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d'ailleurs signalée par aucun incident qui mérite d'être rapporté.

La position de cette ville forçait les Anglais à s'en emparer. Aussi, dès le lendemain 21 juillet, fut-elle attaquée et prise après un combat très-sérieux, le plus sérieux même que les Chinois eussent encore livré depuis le commencement de la guerre.

Nous rapportons sur cette affaire quelques détails donnés par un témoin oculaire, officier attaché à la colonne d'attaque du centre, celle qui escalada et emporta la ville :

L'attaque et la prise d'assaut de Tchin-Kiang-Fou a été le plus important comme aussi le plus sanglant combat que nous ayons encore livré en Chine. L'armée de terre a seule fait toute la besogne. Les troupes avaient été partagées en trois brigades qui devaient attaquer la ville chacune sur un point différent; et comme on ne s'attendait à aucune résistance, on n'avait point demandé aux marins de seconder nos efforts. Le bateau à vapeur l'Auckland · eut seul, de tous les bâtiments, l'honneur d'appuyer l'artillerie royale chargée de faire une brèche dans la partie de la muraille qui a vue sur le fleuve. C'était le point par lequel la colonne du centre devait s'introduire dans la place.

» Le mur qui entoure la ville est bâti en briques, haut de vingt-cinq ou trente pieds, parfaitement bien garni de bastions, d'embrasures, de traverses, etc.; il était armé de pièces de 12 et de 6, sans compter les pierriers. La partie qui avoisine la rivière, à environ deux cents pas de distance, s'élève sur un terrain difficile et très-incliné qui donne à la place une grande apparence de force. C'est sur ce point que l'Auckland et l'artillerie royale, placée sur une éminence voisine, ouvrirent leur feu vers les dix heures du matin. L'état dans lequel nous vîmes ensuite la muraille témoignait suffi-, samment de l'excellence de leur pointage. Cependant on ne leur laissa pas le temps de faire brèche. Depuis une demi-heure ils foudroyaient les remparts, qui leur ripostaient avec une extrême vivacité, lorsque les sapeurs du génie, suivis du 55e régiment de l'armée royale et de trois régiments indiens de Madras, s'avancèrent avec des échelles et forcèrent l'artillerie à cesser son feu. Les échelles furent dressées contre le mur avec une rapidité magique, et les grenadiers du 55o s'y élancèrent avec une ardeur merveilleuse sous un feu très-vif, qui nous coûta beaucoup de monde en tués et en blessés.

» Un quart d'heure après, le drapeau anglais était arboré sur la muraille. Cependant la ville n'était pas prise, et on eut fort à faire pour chasser l'én

nemi du rempart; les Tartares se battirent avec la plus grande valeur; ils chargèrent plusieurs fois nos hommes la lance ou l'épée à la main, et, c'est une justice à leur rendre, ils nous disputèrent avec acharnement chaque pouce de terrain. A la fin cependant la baïonnette anglaise triompha; mais alors en nous abandonnant la muraille ils allèrent se poster dans les maisons, d'où ils dirigèrent pendant longtemps sur nous un feu très-vif et trèsmeurtrier. On tirait sur nous de tous les côtés, sans que nous pussions voir le plus souvent d'où partaient les coups; il fallut cinq ou six heures de combat dans les rues pour que les Tartares nous cédassent la place.

» Je n'ai jamais vu un pareil massacre : nous avons perdu bon nombre d'officiers et de soldats; mais il est impossible d'estimer, même approximativement, la perte des Chinois. Quand ils ont vu qu'ils ne pouvaient pas nous résister, il y en a qui se sont mis à égorger leurs femmes et leurs enfants; d'autres qui les précipitaient dans les puits et se suicidaient ensuite. Il y a des maisons où l'on a trouvé des douzaines de cadavres, et moi-même, le lendemain de l'affaire, j'ai vu une troupe de femmes et d'enfants qui se jetaient de désespoir dans un puits. La ville et les faubourgs ne présentent plus qu'une masse de ruines; bien des rues ont été détruites par les flammes, et toute la ville a été pillée par la populace. »

Ce combat coûta aux Anglais, d'après les rapports officiels, 24 hommes tués et 115 blessés; quelques-uns avaient été frappés par l'ardeur terrible du soleil de la Chine.

Par la prise de Tchin-Kiang-Fou, Nanking se trouvait menacé. La flotte arriva en vue de cette ville le 7 août. Dans une dépêche adressée à l'empereur, le gouverneur expose ainsi la situation de Nanking:

«Il n'y a, dit-il, dans la ville que des débris d'armées déjà battues; les bonnes troupes se trouvent à Changkoo, à 500 milles de Nanking, c'est-à-dire beaucoup trop loin pour venir au secours de Nanking.

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Selon sir Hugh Gough, tout au plus se trouvait - il 9,000 hommes dans cette place, trop ouverte et trop vaste pour résister. (Dépêche de lord Stanley.)

La journée du 8 se passa en préparatifs, et le 9 on débarqua les troupes commandées par lord Saltoun sur une éminence à l'ouest de la ville. En même temps les navires prenaient leurs postes de combat. Mais ce n'était plus qu'une

simple démonstration, car les murs de la ville étaient déjà tout couverts de pavillons parlementaires. Bientôt après on vit arriver trois mandarins d'un rang élevé, qui sollicitèrent une entrevue de sir Henri Pottinger. Ils étaient autorisés par l'empereur à traiter de la paix, et ils étaient porteurs d'une lettre signée de lui, dans laquelle il disait que, vu les succès sans pareils de nos armes, et comprenant enfin qu'il lui était absolument impossible de se défendre contre nous, il était prêt à accepter toutes les conditions qui ne porteraient pas atteinte à l'honneur du Céleste empire.

