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ministres d'État, sortis récemment du conseil (MM. Posse et Stjerneld). C'était la question de la cassette royale. En réalité, il n'y avait point eu de cassette royale, dans le sens d'une caisse publique. Les finances de Suède sont réglées par deux bureaux ou cours administratives, dont l'une, le Riksgælds kontor, dépend entièrement des dé putés de la diète, ayant seuls les fonctions de faire des emprunts ou dettes publiques pour les besoins de l'État, aussitôt que les ressources ordinaires votées par la diète sont insuffisantes; l'autre, le Stats kontor, qui recueille les diverses recettes de l'État pour les placer à la banque nationale et pour prendre ensuite, selon les demandes du roi arrêtées en plein conseil d'État et contresignées par le ministre des finances, les sommes nécessaires au service du royaume. Il est bien entendu que toutes ces dispositions doivent être conformes aux termes mêmes du budget voté par la diète; les comptes-rendus des dépenses sont ensuite contrôlés par la cour des comptes, sauf toutefois la liste civile constituant le premier titre du budget et l'allocation pour les frais de la diplomatie qui fait partie du deuxième titre. Ainsi, les sommes déterminées par ces deux parties du budget sont laissées à la libre disposition du roi en dehors de toute délibération dans le conseil, sans contrôle ultérieur et sans obligation de compte rendu. On voit donc aisément, disait l'opposition, que l'allocation faite par les États à chaque diète pour les frais d'ambassades permanentes ou accidentelles, ne pouvait amener constitutionnellement la création d'une caisse d'État particulière qui put faire des emprunts et contracter des dettes.

Cependant, le fait avait eu lieu, le gouvernement le reconnut après bien des détours. Il avait d'abord parlé d'un simple arriéré dans la cassette royale; mais l'on avait su bientôt que cet arriéré existait depuis plus de vingt années, et, bien qu'il fût réduit à environ 775,000 rixd. beo, il avait dépassé 1,000,000 rixd. beo (1). En outre, pour faire face aux

(1) L'allocation annuelle ne s'élevait pas au-dessus de 400,000 rix. beo.

dettes accumulées, un système de crédit avait été, on le pensa du moins, constitué en dehors du conseil, et pourtant signé par le roi, par l'ancien ministre d'État, M. Wetterstedt, et le secrétaire d'état Skogman; il était effectué concurremment avec le compte très-embarrassé de la petite colonie de SaintBarthélemy, placée sous l'administration personnelle du roi ; en sorte qu'une espèce d'effets publics, à l'insu des états généraux et sans leur autorisation, avait été mise en circulation, et l'opposition osa dire qu'il avait été fait à l'étranger des emprunts et des crédits à compte courant à un taux très-élevé. La diète ne croyait pouvoir avouer ce système sans exposer le crédit public à la déconsidération. C'eût été d'ailleurs, au point de vue légal, se jeter dans des voies dangereuses, et dont la loi fondamentale a rigoureusement fermé l'entrée (1).

Mais ce débat entre le roi et les états avait un côté plus déplorable encore, en ce qu'il mettait la couronne entièrement à découvert, et que les amis du pouvoir, dans toutes les Chambres, n'ayant plus d'autres arguments à faire valoir pour engager la diète à payer l'arriéré, en furent réduits à vanter les droits du chef de l'Etat à la reconnaissance publique. Sans doute, aucun membre ne voulut contester ces droits, mais l'argument fut regardé comme peu parlementaire et peu concluant. D'autre part, il apparaissait clairement à l'opposition que si, après tant d'efforts restés jusqu'alors inutiles pour résister aux tendances, suivant elle, absolutistes du pouvoir, elle laissait échapper cette occasion, elle ne pouvait espérer de trouver un autre moyen de transaction pour faire adopter par le gouvernement cette masse de lois depuis long-temps rédigées, ou déjà plusieurs fois votées par les chambres ou bien seulement projetées et désirées comme né

(1) L'expérience du règne de Gustave III avait appris à la Suède à so tenir sur ses gardes à ce sujet. Les delles énormes que ce prince lui a léguées ont été pour elle une leçon dont elle veut montrer qu'elle a profité.

cessaires au bien-être politique ou matériel de la nation. Tels étaient, par exemple, les nouveaux codes de lois civiles et pénales; telle encore une loi sur l'émancipation du travail et de l'industrie, laquelle loi n'attendait plus depuis longtemps que la promulgation; telle une loi relative à l'organisation communale, à la subsistance des pauvres; telle enfin la grande question de la réforme du système représentatif, pour laquelle la volonté royale était loin de témoigner aucune sympathie. L'idée d'une transaction avec cette volonté, quand on eut trouvé une question qui l'intéressait personnellement, parut donc toute naturelle à beaucoup de députés qui considéraient d'ailleurs la somme demandée comme une bagatelle, comparativement à la dignité et à la considération de la couronne, qu'il fallait, suivant eux, soutenir avant tout. Mais, d'une part, les hommes qui nourrissaient cette illusion, et il s'en trouva plusieurs dans le comité du budget, parmi lesquels le comte Horn, tout récemment encore et depuis longtemps membre de l'opposition, ne purent déterminer quelles seraient les concessions du roi, dans le cas où la diète consentirait à payer la dette; ils ne pouvaient point davantage garantir l'assentiment des États, dont la division en quatre ordres, votant séparément, laissait la majorité douteuse. Il n'y avait donc aucun point d'appui sur lequel cette transaction désirable eût pu être opérée. Il fallut laisser la question suivre naturellement sa destinée. Après avoir tenté de la résoudre dans le comité du budget, tandis que le roi faisait les mêmes efforts dans un comité secret, on vit que le monarque, loin de fléchir, se croyait en droit d'exiger des états le paiement de l'arriéré, sans aucune condition.

