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notre lot à nous, c'est, à la maison, la misère, au dehors, les dettes, un présent détestable, un avenir plus triste encore; que nous reste-t-il enfin, à part un misérable souffle de vie? Réveillez-vous done! La voici, la voici, cette liberté que vous avez si souvent souhaitée; et avec elle viennent à vous les richesses, l'honneur, la gloire: tels sont les prix que la fortune promet aux vainqueurs. Que l'entreprise même, l'occasion, vos périls, votre détresse, les magnifiques dépouilles de la guerre, bien plus que mes paroles, excitent votre courage. Général ou soldat, je suis à vous; ni d'âme, ni de corps, je ne vous ferai défaut. Ces projets, c'est comme consul que je les exécuterai, j'espère, avec vous; à moins que ma confiance ne m'abuse et que vous ne soyez plus disposés à obéir qu'à commander.

CLXXV

(Tom. III, p. 515.)

Ces mesures répandirent le trouble parmi les habitants et l'aspect de Rome en fut changé : à la joie excessive, au goût des plaisirs, qu'avait fait naître une longue tranquillité, succéda tout à coup une tristesse générale. On court, on s'agite; on ne sait à quels lieux, à quelles gens se fier; sans avoir la guerre, on n'a plus la paix; chacun mesure le péril à ses propres craintes. Puis les femmes qui, vu l'étendue de l'empire, n'ont jamais connu les alarmes de la guerre, se désolent, tendent au ciel des mains suppliantes, s'apitoient sur leurs jeunes enfants, questionnant sans cesse, s'épouvantant de tout, et, oubliant le faste et les délices, désespèrent d'elles et de la patrie. Cependant l'âme implacable de Catilina n'en poursuivait pas moins ses projets, bien qu'il vît les préparatifs de résistance et que lui-même eût été cité en justice par L. Paullus en vertu de la loi Plautia. Enfin, pour dissimuler, et feignant de youloir se défendre comme s'il eût été victime d'une calomnie, il vint au Sénat. C'est alors que le consul,

postulare,<< Patres conscripti ne quid de se temere crederent ea familia ortum, ita ab adolescentia vitam instituisse, ut omnia bona in spe haberet ne existumarent, sibi patricio homini, cujus ipsius atque majorum plurima beneficia in plebem romanam essent, perdita republica opus esse, quum eam servaret M. Tullius, inquilinus civis urbis Romæ. » Ad hoc maledicta alia quum adderet, obstrepere omnes, hostem atque parricidam vocare. Tum ille furibundus : « Quoniam quidem circumventus, inquit, ab inimicis præceps agor, incendium meum ruina restinguam' ». Dein se ex curia domum proripuit.

Sallust., Catil. 31.

LCXXVI

Comment Catilina et ses conjurés avaient des partisans nombreux.

Neque solum illis aliena mens erat, qui conscii conjurationis; sed omnino cuncta plebes, novarum rerum studio, Catilinæ incepta probabat. Id adeo more suo videbatur facere. Nam semper in civitate, quis opes nullæ sunt, bonis invident, malos extollunt; vetera odere, nova exoptant; odio suarum rerum mutari omnia student; turba atque seditionibus sine cura aluntur, quoniam egestas facile habetur sine damno. Sed urbana plebes, ea vero præceps ierat multis de caussis. Primum omnium, qui ubique probro atque petulantia maxume præstabant, item

(1) Salluste transporte ici une parole que Catilina prononça en réalité quelques jours auparavant en répondant à une menace que lui avait adressée Caton. Nous en avons la preuve dans le plaidoyer de Cicéron en faveur de Muréna, ch. 25.

M. Tullius, soit qu'il craignît sa présence, soit qu'il s'en indignat, prononça ce brillant discours, si utile à la république, qu'il a mis par écrit et publié dans la suite. Mais à peine se fut-il assis, que Catilina, en homme habile dans la dissimulation, les yeux baissés et d'un ton suppliant, conjura les sénateurs « de ne rien croire à la légère sur son compte sa naissance et la conduite qu'il avait tenue depuis l'adolescence lui permettant d'aspirer à tout, ils ne devaient pas penser qu'un patricien tel que lui, dont les services, comme ceux de ses ancêtres, avaient été des plus utiles au peuple romain, eût intérêt à perdre la république, alors qu'elle aurait pour sauveur M. Tullius, ce citoyen domicilié d'hier dans la ville de Rome. » Comme à ce trait il ajoutait d'autres injures, tous l'arrêtent par leurs murmures, le traitent d'ennemi public et de parricide. Alors transporté de fureur: « Puisque je suis, dit-il, entouré d'ennemis qui me poussent à l'abîme, j'étoufferai sous des ruines l'incendie préparé contre moi ». Puis il sortit brusquemeut du sénat et courut chez lui.

