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Vérité qui en est le fondement. Il est nécessaire que vous le lisiez. M. Arnauld l'a transcrit par parties trois fois dans ce chapitre, et en a toujours retranché ce qui décidait la question. Le voici, Monsieur, tout entier.

<«< Il ne faut pas s'imaginer que la volonté commande à <«<l'entendement d'une autre manière que par ses désirs et ses << mouvements; car la volonté n'a point d'autre action. Et il <«< ne faut pas croire non plus, que l'entendement obéisse à « la volonté, en produisant en lui-même les idées des choses <«< que l'âme désire; car l'entendement n'agit point: il ne fait « que recevoir la lumière, ou les idées de ces choses, par << l'union nécessaire qu'il a avec celui qui renferme tous les << êtres d'une manière intelligible, ainsi que l'on a expliqué << dans le troisième livre.

<< Voici donc tout le mystère. L'homme participe à la sou« veraine raison, et la vérité se découvre à lui, à propor«<tion qu'il s'applique à elle, et qu'il la prie. Or, le désir de «< l'âme est une prière naturelle qui est toujours exaucée; car <«< c'est une loi naturelle que les idées soient d'autant plus << présentes à l'esprit, que la volonté les désire avec plus « d'ardeur. Ainsi, pourvu que la capacité que nous avons de <«< penser, ou notre entendement, ne soit point rempli des sen<< timents confus que nous recevons à l'occasion de ce qui se «< passe dans notre corps, nous ne souhaitons jamais de pen<< ser à quelque objet, que l'idée de cet objet ne nous soit << aussitôt présente et comme l'expérience même nous l'ap<< prend, cette idée est d'autant plus présente et plus claire, <«< que notre désir est plus fort, et que les sentiments confus <«< que nous recevons par le corps sont plus faibles et moins <«< sensibles, comme je l'ai déjà dit dans la remarque pré«< cédente.

« Ainsi, quand j'ai dit que la volonté commande à l'en«tendement de lui présenter quelque objet particulier, j'ai << prétendu seulement dire que l'âme qui veut considérer << avec attention cet objet s'en approche par son désir; parce

<«< que ce désir, en conséquence des volontés efficaces de « Dieu qui sont les lois inviolables de la nature, est la cause « de la présence et de la clarté de l'idée qui représente cet << objet. >>

V. Voici maintenant la critique de M. Arnauld.

<< Mais ce qu'a trouvé cet auteur pour accorder sa doctrine sur ce point des idées avec son autre doctrine, que Dieu agit comme cause universelle, dont les volontés générales doivent être déterminées à chaque effet par les causes qu'il appelle occasionnelles, est encore plus contraire à l'expérience. Car la cause occasionnelle, qu'il a cru déterminer Dieu à nous donner chaque idée en particulier, est le désir que nous en avons. C'est ce qu'il enseigne dans le deuxième Éclaircissement sur le premier chapitre du premier livre. « Il ne faut «< pas, dit-il, s'imaginer que la volonté commande à l'enten<< dement d'une autre manière que par ses désirs et ses mou<< vements; car la volonté n'a point d'autre action. Et il ne << faut pas croire non plus que l'entendement obéisse à la << volonté, en produisant en lui-même les idées des choses «< que l'âme désire; car l'entendement n'agit point, il ne fait <«< que recevoir la lumière, ou les idées de ces choses, par «< l'union nécessaire qu'il a avec celui qui renferme tous les «< êtres d'une manière intelligible, ainsi qu'on l'a expliqué << dans le troisième livre. Voici donc tout le mystère. L'homme << participe à la souveraine raison, et la vérité se découvre à «<lui à proportion qu'il s'applique à elle et qu'il la prie. Or <«<le désir de l'âme est une prière naturelle qui est toujours « exaucée; car c'est une loi naturelle, que les idées soient << d'autant plus présentes à l'esprit que la volonté les désire « avec plus d'ardeur. »

<«< Cela serait beau, s'il était vrai. Mais l'expérience y est si contraire, que je ne puis comprendre, comment on se hasarde d'avancer de telles choses sans s'être auparavant consulté soi-même. Si on l'avait fait, on n'aurait pas manqué de reconnaitre qu'il y a bien des objets qui nous dé

plaisent, et que nous voudrions bien ne pas voir, dont les idées ne laissent pas d'ètre fort présentes à notre esprit, et que nous souffrons avec peine des représentations fâcheuses, que nous souhaiterions fort de ne point voir, bien loin de les désirer. >> RÉPONSE. VI. Vous voyez, Monsieur, de quel ton parle M. Arnauld, après m'avoir imposé à son ordinaire un sentiment extravagant et ridicule. « Je ne puis comprendre, ditil, comment on se hasarde d'avancer de telles choses, sans s'être auparavant consulté soi-même. » Mais je puis encore moins comprendre comment M. Arnauld se hasarde de m'imposer un sentiment que je n'ai pas, et que je rejette dans l'endroit même qu'il cite, par ces paroles qui suivent immédiatement celles qu'il rapporte. « Ainsi, pourvu que la capa«< cité que nous avons de penser, ou notre entendement, ne << soit point rempli par des sentiments confus que nous rece<«<vons à l'occasion de ce qui se passe dans notre corps, nous <«< ne souhaitons jamais de penser à quelque objet, que l'idée << de cet objet ne nous soit aussitôt présente; et comme l'ex<< périence même nous l'apprend, cette idée est d'autant plus << présente et plus claire que notre désir est plus fort, et que « les sentiments confus que nous recevons par le corps sont << plus faibles et moins sensibles, comme je l'ai déjà dit dans . «< la remarque précédente. » Si M. Arnauld n'entendait pas ceci, il pouvait lire la remarque précédente. Il pouvait s'éclaircir de mon sentiment en cent endroits de la Recherche de la Vérité, où je fais voir que le corps trouble l'esprit, et que les mouvements des esprits et du sang sont des causes occasionnelles, en conséquence des lois de l'union de l'âme et du corps, plus fortes et plus efficaces à cause du péché, que celles de l'union de l'esprit avec la raison universelle.