L'opposition n'était cependant pas disposée à sanctionner ce précédent; et tandis que, suivant l'ancienne méthode pratiquée avec tant d'habileté par l'ancien ministre comte Wetterstedt, on essayait de gagner des votes, déjà l'esprit public prenait une attitude plus décisive encore, et, en

définitive, après avoir subi toutes les phases du débat, la demande du gouvernement et tous les amendements proposés furent rejetés à la majorité absolue.

En même temps, cette majorité avait réussi à faire connaître sa force de résistance, par rapport à d'autres objets relatifs au budget. Les ministres, ou plutôt les amis du gouvernement, qui, pendant leur absence, entreprirent de plaider sa cause, subirent plus d'un échec dans leurs demandes pécuniaires; en revanche, ils accusèrent hautement l'opposition, et surtout le comité du budget, de vouloir renverser les fondements du royaume. L'ordre des paysans se montra en effet très-rigoureux pour toutes les dépenses qui ne lui parurent pas absolument nécessaires. Il donna cependant avec les autres ordres une preuve, que tout en se déclarant ami des économies, il n'était point incapable de bienveillance et d'équité. Le roi avait fait savoir aux États qu'il venait de fixer une pension pour les anciens conseillersd'État Akerhielm et Hard, et le secrétaire-d'État Hartmansdorff, qui, tous les trois sortis du conseil, n'avaient point été promus à d'autres charges, et Sa Majesté avait demandé une allocation pour le paiement de ces pensions. Les États rejetèrent ces dispositions, du moins en ce qui touchait MM. Akerhielm et Hartmansdorff, à cause sans doute des dispositions hostiles qu'ils avaient montrées en 1838 contre. la presse ; mais ils fixèrent généreusement une pension pour le comte Hard, qui n'était point en réalité très-populaire, mais qui se trouvait sans fortune et avec une famille nombreuse. La diéte, qui se prolongea fort avant dans l'année 1841, conserva toujours le même caractère, en cela différent de celui des précédentes, que le moyen ordinaire de gouvernement, qui consiste à temporiser et par là à s'assurer plus facilement de la majorité vers la fin de la diète, quand les bancs des Chambres se font déserts, n'eut point cette fois le même succès. Les formes constitutionnelles si compliquées par lesquelles on arrive à trouver la majorité absolue dans le cas

où les Chambres ont pris des déterminations opposées, se montrèrent complètement insuffisantes à garantir la marche régulière des affaires. Dans certaines questions qui sont de nature à ne pouvoir être rejetées, comme celles qui concernent le budget, si, par exemple, deux Chambres ont voté contradictoirement au vœu des deux autres, le comité, après s'être emparé de ces questions, reçoit dans son sein un nombre de députés nommés à cet effet par les Chambres, de manière à pouvoir trancher la difficulté par un simple vote affirmatif ou négatif. En pénétrant au fond des choses, on s'aperçoit immédiatement que cette matière est loin d'être aussi simple qu'elle le paraît à une première vue. Sans doute lorsque les quatre Chambres se sont également partagées en deux avis exactement contraires, par exemple, celles des nobles et des prêtres, contre celles des bourgeois et des paysans, la difficulté est nulle. Il ne peut y avoir aucun débat préalable pour déterminer sur quoi l'on doit voter. L'alternative se pose d'elle-même. Si deux Chambres prennent une même décision, tandis que les deux autres Chambres prennent une décision contraire à celle des premiers ordres, dans son esprit, sans se rencontrer pour cela entre elles dans les termes; si dans une question de finances les nobles et les prêtres votent par exemple une certaine somme, tandis que les ordres des bourgeois et des paysans ont voté un chiffre plus ou moins élevé, mais sans avoir voté entre eux le même chiffre, il est déjà plus difficile d'obtenir une solution. Et c'est ici que se révèlent tous les vices d'une mauvaise organisation représentative, où s'usent les forces du paysen débats sans portée, en arguties infécondes, et dont les complications absorbent le temps d'autant plus précieux des législatures, qu'elles sont encore séparées par des intervalles de quatre années, à une époque et dans un pays où les besoins des peuples sont si grands et se multiplient si rapidement.

Jusqu'à la diète présente, le gouvernement avait toujours disposé de la majorité dans les comités. Bien que les ques

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