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ment par la force de son principe et ramenée dans sa voie véritable par l'autorité de l'opinion qui la guide et la protège, elle en arrive, sinon à refuser, du moins à discuter sa confiance et à se rendre elle-même suspecte à l'administration par les hésitations d'une majorité vacillante. Le principe de la coalition avait été, au moins en apparence, un principe de réforme. Le cabinet qui, jusqu'à la conclusion fâcheuse de la question d'Orient, eut les sympathies de la Chambre, était sorti du centre gauche. Jusqu'au dernier jour la Chambre s'est ressentie de cette origine. A travers les luttes de partis plus nombreux, plus divisés que jamais, partant plus faibles, il s'est fait dans la Chambre un travail lent, mais sûr, dont le résultat a été l'infiltration insensible dans tous les esprits des idées de réforme dépouillées de leur vétement d'intérêt variable et particulier, placées au-dessus des chances passagères de victoire ou de défaite. Admises en principe, mais ajournées dans l'application par l'administration mal assise du 12 mai, avouées hautement par le centre gauche appelé le 1er mars au pouvoir, mais retardées par la crainte de compromettre le repos intérieur, les idées de réforme ont dû peut-être, sous l'administration nouvelle, la lenteur de leurs progrès aux ambitions inquiétantes dont elles sont le prétexte et au dangereux patronage d'oppositions exagérées. Mais enfin ces progrès sont incontestables. La réforme des incompatibilités, souvent proposée, jamais admise, a été, cette fois, prise en considération et soutenue par une minorité respectable. L'adjonction des capacités a trouvé au sein de l'opinion conservatrice quelques assentiments théoriques à défaut d'appui immédiat et pratique. Enfin il semble qu'un parti nouveau, fils des idées et non des hommes, s'élève de jour en jour vers l'intérêt général, sur les ruines du sentiment personnel. S'il en était ainsi, dans cette législature de 3 ans se trouverait peut-être le germe d'un progrès véritable, et, pour n'être que transitoire, le rôle de la Chambre n'en aurait pas été moins utile.

CHAPITRE V.

EVÉNEMENTS DIVERS. - Droit de visite.

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Historique de la question. Fermeture du protocole. Commutation

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Traité de décembre 1841. de peine de Quénisset et cousorts. - Procès de presse. -Condamnation du Charivari. Le Siècle devant la Chambre des pairs. Condamnations du National et de la Mode. Conclusion du procès de Clermont. Affaire de la Gazette d'Auvergne. Mort de M. Humann. dent du chemin de fer de Versailles. · Prise de possession des îles Marquises.

Acci

"

On se rappelle que, l'année dernière, nous n'avons pu qu'indiquer, dans les derniers jours de décembre, un projet de traité relatif au droit de visite. Nous avons donc à esquisser rapidement, comme nous l'avons promis, l'histoire de cette question dont la conclusion a été un des grands événements politiques de cette année.

En 1832, sous l'impression d'une amitié nouvelle avec l'Angleterre et de théories philanthropiques plus ardentes que réfléchies, la France avait accordé à l'Angleterre un droit de visite réciproque que, depuis quatorze ans, réclamait en vain le cabinet de Londres. En 1833, l'exercice de ce droit n'avait encore été suivi d'aucun abus et n'avait donné lieu à aucune plainte : la convention fut renouvelée, et on y ajouta quelques clauses de détail.

Mais plus tard, lorsque le chiffre de nos navires marchands eut augmenté considérablement à la côte d'Afriqué, lorsque les explorations commerciales et l'abaissement des droits eurent engagé nos armateurs à venir, en plus grand nombre, prendre part aux bénéfices du commerce de troc, les abus se multiplièrent, les vexations que nos

vaisseaux marchands eurent à subir de la part des croiseurs anglais augmentèrent en raison de l'heureuse concurrence de notre commerce. En 1837, l'affaire de l'Africaine; en 1838, celles du Niger, de l'Henry; en 1839 et 1840, celles de la Noëmi-Marie, de l'Aigle, de la Fanny, du Brésilien, de l'Etna, du César, de l'Astréus, et du Marabout; en 1841, celle des Deux-Sœurs, venaient révéler au pays un état de choses inquiétant pour notre commerce, fâcheux pour l'honneur de notre pavillon.

Les circonstances d'amitié et de confiance internationales avaient au reste été profondément modifiées en 1840. Le ministère britannique, en signant le 15 juillet, à l'insu de la France, le traité qui réglait les affaires de l'Orient, avait rompu les liens de l'alliance anglo-française. Sous l'impression de cette séparation politique et des plaintes de chaque jour, encore exagérées par la presse, l'esprit national se soulevait de tous côtés contre le droit de visite et ses humiliantes conséquences.