CLXXVI

(Tom. III, p. 516.)

Ces sentiments hostiles n'existaient pas seulement chez les complices de la conjuration: toute la populace en général, par amour de la nouveauté, approuvait l'entreprise de Catilina; et en cela elle suivait, semble-t-il, son penchant naturel; car toujours, dans un Etat, ceux qui n'ont rien portent envie aux gens considérés, exaltent les méchants, détestent l'ancien état de choses, en souhaitent un nouveau ; en haine de leur sort, ils désirent que tout soit bouleversé ; ils se repaissent sans crainte de troubles. et de séditions, parce que la pauvreté, n'ayant rien à perdre, se tire facilement d'affaire. Mais c'était particulièrement la populace de Rome, qui courait à l'abime pour mille motifs. D'abord, tous ceux qui, en quelque lieu que ce fût, s'étaient fait connaitre par leur bassesse et leur

alii per dedecora patrimoniis amissis, postremo omnes quos flagitium aut facinus domo expulerat; ii Romam, sicuti in sentinam, confluxerant. Deinde multi, memores Sullanæ victoriæ, quod ex gregariis militibus alios senatores videbant, alios ita divites, uti regio victu atque cultu ætatem agerent, sibi quisque, si in armis forent, ex victoria talia sperabant. Præterea juventus, quæ in agris manuum mercede inopiam toleraverat, privatis atque publicis largitionibus excita, urbanum otium ingrato labori prætulerat. Eos atque alios omnis malum publicum alebat. Quo minus mirandum est, homines egentis, malis moribus, maxuma spe, reipublicæ juxta ac sibi consuluisse. Præterea quorum, victoria Sullæ, parentes proscripti, bona erepta, jus libertatis imminutum erat, haud sane alio animo belli eventum exspectabant. Ad hoc, quicunque aliarum atque senati partium erant, conturbari rempublicam, quam minus valere ipsi malebant: id adeo malum multos post annos in civitatem reverterat!

Sallust., Catil., 37.

CLXXVII

Parallèle de Caton et de César.

His genus, ætas ', eloquentia, prope æqualia fuere : magnitudo animi par, item gloria; sed alia alii. Cæsar beneficiis ac munificentia magnus habebatur; integritate vitæ Cato. Ille mansuetudine et misericordia clarus factus; huic severitas dignitatem addiderat. Cæsar dando, sublevando, ignoscendo; Cato nihil largiundo gloriam adeptus. In altero miseris perfugium; in altero malis pernicies.

(1) A quatre années près l'àge était le même, et la famille Porcia n'était pas moins illustre que la famille Julia.

turbulence, d'autres aussi qui dans des excês honteux avaient dissipé leur patrimoine, en un mot tous ceux que l'opprobre ou le crime avaient chassés de chez eux, avaient afflué à Rome comme dans une sorte d'égoût. Puis beaucoup, en se rappelant la victoire de Sylla et en voyant de simples soldats devenus ou sénateurs ou assez riches pour mener en tout point un train royal, se flattaient, s'ils prenaient les armes, d'obtenir de la victoire les mêmes avantages. De plus, la jeunesse de la campagne, qui, pour prix du travail de ses mains, n'arrivait à vivre que péniblement, attirée par les largesses publiques et particulières, avait préféré l'oisiveté de Rome à un labeur ingrat. Ceux-là et bien d'autres trouvaient leur subsistance dans les malheurs publics. Aussi doit-on moins s'étonner que des hommes besogneux, sans moeurs, ivres d'espérance, n'aient pas considéré l'intérêt de la république autrement que le leur. Il y avait encore ceux dont Sylla vainqueur avait proscrit les parents, confisqué les biens, restreint les droits civiques, et qui attendaient dans des dispositions non différentes l'issue de la guerre. Ajoutez enfin tous ceux qui, n'étant pas du parti du sénat, préféraient le bouleversement de l'État à leur déchéance personnelle. Le mal intestin, longtemps assoupi, s'était réveillé.

CLXXVII

(Tom. III, p. 517.)

Chez eux la naissance, l'âge, l'éloquence étaient à peu près pareils; la grandeur d'àme égale, comme aussi la gloire, mais différemment. César se montrait grand par ses bienfaits et sa munificence; Caton, par l'intégrité de sa vie. Le premier s'était fait un nom par sa douceur et son humanité; la sévérité du second avait ajouté au respect qu'il commandait. César, à force de donner, de soulager, de pardonner, avait obtenu la gloire; Caton, en n'accordant jamais rien. L'un était le refuge des malheureux, l'autre le fléau des méchants. On vantait la facilité de

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