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d'histoire du droit criminel, hors duquel, on peut l'affirmer (et l'exemple de M. Geib est là pour le prouver), on ne fera qu'une œuvre imparfaite, quels que soient l'esprit et le travail de l'auteur. Il en a dit plus en six lignes que l'auteur allemand en un volume.

« Je me trouve fort, dit-il, dans mes maximes, « lorsque j'ai pour moi les Romains, et je crois que « les peines tiennent à la nature de gouvernement, lorsque je vois ce grand peuple changer à cet égard de <«<lois civiles (il entend par ce mot les lois criminelles), «< à mesure qu'il changeait de lois politiques (4). »

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Ces paroles de Montesquieu pourraient servir d'épigraphe à mon livre. L'histoire de la constitution, qui est à peine effleurée dans l'ouvrage de M. Geib, tient une grande place dans le mien; car je pense que l'histoire du droit criminel ne signifie rien dès qu'on l'isole de l'histoire politique. C'est par ce côté, je l'espère, que mon livre aura quelque mérite; car, pour ce qui est de la procédure, je reconnais que M. Geib a laissé peu de choses à faire, et je n'ai pas la prétention de rivaliser de science avec lui.

Pour étudier et décrire les révolutions de la constitution romaine, j'ai lu les écrivains les plus modernes, sans laisser de côté Sigonius et Beaufort, deux auteurs qui pour la sagesse et le bon sens n'ont pas encore été surpassés. J'ai consulté, mais avec mesure, Walter (2), Rubino (3), Goet

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(1) De l'Esprit des Lois, liv. vi, ch. 15.

(2) Je n'ai pu profiter de la seconde édition de M. Walter, dans laquelle il semble s'être heureusement soustrait à l'influence des idées de Niebuhr.

(3) Untersuchurgen uber Romische Verfassung und Ges

tling (1), Puchta (2), qui tous plus ou moins fascinés par Niebuhr, ou comme Goettling, désireux de rivaliser avec lui, se sont jeté dans le champ infini des hypothèses. Le livre de Peter (3), avec des prétentions moins grandes, et surtout l'excellente histoire de Drumann (4), m'ont beaucoup plus servi.

Enfin, je n'ai considéré la lecture des écrivains modernes que comme une préparation ou une aide pour faciliter l'intelligence des anciens; et j'ai lu plusieurs fois, et le crayon à la main, les classiques dans lesquels j'espérais trouver quelques lumières. Leur valeur est fort diverse, suivant la date du livre, et

chichte; Cassel, 1839. Il y a dans ce livre une science et une érudition très-remarquables.

(1) Geschichte der Romischen Staatsverfassung von Erbauung der Stadt bis zu C. Cesars Tod; Halle, 1840.

(2) Geschichte des Rechts bey dem Romischen Volk, dans le tome Ier des Institutions; Leipsig, 1841. La première partie de ce livre, écrit avec une certaine prétention, est curieuse comme exemple de la fascination qu'un homme peut exercer sur un génie moins ferme que le sien. Pour M. Puchta, tout ce qu'a dit Niebuhr est une vérité mathématique, dont il tire les corollaires avec une rigueur toute scientifique. Il arrive ainsi à des résultats singuliers, et nous fait une histoire des premiers temps de Rome qui eût fort étonné Tite- Live. Sorti de l'époque sur laquelle Niebuhr a écrit, M. Puchta redevient lui-même et dit d'excellentes choses. Parmi les meilleures pages de son livre, je citerai celles qu'il a écrites sur la constitution impériale ; j'en retrancherais seulement quelques épigrammes contre la constitution française, qui sont déplacées partout, et à Berlin plus qu'ailleurs.

(3) Die Epochen der Verfassungs geschichte der Romischen Republik; Leipsig, 1841.

(4) Geschichte Roms in seinem Uebergange von der republikanischen zur monarchischen Verfassung; Koenigsberg, 1834-44,

6 vol. in-8°.

il est incroyable avec quelle rapidité les institutions de la république ont été oubliées sous l'empire.