VII. Mais admirez sa conduite. Il a trouvé un passage dans lequel je dis, « que dans l'état où nous sommes, les « idées des choses ne se présentent point à notre esprit toutes <«<les fois que nous le voulons. » Que pensez-vous qu'il en

conclue? que je me contredis, Monsieur, que cela renverse ma maxime; c'est le nom qu'il donne à la sotte erreur qu'il m'attribue, en retranchant ce qui fait voir qu'il m'impose. Lisez, Monsieur, la conclusion de son chapitre. La voici :

« Je viens de trouver un passage de notre ami, que je ne vois pas comment il pourra accorder avec cette maxime des éclaircissements. »> « Nous ne souhaitons jamais de penser à « quelque objet, que l'idée de cet objet ne nous soit aussitôt « présente. »> «< Car je ne sais si l'on peut former une proposition plus directement contraire à celle-là, que celle-ci du chapitre 9 de la deuxième partie du troisième livre. »> « Il est << absolument faux dans l'état où nous sommes, que les idées <<< des choses soient présentes à notre esprit toutes les fois que «nous les voulons considérer. »

RÉPONSE. VIII. Prenez garde encore un coup que M. Arnauld tire cette maxime qu'il m'attribue, de cette proposition: « Pourvu que la capacité que nous avons de penser, ou notre entendement, ne soit point rempli des sentiments confus que nous recevons à l'occasion de ce qui se passe dans notre corps; nous ne souhaitons jamais de penser à quelque objet, que l'idée de cet objet ne nous soit aussitôt présente. » Prenez garde que, non-seulement ici, mais dans la page qui précède, il rapporte le commencement et la fin de cet endroit, en retranchant le milieu, qui lui aurait ôté le droit de m'attribuer cette maxime; et que d'abord en rapportant encore ce même passage, il s'est arrêté tout court à ce qui était essentiel pour entendre ma penséc. Que peuton juger d'un critique, qui falsifie trois fois en diverses manières, dans un même endroit, un passage de son auteur, afin de lui imposer un sentiment ridicule? un sentiment, dis-je, que l'on rejette dans le même passage, et peut-être cent fois dans tout l'ouvrage de la Recherche de la Vérité?

IX. Enfin, Monsieur, quand j'aurais oublié de mettre cette condition, «< pourvu que la capacité que nous avons de penser ne soit point remplie, etc., » dans l'endroit où je l'ai

mise, un critique équitable m'aurait-il attribué cette maxime, que je combats en cent endroits de la Recherche de la Vérité? Mais, de plus, au lieu de conclure que je me contredis par deux passages qui seraient contraires en apparence, n'aurait-il pas expliqué la proposition générale et obscure par celle qui la modifie, et qui est conforme à l'expérience qu'il doit supposer que j'ai aussi bien que les autres hommes?

En vérité, Monsieur, pourvu que M. Arnauld ait compris mes sentiments, c'est un des plus injustes critiques qui fût jamais. Voilà ma maxime, n'òtez pas la condition que je mets « Pourvu que M. Arnauld ait compris mes sentiments; » car il ne faut pas juger des intentions secrètes.

CHAPITRE XIX.

Réponse au dix-septième chapitre.

I. Ce chapitre 417 contient plusieurs passages tirés de la Recherche de la Vérité, par lesquels M. Arnauld prétend que je me contredis à mon ordinaire, et que je dis, «< tantôt qu'on voit Dieu en voyant ses ouvrages, et tantôt qu'on ne voit pas Dieu, mais ses ouvrages. » Et enfin, comme il s'imagine que mon sentiment sera odieux, et paraîtra ridicule au commun des hommes, s'il m'oblige à dire qu'on voit Dieu, il conclut ainsi son chapitre.

II. « Tant s'en faut donc que l'on puisse dire, selon la nouvelle philosophie des idées, que quand nous voyons les créatures en Dieu, ce n'est pas Dieu que nous voyons, mais seulement les créatures; qu'il faut dire absolument tout le contraire que quand nous voyons les créatures en Dieu, c'est Dieu uniquement que nous voyons, et nullement les créatures. Car si celui qui voit le soleil en Dieu, ne voyait pas Dieu, mais le soleil que Dieu a créé; ce serait le soleil matériel qu'il verrait, puisque c'est le soleil matériel que Dieu a créé. Or, selon cet auteur, celui qui regarde le soleil, ne voit point le soleil matériel, mais seulement le soleil

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