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ESSAI

SUR L'HISTOIRE

DE LA PHILOSOPHIE

EN FRANCE, AU XVII SIÈCLE

SUR L'HISTOIRE

DE LA PHILOSOPHIE

EN FRANCE, AU XVII SIÈCLE.

LIVRE PREMIER.

INTRODUCTION.

Comme je l'ai annoncé dans ma préface, cette Introduction est un rapport que j'ai été chargé de faire à l'Académie des sciences morales et politiques par la section de philosophie.

Elle est peut-être par cette raison cette raison peu convenable, pour la forme, à la composition de l'ouvrage, à la tête duquel je la place; mais, pour le fond, elle s'y rattache si naturellement que je n'ai pas hésité à l'y comprendre comme un morceau qui en marque d'abord avec quelque étendue l'intention et les vues générales; et j'ai d'autant moins hésité dans ce dessein qu'elle m'a paru comme rapport réunir des suffrages qui me permettent de la présenter avec plus de confiance au public.

J'aurai par la suite plus d'une occasion de faire

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entrer aussi dans cet Essai des parties qui ont également subi l'épreuve d'un premier jugement; le même motif me portera à les donner de nouveau sans trop de scrupules.

Voici maintenant cette Introduction en la fortne que j'ai indiquée '.

MESSIEURS,

Les sujets, que jusqu'ici vous avez cru devoir proposer pour le concours de philosophie, étaient fort difficiles, fort peu accessibles au commun des concurrents. Ce n'était pas, en effet, chose aisée à tenter que l'examen critique de la Métaphysique ou de l'Organon d'Aristote. Il y avait à ces études des obstacles de plus d'un genre, et il vous a fallu rencontrer, en France ou à l'étranger, des esprits fort instruits, fort sérieux et fort courageux, pour avoir à qui dignement décerner vos couronnes. La question du cartésianisme exigeait peut-être un peu

' Voici quel était le sujet proposé aux concurrents : 1° Exposer l'état de la philosophie avant Descartes ;

2o Déterminer le caractère de la révolution philosophique dont Des cartes est l'auteur, faire connaître la méthode, les principes et le système entier de Descartes dans toutes les parties des connaissances humaines;

3o Rechercher les conséquences et les développements de la philosophie de Descartes, non-seulement dans ses disciples avoués, tels que Regis, Robault, Delaforge, mais dans les hommes de génie qu'il a suscilés par exemple, Spinoza, Malebranche, Locke, Bayle et Leibnitz; 4° Apprécier particulièrement l'influence du système de Descartes sur celui de Spinoza et celui de Malebranche;

5° Déterminer le rôle et la place de Leibnitz dans le mouvement cartésien;

6° Apprécier la valeur intrinsèque de la révolution cartésienne, considérée dans l'ensemble de ses principes et de ses conséquences, et dans la succession des grands hommes qu'elle embrasse, depuis l'apparition du discours de la Méthode, en 1637, jusqu'au commencement du xvin siècle et à la mort de Leibnitz; rechercher quelle est la part d'erreurs que renferme le cartésianisme, et surtout quelle est la part de vérités qu'il a léguée à la postérité.

moins; et surtout quant à la langue, quant aux sources et à l'histoire, elle offrait certainement beaucoup moins de difficultés.

Cependant ce n'était pas non plus une tâche médiocre à remplir, et pour s'en acquitter habilement, il fallait à coup sûr plus d'un rare mérite; car, d'une part, si les monuments se laissent sans peine aborder, de l'autre, ils portent des noms, et présentent des systèmes, qui sont les plus imposants et les plus considérables des temps modernes. On n'a pas à étudier, à comprendre et à juger des hommes tels que Descartes, Spinoza, Malebranche, Locke et Leibnitz, renouvelant ou fécondant avec puissance la philosophie, et l'appliquant à la fois avec originalité et régularité à tous les grands problèmes de Dieu, de l'âme et du monde, sans un sérieux travail d'intelligence et de méditation, de critique et de doctrine, sans le double talent d'interprète pénétrant et de penseur profond et libre. Et puis, comme autour de ces maîtres, de celui surtout qui les inspire et les devance tous, se groupent un certain nombre d'esprits, moins élevés, sans doute, mais cependant encore, à divers titres, remarquables, n'est-il pas nécessaire, pour être juste envers tous et n'en négliger aucun, de pouvoir, au moyen d'une littérature philosophique étendue et variée, tenir compte à chacun d'eux de son utile coopération au grand mouvement d'idées auquel il a pris part?

Enfin un vif intérêt s'attache à l'examen de la philosophie cartésienne. Soit de près, soit de loin, nous procédons tous de Déscartes, nous sommes tous de son sang; de lui à nous il y a filiation. Or, reconnaître avec soin, discernement et lumière, toute

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