Parmi les écrivains qui ont vu la république, Salluste, Tite-Live et Cicéron tiennent le premier rang, César est de moins de ressource; dans son histoire de la guerre civile il a laissé dans l'ombre (et pour cause) cette constitution qu'il avait renversée. Salluste est admirable; dans ses écrits la république est vivante : on voit en mouvement la noblesse, les tribuns, le peuple, le sénat; chaque mot porte, et les jugements de l'auteur sont irréprochables. Tite-Live, dont Niebuhr a voulu faire une espèce de Varillas, nous donne, sur la constitution romaine et l'organisation judiciaire, des notions parfaites, et il s'en faut de beaucoup que l'éloquence de l'écrivain fasse tort à son exactitude. Malheureusement les fragments de Tite-Live s'arrêtent au vir siècle, et nous laissent au moment où la lutte va s'engager. L'histoire de Polybe finit à peu près au même point. Polybe nous donne peu de renseignements sur le droit criminel, mais pour l'organisation intérieure de la république, quelles pages, chez les anciens comme chez les modernes, sont à comparer à son examen de la constitution romaine? (1)

Pour les querelles judiciaires du vII° siècle, Cicéron est la source principale; et il y a dans ses œuvres une grande abondance de renseignements; mais c'est un auteur qu'il faut employer avec ménagement, et en se tenant toujours en garde contre les illusions de son génie. Cicéron est avocat avant tout,

et dès

que

(1) Livre vi, 11 et suiv.

b

comparer

sa cause l'exige, il change d'opinion avec une déplorable facilité. Suivant qu'il parle au peuple, au sénat, ou aux juges, tour à tour il encense et maudit les Gracques ou Sylla, le parti de la noblesse ou le parti populaire. Rien néanmoins ne peut remplacer Cicéron qui avait fait une sérieuse étude de l'ancienne constitution, et qui, mêlé aux affaires de l'État et aux jugements, nous a conservé dans ses plaidoyers, nonseulement d'admirables pièces d'éloquence, mais des richesses historiques auxquelles rien n'est à pour qui veut étudier l'histoire politique de Rome. Toutefois il est bon de joindre à la lecture de Cicéron celle d'Appien (1), auteur exact et véridique; quoiqu'il ait écrit longtemps après les événements, Appien a suivi avec une grande fidélité les monuments et les mémoires de l'époque, ainsi qu'on en peut juger par la précision et la netteté de son langage; il appartient en outre à cette classe d'historiens politiques qui sont la gloire de la Grèce, tels que Thucydide et Polybe, et ses réflexions judicieuses et quelquefois profondes font de cet auteur une des lectures les plus sérieuses et les plus profitables sur la constitution romaine. Il faut ajouter aussi à la lecture de Cicéron, les scoliastes, qui nous donnent quelquefois de bons renseignements sur des faits et des institutions peu connues; Asconius est précieux, le Pseudo-Asconius n'est pas sans valeur, non plus que le scoliaste de Bobbio; celui qui porte le nom de Gronovius a peu d'importance.

En contrôlant Cicéron par lui-même, par Appien,

(1) Sur Appien, voyez l'appréciation juste, mais peut-être trop sévère, de M. Egger, Examen des historiens d'Auguste, ch. VII,

sect. 3.

par les scoliastes, on peut retirer d'excellents fruits de la lecture du grand orateur, et obtenir des conclusions toutes nouvelles ; car jusqu'à ce jour, ceux qui ont écrit l'histoire (j'excepte Drumann), sont trop restés sous l'empire de l'éloquence et du génie de Cicéron.

Des écrivains grecs et romains qui ont écrit dans les premiers siècles de l'empire, Velleius et Florus ne sont pas sans intérêt. Velleius conserve encore la tradition, et sa langue est presque la langue républicaine. Florus semble avoir résumé quelque auteur plus ancien que lui; il a certains passages importants, notamment ceux qui nous montrent le parti de Marius, et plus tard Livius Drusus reprenant les lois des Gracques. Valère Maxime, auteur médiocre, est intéressant par les exemples de jugements qu'il nous a conservés, quoiqu'il n'expose pas toujours les faits avec la précision convenable; Pline l'ancien a quelques passages, Sénèque est peu de chose, Quintilien donne moins qu'on ne devrait attendre du titre de son ouvrage; quant aux poëtes, ils sont par nature ennemis de la chicane et souvent de la politique. Parmi les Grecs, Denys d'Halicarnasse est un rhéteur sur lequel il est dangereux de se fier, car dans son livre le roman tient autant de place que l'histoire; Plutarque est un ingénieux moraliste, un biographe plein de naïveté et de finesse, mais fort peu soucieux de l'exactitude plus ou moins grande de son récit (1); Suétone,

(1) Sur Plutarque, voyez le spirituel jugement d'Egger, p. 229 et suiv.

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