C'est dans ces conjonctures que, dix ans après les conventions premières, la France signait, le 20 décembre 1841, non plus seulement avec l'Angleterre, mais avec la Russie, l'Autriche et la Prusse, un traité général où étaient consacrés ces principes de fraîche date, dont la Grande-Bretagne voulait faire la base d'un nouveau droit européen, et qui renchérissait encore sur les conventions premières par l'extension des zônes soumises au droit de visite.

Le cabinet de lord Melbourne avait-il, en se retirant, emporté les conséquences morales et politiques du traité du 15 juillet? c'est ce que crut le ministère français : il pensa que lord Aberdeen ne devait pas être solidaire de lord Palmerston, et qu'on pouvait conclure avec lui le traité qu'on avait refusé de signer jusqu'alors. Signer un traité commun à cinq grandes puissances lui parut sans doute une occasion favorable de faire rentrer la France dans le concert européen.

Mais la Chambre et le pays n'en jugèrent pas de même, et si, nous mettant au-dessus des passions de partì, nous devons admettre que M. Guizot, dans la discussion de l'adresse, apporta, pour la défense du traité, autant de conscience, de philanthropie vraie, que d'éloquence, au moins faut-il avouer que le parlement nous semble avoir, avec raison, préféré les intérêts sérieux et l'honneur de la France, à une question plus générale d'humanité. Le ministère n'avait vu dans le traité nouveau que le corollaire naturel des conventions de 1831 et 1833. La Chambre, aidée par les instincts du pays, y voyait une honte et un danger. Aussi, et c'est là ce qui ôte à cette manifestation parlementaire le sens étroit que voulurent lui donner les passions de parti, les centres, comme la gauche, se levèrent en masse pour un amendement auquel venait donner son nom un des partisans les plus dévoués, un des appuis les plus constants de la politique conservatrice.

En présence de cette désapprobation unanime, que devait faire le ministère ? Passer outre, c'est-à-dire, se mettre en hostilité avec la Chambre et le pays, ou manquer à ses engagements vis-à-vis des quatre puissances?

Le 20 février, l'échange des ratifications eut lieu à Lon dres entre les quatre puissances, et, à la demande du gouvernement français, le protocole resta ouvert pour la France. Le 7 novembre, le protocole était fermé, et la France restait définitivement étrangère au traité de 1841.

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Les premiers jours de cette année virent se terminer le procès de septembre. (Voy. l'Annuaire de 1841). L'entérinement par la Cour des pairs des lettres de commuta tion accordées par le roi à trois condamnés fut le dernier acte de cette longue et éternelle procédure (8 janvier). Pour deux de ces condamnés, Colombier et Brazier, la peine de mort était commuée en une détention perpé tuelle ; pour le troisième, Quénisset, en la peine de la dé portation. Comme dans tout le cours du procès, la sévérité

était plus grande pour les doctrin es excitantes, qué pour l'instrument dont elles s'étaient servi.

Sous la funeste impression de ce procès, les défiances du gouvernement avaient dû s'augmenter, et l'irritation de la presse opposante s'était accrue de toute l'indignation excitée par l'application inattendue du principe de complicité morale? Aussi l'année sera-t-elle féconde en procès de presse, dont l'issue sera toujours un châtiment sévère.

Le 8 janvier, le Charivari était déféré à la cour d'assises, sous la prévention d'outrages et de diffamation envers M. Hébert, procureur général à la cour de Paris. Dans l'article incriminé, il était dit que M. Hébert venait de récevoir la croix d'honneur comme récompense de ses services dans le procès de septembre. Il est juste de dire, que M. Hébert, chevalier de la Légion-d'Honneur depuis 8 ans, avait été nommé officier de l'ordre au mois de mai 1841, quatre mois avant le commencement du procès. L'imprimeur Lange-Levy et le gérant Marey furent condamnés, lë premier, à six mois de prison et 2,000 fr. d'amende, le second, à deux ans de prison et 4,000 fr. d'amende.

Quelques jours après, pendant la discussion de l'adresse à la Chambre des pairs (12 janvier), M. le baron de Daunant déféra à l'assemblée un article, publie par le Siècle, et demanda que le gérant de ce journal fût cité à la barre, sous la prévention d'offense envers la Chambre. La Chambre adoptă cette proposition. Le lendemain, M. Chambolle, đéputé, assumait sur lui la responsabilité de l'article, et s'en déclarait l'auteur. Mais le 18, la Chambre des pairs, sans tenir compte de cette déclaration, condamna le gérant du journal, Louis Perrée, à 10,000 fr. d'amende, maximum de l'amende', et à un mois de prison, minimum de la peine. Le 14 février, le gérant du National était condamné à úñ an de prison et 4,000 fr. d'amende, et la même peine était appliquée contradictoirement, pour reproduction du même article, au gérant de la Gazette de France.

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