'un épais manteau de verdure qui descend des trois sommets hauts de six cents mètres environ. L'île mesure vingt milles du S.-O. au N.-E. dans sa plus grande longueur, et dix milles dans sa largeur moyenne; elle affecte à peu près la forme d'une poire. Tout autour, et dans un rayon de deux milles, se dresse une ceinture de récifs que l'on franchit par deux passes; en face celle du N.-E. se trouve le port Weather, que l'on suppose être un immense cratère éteint et submergé qu'une sorte de rempart de basalte dentelé de pointes aiguës entoure de trois. côtés. La population de Kusai, que l'on estimait en 1838 à 1,300 habitants, n'est pas aujourd'hui de plus de 700 âmes. L'île fut découverte en 1804 par le capitaine américain Croisier, et son hydrographie faite par Duperrey. Les habitants étaient autrefois peu hospitaliers et tuaient les équipages des navires que la tempête jetait sur ces côtes ; des vieillards du pays racontent encore le massacre des marins du Waverley et du Honduras. A Lela, au nord de l'île, on retrouve des constructions à peu près semblables à celles de Ponape, mais beaucoup moins considérables; au dire de voyageurs modernes, Dumont d'Urville aurait beaucoup exagéré l'importance de ces ruines.

L'île Mokil ou Duperrey se compose d'un immense cercle de récifs, au centre duquel s'elèvent deux îlots d'inégale grandeur, situés par 6° 40′ de latitude N. et 157° 29' de longitude E.; ils ont été découverts et visités par Duperrey en 1824. Leur population ne dépasse pas 80 habitants.

N'Galik ou Raven, ou les Sept îles, a été découverte en 1773 par un marin espagnol et visitée peu après par un Anglais, Thomson; le centre de l'atoll qui se compose de sept îlots, d'où son nom, est par 5° 47′ 30′′ latitude N. et 155° 7′ de longitude E. L'atoll décrit un cercle de vingtdeux milles et n'a qu'un passage extrêmement étroit dans sa partie orientale. Des étrangers ont longtemps habité ce groupe, à une époque déjà éloignée; leur présence a quelque peu modifié le type des habitants et laissé dans leur esprit tout un souvenir de meurtres et de crimes; aussi ont-ils conservé une crainte excessive pour les blancs.Il existe sur une des îles un curieux édifice. C'est une sorte de pyramide de quatre mètres de rôté à la base, dans laquelle sont creusées des marches grossières. Au sommet est posée à plat une pierre de cinq pieds carrés, au-dessus de laquelle se dresse une colonne couronnée d'une

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