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rôle le plus important dans la protection des lettres au meilleur temps d'Auguste. Les fragments qui nous en restent sont si peu nombreux et si peu importants qu'il ne nous est même pas permis de savoir exactement la nature et l'étendue des matières traitées par lui.

Ses discours n'ont pas dû être nombreux. Il ne pouvait guère avoir occasion de parler dans l'assemblée du Sénat puisqu'il n'avait jamais consenti à être créé sénateur, Devant le peuple il fut évidemment obligé de prendre la parole plusieurs fois lorsque, chargé d'administrer Rome en l'absence d'Auguste, il eut à apaiser certains troubles. Mais il ne se plaisait pas à pérorer; il avait plutôt la réputation d'un taciturne; son élément était la négociation et vraisemblablement, dans les difficultés de politique intérieure, il devait mieux aimer s'aboucher avec les meneurs du Forum et exercer sur eux une action particulière que monter souvent à la tribune aux harangues. Pour la même raison, après qu'il eut paru au barreau, comme tous les jeunes gens instruits, pour parfaire son éducation oratoire, il ne s'y chargea plus ensuite d'aucune cause. Il y accompagnait Auguste, mais sans rôle actif. Il le suivait aussi dans ses visites aux écoles de déclamation; et là, comme il pouvait faire montre de bel esprit et étaler les raffinements de langage qu'il affectait, sans doute il ne gardait pas obstinément le silence; on suppose que les expressions que nous venons de voir relever par Quintilien comme hyperbates vicieuses, proviennent de ces petits discours faits peut-être dans l'intention de provoquer ou d'embarrasser les savants rhéteurs auxquels il s'adressait'.

En prose, Mécène avait écrit des Dialogues, un Banquet (Symposium) et des Mémoires historiques.

Des Dialogues nous n'avons qu'un rappel du grammairien Charisius qui, à propos du mot volueris, donne les deux formes du génitif au pluriel, volucrium et volucrum, qu'il trouve, dit-il, l'une dans Cicéron et l'autre dans le second

(1) Cf. Bähr, Röm. Litt. Gesch., p. 487, éd. 2.

dialogue de Mécène1. » Peut-être aussi est-ce cet ouvrage que Pline entend désigner lorsqu'il porte Mécène au nombre des auteurs qu'il a consultés pour les livres xxxn et xxxvn de son Histoire naturelle.

Du Banquet nous ne possédons qu'un seul fragment que nous a conservé Servius et qui a rapport aux propriétés agréables du vin. « Dans le Symposium, où figuraient Virgile et Horace, constate le commentateur de l'Enéide. Mécène fait dire à Messala : le vin donne plus de vivacitė aux yeux, rend toutes choses plus belles et rappelle les charmes de la douce jeunesse :

Vinum ministrat faciles oculos, pulchriora reddit omnia, et dulcis juventæ reducit bona 2.

L'existence de ses Mémoires historiques ou de quelque écrit du même genre auquel on donne d'ordinaire le titre de Res gesta Augusti, nous est attestée non seulement par le passage de Pline que j'ai déjà cité à l'occasion des ouvrages d'Agrippa, mais aussi par Servius, dans son commentaire des Géorgiques, et par ces vers d'Horace :

... Tuque pedestribus

Dices historiis prælia Cæsaris,

Mæcenas, melius, ductaque per vias
Regum colla minacium.

Carm., II, 12, v. 13-16.

Toi-même, dans la prose de tes histoires, tu diras mieux que moi, ó Mécène, les combats de César et les rois menaçants qu'il a traînés enchaînés à travers nos rues.

(1) Inst. gramm., I, sub fin., p, 119, éd. Putsch. Quelques commentateurs rattachent à un dixième dialogue la citation faite par le même Charisius (Inst. gr., I, p. 60 sqq.) à propos du mot catinus employé au masculin: « Catinus masculo genere dicitur : ut Mæcenas in decimo : Jugeribus fumans calido cum farre catinus. >>

(2) Serv., ad En., VIII, 310.

(3) P. 110, note 4.

4) Serv., ad Georg., 11, 42.

Certains voudraient également en voir un rappel dans un second passage de Pline, celui où se trouve rapportée la jolie mais invraisemblable anecdote de l'enfant de Baïes, transporté chaque jour à son école de Pouzzoles par un dauphin complaisant. Mais voici la traduction exacte des paroles de Pline « Je n'oserais mentionner ce fait, s'il n'avait été raconté dans les écrits de Mécène, de Fabianus, d'Alfius et de beaucoup d'autres. » En s'appuyant sur l'autorité de Mécène, l'auteur ne cite donc pas d'une manière précise ses Mémoires et la nature du fait en question conviendrait tout aussi bien, mieux même à un développement d'une de ses œuvres poétiques qu'à ses Res gestæ. Je serais d'autant plus porté à entendre dans ce sens la mention de Pline, qu'auprès du nom de Mécène il cite Alfius dont les grammairiens nons ont conservé quelques fragments d'anecdotes en vers 2.

