Immagini della pagina
PDF
ePub

>> Voltaire ne se serait pas flatté de se traduire lui-même, aussi bien que M. l'abbé Des» fontaines l'a traduit (à quelques inadver>>>tances près). Mais il a considéré que cet Essai » est plutôt un simple exposé des poëmes épi» ques anciens et modernes, qu'une disserta

» tion bien utile sur cet art. »

Ce fut durant son séjour, en 1715, chez M. de Caumartin (e), à sa terre de Saint-Ange, que Voltaire prit l'idée de la Henriade, dans ses conversations avec cet ancien magistrat. Celui-ci avoit beaucoup fréquenté, étant jeune, des vieillards qui s'étoient plu à l'entretenir des belles actions du bon roi, et lui-même aimoit à les raconter. On peut s'imaginer l'attention du jeune poète et l'enthousiasme qu'il éprouvoit. Cependant, distrait par les plaisirs de la société, il ne travailla que fort peu cette époque; mais deux ans après, ayant été renfermé à la Bastille (ƒ), à l'âge de 23 ans, il se livra tout entier à son poëme.

à

(e) Louis-Urbain Lefevre de Caumartin, né en 1653, fut successivement conseiller au parlement, maître des requêtes, intendant des finances et conseiller d'état. Il mourut en 1720.

(f)Voltaire, qui ne portoit encore que le nom d'Arouet,

On a dit que, privé des moyens d'écrire, il avoit tracé, à l'aide d'une épingle, une partie de ses vers sur les murs et les vitres de sa prison. Quand il en sortit il avoit, assure-t-on, composé les six premiers chants dont il n'a conservé que le second, celui où se trouve le récit de la Saint-Barthélemi. Le premier et tous les autres ont été refaits depuis. Lorsque l'ouvrage parut en 1723, sous le titre de La Ligue, il ne contenoit que neuf chants au lieu des dix qu'il présente aujourd'hui. Cette addition parut, pour la première fois, en 1728. Lelecteur sera peut-être curieux de connoître les moyens que l'auteur a employés pour étendre son poëme.

Le premier et le deuxième chants sont, pour le sujet, absolument les mêmes que dans l'édition de 1723; le troisième n'offre de différence que dans quelques vers; le quatrième, semblable par le plan, diffère beaucoup par les détails, notamment depuis le seizième vers jusqu'au cent dix-huitième. Dans l'édition de 1723, c'est Mayenne et non d'Aumale qui commande l'armée parisienne, et qui est obligé

fut mis pour la première fois à la Bastille, le 16 mai 1717; et, pour la deuxième fois, au mois d'avril 1726.

de rentrer dans la ville au retour de Henri. Le cinquième chant est semblable pour le sujet et la plupart des détails; il commence, dans l'édition de 1723, par l'arrivée de l'armée angloise commandée par Essex. Après la prière mise dans la bouche de l'assassin de Henri III, douze vers seulement sont employés à décrire le monstre qui sort des enfers aux cris de la Discorde, et qui n'est désigné par aucun nom. C'est depuis qu'il a été appelé le fanatisme, et que trente vers ont été consacrés à parler des Ammonites, du sacrifice d'Iphigénie, des persécutions des chrétiens à Rome et de l'inquisition. Les trente derniers vers qu'on lit aujourd'hui dans le cinquième chant, . en ont remplacé douze de réflexions sur la joie insensée du peuple à la nouvelle de la mort du roi.

Le sixième chant étoit d'abord employé à décrire l'apparition de Saint Louis et tous les détails qui font aujourd'hui la matière du septième. Ce sixième chant finissoit par les seize vers qui terminent le septième. L'assemblée des états de la ligue, après la mort de Henri III, et l'assaut livré par Henri IV à la ville de Paris, qu'on lit au sixième chant, composoient en grande partie le neuvième.

Le septième chant s'ouvroit par les action's

de grâces que Paris rendoit au ciel de la mort de Valois, et par l'arrivée du comte d'Egmont; ensuite, comme dans le huitième d'aujourd'hui, se trouvoit la bataille d'Ivry. Ces deux chants ne different que par des détails ajoutés dans le nouveau.

Le huitième chant de la première édition, est le neuvième de celle d'aujourd'hui, qui n'offre d'autre différence que d'heureuses additions dans les détails.

[ocr errors]

Le neuvième chant de l'édition de 1723 est composé de l'assemblée des ligueurs, qui se trouve aujourd'hui dans le chant sixième; au lieu de Potier, c'est d'Aubrai qui y harangue l'assemblée. Celle-ci est également troublée par l'arrivée de Henri à la tête de son armée. C'est dans ce neuvième chant que se lit la description de la famine, qui a été reportée dans le dixième, enrichi du combat de d'Aumale avec Turenne. La fin de l'ouvrage, aux détails près, est la même qu'aujourd'hui.

En 1736, Voltaire résolut de mettre la dernière main à son poëme, comme on peut le voir par sa lettre à Thiriot, du 13 janvier de la même année. « Je m'occupe actuel>> lement, y dit-il, de mettre la dernière main » à notre Henriade; mes tragédies et mes au» tres ouvrages ont bien l'air d'être peu de

» choses, je voudrais qu'au moins la Henriade » pût aller à la postérité. » C'étoit alors sa vingtième édition, suivant la lettre qu'il écrivit à Berger pour lui annoncer son singulier traité avec Prault (g). Ce fut aussi en 1736 que l'auteur de la Henriade conçut un projet dont l'importance des frais le détourna: il consistoit à faire exécuter en tapisseries, à Beauvais, les principaux traits de son poëme (h).

Cette édition a été collationnée avec tout le soin possible sur un grand nombre d'autres, notamment sur celles de 1757 et de 1768, publiées par les frères Cramer sous les yeux de l'auteur. On sait que cette dernière est la plus estimée. J'y ai cependant reconnu plusieurs fautes importantes; entre autres on y lit au quatre cent vingt-neuvième vers du dixième chant : ce sont eux dont la main ont livré l'Italie ; il faut a livré; cette faute se trouve également dans l'édition de 1757.

On n'a pris des notes historiques sur la Henriade, données par l'abbé Lenglet, que celles qui ont paru nécessaires pour l'intelligence de l'ouvrage..

(g) Vie politique, littéraire et morale de Voltaire, page 49 de la première édition, et 47 de la seconde..

(h) Même Vie de Voltaire, page 43 de la 2 édition.

« IndietroContinua »