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à tous les Juifs, était l'annonce de cette purification inté rieure et spirituelle dont la nation entière avait besoin, pour entrer sérieusement dans le royaume du Messie, BaπTIOμÒS μετάνοιας.

Jean annonçait le royaume du Messie, non, selon l'attente de la masse du peuple, comme un royaume temporel, mais comme une institution morale et religieuse. Sans égard à la filiation charnelle des enfants d'Abraham, c'était à ceux qui changeraient de mœurs qu'il promettait la participation au royaume du ciel. N'allez pas dire, s'écriait-il, Nous avons Abraham pour père; car je vous déclare que Dieu peut faire naître de ces pierres mêmes des enfants d'Abraham 1. Quelque étonnant que cela parût aux Juifs d'alors, la mission divine dont était chargé le Précurseur, et qu'il prouvait par la vertu et la vérité de sa parole, lui donna une influence merveilleuse et qui se répandit bien au loin. Son humilité en était d'autant plus grande; elle lui faisait rejeter toute louange, toute estime de son mérite. Il n'en était que plus ardent à désigner au peuple celui qui devait baptiser après lui dans le feu et dans le Saint-Esprit, et dont il se déclarait indigne de délier les cordons de souliers '. Mais Jésus vint lui-même au Jourdain pour être baptisé, et alors Jean, éclairé par un miracle subit, le reconnut et le proclama comme le Messie : car une voix du ciel vint au nom du Père reconnaître son Fils bien aimé, et l'Esprit saint planant sur lui, sous la forme gracieuse d'une colombe, la Trinité divine se manifesta tout entière au Jourdain ! « Désormais, dit Jean, il faut que Jésus croisse et que je diminue. » Ainsi s'éclipse l'étoile du matin devant le soleil levant. Représen

tres ont prétendu, dans leurs Comm. sur S. Matth. III, 6, que ce baptême de saint Jean était une imitation du baptème des prosélytes juifs. Plus récemment on a élevé des doutes sur cette haute antiquité du baptême des prosélytes. Voy. Reiche, de Baptismatis orig. et necessit. necnon de formula baptismatis. Goett., 1816. Schneckenburger, de l'Antiquité du baptême des prosélytes chez les Juifs. Berlin, 1828.

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(1) Matth. III, 9-10. (2) Matth. III, 11; Luc, III, 16.

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(3) Jean, 1, 27.-(4) Matth. III, 13-17; Jean, 1, 33.-(5) Jean, III, 30.

tant de la justice divine, Jean ne fait point acception de personnes : « Race de vipères, dit-il aux sadducéens, aux doctes et hypocrites pharisiens, qui vous a appris à fuir la colère qui vous menace1?» et au tétrarque Hérode : « Il ne vous est point permis de garder Hérodiade, la femme de votre frère2. » Jean est une lampe ardente qui brille dans les té– nèbres de ce monde; beaucoup se sont réjouis à la clarté de sa lumière, mais ils ne changent ni d'esprit ni de mœurs 3. Jean n'est pas un roseau qu'agite le vent: il ne change point avec les caprices d'un peuple mobile et de ses représentants. Jean est le plus grand d'entre ceux qui sont nés de la femme: c'est le Christ lui-même qui le déclare ". Il est prophète et plus qu'un prophète, car ce n'est pas dans un avenir incertain qu'il promet aux hommes un sort meilleur : il annonce le royaume de Dieu qui est proche, qui est arrivé, et cependant celui qui est le plus petit dans le royaume des cieux est plus grand que le plus grand des prophètes'.

Mais son ministère public va cesser, car Hérode l'envoie captif dans les prisons de Machorus, et l'y fait mourir, pour satisfaire la passion et la vengeance d'Hérodiade irritée, au rapport des Évangiles; par crainte de la considération que Jean avait acquise auprès du peuple, selon l'historien Josèphe '. Le dernier regard de Jean sur la terre fut sans doute son premier regard dans le ciel, car il avait l'œil de la foi et n'avait cessé de le diriger vers Celui qui était devant lui. Ses disciples l'ensevelirent, et, fidèles à leur maître, vinrent an

(1) Matth. III, 7.(2) Matth. XIV, 4.- (3) Jean, V, 35.- (4) Matth. XI, 11. (5) Matth. XI, 9.

(6) C'est ce que l'Église exprime dans l'hymne de saint Jean-Baptiste, au jour de sa nativité :

Cæteri (sc. propheta) tantum cecinere vatum

Corde præsago jubar affuturum :

Tu quidem mundi scelus auferentem

Indice prodis.

(7) Matth. II, 11.

(8) Flav. Joseph. Antiq. XVIII, 5,

2.

(9) Matth. XXI, 23-27. Cf. Mare, XI, 27-33; Luc, XX, 1-7.

noncer sa mort à Jésus; mais, quoique Jean eût si souvent, si clairement désigné Celui qui est la vérité même, l'Agneau de Dieu, beaucoup d'entre eux méconnurent la vérité et s'éloignèrent du Sauveur : ils restèrent disciples de Jean. Ainsi, dans la nature, les degrés que traverse une existence subsistent, alors même qu'elle a atteint l'apogée de son développement.