Il fallut céder à la nécessité, et les négociations furent ouvertes. Le 29 août, le traité était signé : toutefois, pour ne pas enfreindre l'étiquette traditionnelle, l'empereur ne ratifiera le traité qu'après S. M. britannique (novembre).

Nous aurons à revenir plus tard sur les conditions encore peu connues de cette convention.

Les principales clauses seraient : 1o le paiement, comme indemnité, de 21 millions de dollars par le gouvernement chinois; 2° l'ouverture des ports de Canton, Amoy, Ning-Pô, au commerce anglais; 3° la cession de l'île de Hong-Kong; 4o la restitution des prisonniers; 5o la publication d'une amnistie; 6o le traitement sur le pied d'égalité des officiers des deux nations; 7° l'occupation, comme garantie, des îles de Chusan et de Kolong-Sou jusqu'à paiement intégral du tribut. Au moment où s'arrête l'histoire de cette année, l'escadre et l'armée de terre anglaises sont encore sous les murs de Nanking.

La suite des relations extérieures sur d'autres points du globe ou s'étend la puissance anglaise offre des tableaux moins sanglants; au moment de devenir sérieuses, les difficultés avec la Perse prirent une allure plus pacifique. Tout prétexte fut ôté à une lutte, les Anglais ayant enfin consenti à évacuer l'ile de Kharrack.

Un traité fut enfin conclu, auquel coopérait la Russie : les stipulations en sont exclusivement commerciales, quoi

que, dans l'avenir, les résultats puissent lui donner une grande portée politique. L'article 1er assure aux deux puissances des avantages réciproques. Les négociants de l'un et l'autre pays (Russie et Angleterre) pourront introduire en Perse toute espèce de marchandises. Ils ne paieront que les droits imposés aux nations les plus favorisées.

Le second article porte que, pour faciliter entre les deux pays les relations commerciales, la Grande-Bretagne se fera représenter à Téhéran et à Tabriz par deux agents commerciaux résidents. Celui des deux qui résidera à Tabriz aura seul le rang et les priviléges du consul. De son côté, le gouverneur persan aura aussi deux agents qui le représenteront, l'un à la résidence de Bombay, l'autre à celle de Londres. Ils jouiront des avantages et priviléges assurés aux agents anglais.

En Amérique, c'était encore d'un traité de commerce qu'il s'agissait pour l'Angleterre. En 1827, un traité avait été conclu avec le gouvernement brésilien. Ce traité de 15 ans de durée expirait en 1842, selon le gouvernement brésilien selon le gouvernement britannique, en 1844 seulement. Cette prétention, élevée déjà par lord Palmerston, fut encore soutenue cette année par sir Robert Peel (Communes, 29 avril). C'est sur cette divergence d'opinions que roulent les négociations, qui n'ont encore atteint aucun résultat. Il en fut de même pour le désir témoigné par le Royaume-Uni de se concerter avec le Brésil sur les moyens d'arriver à une répression efficace de la traite des noirs.

Cette question de la traite, compliquée des intérêts qui se cachent derrière les intentions philanthropiques, tint en éveil toute l'année la diplomatie d'Europe et d'Amérique. Le Portugal prêta plus facilement l'oreille aux propositions qui lui furent faites à ce sujet, et s'unit plus intimement encore avec l'Angleterre par un traité de navigation et de commerce. Nous donnerons ici les dispositions les plus sub

stantielles du traité, en tant qu'elles se rapportent à l'intérêt de la marine et du commerce anglais.

Après avoir stipulé, dans l'art. 1er, des droits de protection réciproque pour les sujets respectifs des parties contractantes, il est ajouté dans le même article que «< les sujets britanniques qui ne feront point le commerce en Portugal, mais qui tireront leur revenu d'une autre source, seront exempts de l'impôt connu sous le nom de maneia, ou decima industrial. »

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Autre concession non moins importante et plus inattendue: « S. M. la reine de Portugal autorise les sujets de S. M. britannique à construire des chapelles et temples dans ses domaines pour les cérémonies de leur culte, à condition que les chapelles n'auront point de clocher.

» Les sujets de S. M. britannique auront aussi la faculté d'enterrer les morts dans leurs cimetières avec les cérémonies de leur religion. Les tombeaux seront inviolables. >>

Disposition commerciale, art. 3. Il y aura liberté réciproque de commerce et de navigation..., et ils (les sujets des parties contractantes) ne paieront dans les ports, havres, villes et autres lieux, d'autres droits, taxes et impôts que ceux qui sont payés par les citoyens de la nation la plus favorisée. Quant aux marchandises importées de l'un des deux pays dans l'autre, les droits et taxes seront réciproques; il en sera de même des prohibitions, droits et restrictions, concernant l'importation de marchandises d'un pays dans l'autre ou l'exportation.

Il est convenu, en outre, qu'il ne sera accordé aux citoyens d'aucune nation étrangère des priviléges, droits et immunités de commerce ou de navigation, qu'ils ne le soient en même temps au même titre, gratuit ou onéreux, aux sujets des deux puissances parties au traité.

Le traité durera dix ans. A l'expiration, celle des deux parties qui ne le voudra plus continuer en avertira l'autre douze mois à l'avance. Comme aussi dans les cinq années,

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