Comme vers, Mécène passe pour avoir laissé des tragédies, un poème didactique et des poésies diverses.

Les deux tragédies qu'on a coutume de lui attribuer auraient eu pour titres l'une; Prometheus, l'autre Octavia. Mais l'accord n'est pas unanime il en est qui doutent qu'il ait pu prendre le ton tragique et qui sous ces deux titres supposent des poèmes d'un genre différent 3.

Du poème didactique, intitulé De cultu suo, quel était au juste le sujet? L'auteur y traitait-il seulement de sa toilette ou de toute sa manière de vivre? Y faisait-il la description des magnifiques jardins qu'il avait créés sur l'Esquilin, dans la partie autrefois la plus déserte, la plus sauvage de la ville? Et, dans ce dernier cas, en nous appuyant sur les encouragements donnés par lui à la culture des jardins comme des champs, en cherchant à nous appuyer aussi sur cette invocation que lui adresse le poète des Géorgiques au moment de parler des soins à donner aux arbres fruitiers,

(1) Plin., Hist. nat., IX, 8.

(2) Cf. Egger, Examen des hist. d'Aug., p. 83. (3) Cf. Frandsen, p. 124.

Tuque ades inceptumque una decurre laborem', faudrait-il croire que le De cultu suo était un ouvrage précurseur du livre que Columelle a intitulé De cultu hortorum. La question a été longuement et vivement discutée; mais les dissertations et les commentaires d'Andréas Ravinus, de Wernsdorf, de Ruhkopf, de Blackwell, de Fickert, de Frandsen et de Lion ne l'ont guère résolue. Et pourquoi d'ailleurs s'attacher plus longtemps à la résoudre puisque nous n'avons de l'œuvre entière que les quelques phrases sans intérêt conservées par Sénèque dans la critique citée ci-dessus ?

Quant aux poésies diverses, nous en possédons quelques fragments plus importants et meilleurs. Tel est celui que donne l'Anthologie et dont le ton rappelle les vers adressés par Catulle à la déesse Cybèle ;

2

Ades huc, ades Cybele, Dea montigena Dea 3,

Age tympano sonanti quate flexibile caput :

Latus horreat flagello, comitum chorus ululet.

Viens à nous, viens, Cybèle. déesse, déesse des montagnes, au son retentissant du tambour agite vivement ta tête; que les flancs frémissent sous le fouet, que ceux qui te font cortège poussent en chœur leurs hurlements.

Il y en a deux qui sont des témoignages de sa profonde amitié pour Horace. Voici le premier dont la fin fait allusion à un proverbe romain:

Ni te visceribus meis, Horati,

Plus jam diligo, tu tuum sodalem

Ninnio videas strigosiorem.

(4) Georg., 11, 39.

(2) Burmann, Anthol. vet. lat. epigr. et poem., epig. 53.

(3) Barth. (Adversar., XVII, 3) veut lire montirega au lieu de montigena; d'autres lisent fera montium dea ou bien encore Dea, montium age Dea.

(4) Burm., id. epigr. 225. Lindenbroy, comme Burmann et Gronovius, donne au mot ninnio ou ninno, ginno, hinno, le sens de cheval ou de mulet chétif.

Si je ne t'aime plus que mes entrailles, Horace, je veux bien que tu me voies, moi, ton ami, plus sec qu'une haridelle.

L'autre, d'après Walckenaer1, aurait été écrit dans une grave circonstance: Horace, étant malade et craignant de mourir, aurait envoyé en présent à Mécène une de ses bagues, formée de plusieurs pierres précieuses, et Mécène, dont le goût pour ces sortes de bijoux était bien connu, lui répondit tendrement par ces vers où il lui dit que « dans l'affliction où le jette la maladie d'un ami qu'il aime comme la vie, le plus cher objet de ses vœux n'est ni l'émeraude, ni le brillant béryl, ni la perle fine, ni l'anneau qu'a poli l'habile Bithynien, ni la pierre de jaspe. »

Lugens te, mea vita, nec smaragdos,
Beryllos quoque, Flacce, nec nitentes,
Nec percandida margarita quæro,
Nec quos Thynica lima perpolivit
Anellos, nec ïaspios lapillos.

V

Il est étonnant que nous ne trouvions aucun fragment ayant rapport à sa femme Térentia, qu'il aima passionnément, dont la beauté et les charmes étaient sans pareils, mais dont les caprices et l'inconstance lui causèrent bien des tourments. Ce furent entre eux une suite continuelle de ruptures et de raccommodements, c'est-à-dire de divorces et de noces sans cesse renouvelés, ce qui attirait sur lui

(1) Hist. de la vie et des poésies d'Horace, 2e éd., t. II, p. 408. (2) On lit aussi lugent, lugente, lucente, lucentes. Les variantes de ces cinq vers sont on ne peut plus nombreuses. On n'en compte pas moins d'une vingtaine. Cf. A. Lion, p. 41-44.

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