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Après le baptême de Jean, qui avait, pour ainsi dire, inauguré la mission du Messie, Jésus se retira dans un lieu désert. Là, comme jadis Moïse sur le mont Sinaï, il resta quarante jours, luttant victorieusement contre le prince du mal, qui le tenta, comme tous les hommes, parce que le Christ devait être en tout semblable à ses frères. Alors seulement il se mit à enseigner publiquement le peuple, ainsi que l'aurait fait un rabbin de la synagogue, passant aux yeux de la multitude pour fils de Joseph'. Ses premières paroles furent comme celles de Jean: «< Faites pénitence . » Mais bientôt, dévoilant plus longuement aux Juifs le mystère de sa mission divine: « Je suis venu, dit-il, pour accomplir la loi, pour la purifier, l'éclaircir, la développer ; » et comme Jean il laissa ses disciples administrer au peuple le baptême de la pénitence'. Mais, de son côté, le peuple devait se sanctifier par la pureté du cœur et de l'intention; la vue de Dieu devait être sa récompense, et cette récompense toute spirituelle faisait un singulier contraste avec ses superbes et mondaines espérances du Messie. C'était dans les paroles et les actions du Christ une merveilleuse activité dont le but sublime planait toujours devant son âme. Et ce but, c'est-à-dire l'établissement d'un royaume céleste et purement spirituel, fut

(1) Jean, I, 29, 36.—(2) Jean, III, 26; Luc, V, 33; Matth. IX, 14; XI, 2; Act. XVIII, 25; XIX, 2-7.- (3) Matth. IV, 1-11. (4) Hébr. II, 18; IV, 15. — (5) Luc, III, 23. (6) Matth. IV, 17. — (7) Matth. V-VII.

-(8) Matth. V, 17.- (9) Jean, III, 26.

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si clairement indiqué par toutes ses paroles, dès le principe, qu'il est impossible de trouver, dans aucun des Évangiles, la moindre trace du moment où il aurait substitué ce royaume spirituel à une royauté terrestre, qu'il aurait eue d'abord en vue. Jamais Jésus ne partagea l'opinion de ses contemporains sur le pouvoir temporel du Messie attendu, et sa grandeur consiste en partie en ce qu'il s'éleva, dès l'abord, au-dessus de ces imaginations indignes des siècles passés et des temps à venir. La grande et unique pensée de toute sa vie fut de réunir toute l'humanité en une société religieuse et morale, dans laquelle chacun pût, à l'aide de Dieu et sous la direction de sa providence, être par Jésus délivré du péché, réconcilié avec Dieu, sanctifié de plus en plus, et par là même participer à une félicité toujours croissante; jamais les expressions simples et populaires dont il se servit pour représenter son royaume, ne démentirent cette tendance de toute sa vie à l'établissement d'un royaume spirituel, en même temps qu'universel. C'est toujours et partout dans ce sens qu'il parle, de la manière la plus claire et la plus explicite. Tel est aussi le caractère et le principe tout spirituel de sa religion; tel est le sens de toutes les prophéties qui ont rapport au Messie et qui comprennent l'humanité tout entière, vrai peuple du Christ, dont le royaume devait commencer, il est vrai, parmi les Juifs, pour s'étendre de là sur toutes les nations païennes'.

§ 38. La doctrine divine de Jésus.

La doctrine de Jésus était parfaitement conforme au plan que nous venons d'indiquer. C'était avec une insistance particulière qu'il annonçait l'unité de Dieu, Père de tous les hommes, et les pratiques qu'il institua, si peu nombreuses, et en rapport si intime avec l'essence de sa religion, ne renfer

(1) Matth. XIX, 28; Luc, XXII, 30; Marc, VII, 27. (2) Jean, X, 16; Matth. XXVIII, 19.—(3) Matth. XV, 24. Cf. XXVIII, 19.

maient rien qui fût purement local, temporaire ou national. Elles pouvaient être observées partout, et devaient peu à peu remplacer la loi mosaïque, que, sans la combattre ouverte ment, il tendait à élargir, à purifier, et à transformer en l'adoration en esprit et en vérité1. Les principes de sa doctrine, aussi anciens que l'esprit humain, prenaient naturellement, dans leur expression parabolique, une forme éminem→ ment populaire et s'appropriaient ainsi à tous les degrés d'intelligence; aussi firent-elles, dès le principe, une profonde impression sur le peuple, qui, dans son étonnement et sa joie, disait : « Celui-ci enseigne comme ayant autorité, et non comme les scribes et les pharisiens 2. » Cette impression deve→ nait de plus en plus puissante, à mesure que Jésus parlait et agissait au milieu du peuple; car, pour atteindre le but définitif de sa mission, le retour de l'humanité déchue vers Dieu, il montrait sans cesse ce Dieu offensé comme le Père de l'amour, prévenant le pécheur et pardonnant au repentir, s'abaissant vers lui dans la personne de son Fils unique 3, réalisation vivante et sensible de la parole et du fait, de l'idée et de l'actualité. Jésus avait dit : «< Tout pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre ; » et il prouvait la vérité de cette parole en dominant les forces de la nature, en ressuscitant les morts, en guérissant subitement les aveugles, les sourds, les paralytiques, les infirmes de tout genre', en pardonnant, en remettant les péchés. Jésus avait enseigné la résurrection et la vie éternelle; il devait confirmer cette doctrine par sa propre résurrection. Ainsi, et tel était le caractère spécial de son enseignement, Jésus faisait ce qu'il disait, il réalisait ses pensées par ses actions, comme, dans l'origine des choses, le Verbe tout-puissant et créateur avait dit : « Que la lumière soit, et la lumière fut. » Ainsi, toujours confirmée par le fait, sa doctrine était à la portée de tous les esprits non prévenus, et pour ceux qui se fermaient à la vérité de sa pa

(1) Matth. V, 17; Jean, IV, 21 sq. (4) Matth. XXVIII, 18.

III, 16.

(2) Matth. VII, 28, 29.- (3) Jean, (5) Matth. IV, 23.

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