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place importante dans l'État, plus on a d'intérêt à sa bonne administration. Des gens qui n'ont rien à perdre, ne craignent que pour leur liberté; tandis que ceux qui occupent un rang élevé, ont à défendre à la fois leur liberté, leur position sociale et leurs propriétés 1. »> « Dans l'empire romain, où » le peuple obéit au sénat comme le corps » obéit à l'âme; où les volontés de ce sénat » ont force de lois, il faut nécessairement

>> modo inter se congruens, parum mihi quidem idonea >> videtur ad capessendam rempublicam. » Epistola prima ad Cæsar. de republ. ordinanda. C'est aussi l'opinion d'Aristote. « Jadis, chez certains peuples, dit celui-ci, l'artisan et le mercenaire étaient sur le même pied que l'esclave et l'étranger. C'est ce qui existe encore à présent dans beaucoup de lieux; et jamais un État bien policé ne fera d'un artisan un citoyen actif... Quelle différence y a-t-il en effet entre les artisans ou autres mercenaires, et les esclaves, sinon que ceux-ci appartiennent à un particulier, et ceux-là au public? » Politique, l. III, c. 6.

1 «

Equidem ego sic apud animum meum statuo : cui>> cumque in sua civitate amplior, illustrior que locus » quam aliis est, ei magnam curam reipublicæ. Nam cæ» teris, salva urbe, tantum modo libertas tuta est. »

» que la sagesse préside à ses conseils. Nous » avons vu nos pères accablés sous le poids » des guerres les plus désastreuses, man» quant d'argent, de chevaux, de soldats, » ne jamais poser les armes et disputer l'empire avec un courage indomptable...... Or » ces prodiges se sont opérés par la vigueur » de leurs délibérations bien plus que par » la bravoure de leurs armées. »

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Dans ces mêmes lettres, Salluste blâme hautement la philosophie sceptique et matérialiste, qui avait achevé de corrompre les Romains, et dont le grand César faisait profession publique 1 (7). « Pour moi, dit-il, je

1 On peut juger des mœurs d'un État par ses idées religieuses: c'est un thermomètre infaillible. César avait traité de fables devant le sénat tout ce qu'on rapportait d'une autre vie : « La mort, disait-il, n'est point une peine, >> c'est la fin de toutes nos peines. » Tout le sénat pensait à peu près comme César; car, en prononçant un discours très-adroit pour engager cette grande assemblée à ne pas condamner à mort les conjurés, il n'aurait eu garde de hasarder des paroles qui pussent blesser ses collègues. Caton lui-même ne s'en fâche point. En répondant à César,

>> pense que la divinité tient les yeux ou

verts sur toutes nos actions, et qu'elle

>> distribue tôt ou tard aux bons et aux mé>> chants leur juste récompense.

pas

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César fut sans doute flatté de l'hommage

que lui faisait de ses lumières un homme d'un tel talent (8). Les usurpateurs ne sont fâchés d'avoir les politiques de leur côté, ne fût-ce que pour prouver qu'ils ont raison d'être les plus forts. Salluste s'étant rendu au camp de César, en fut parfaitement accueilli. Il le suivit en Espagne et revint à Rome avec lui, en 706, sollicita la questure, l'obtint, et fut ainsi réintégré dans le sénat, deux ans après en avoir été exclu. En 708, il fut élevé à la dignité de préteur, et peu après il épousa cette Térentia que Cicéron avait répudiée, parce qu'elle était vieille et

il se contente de dire, « qu'il a disserté ingénieusement et habilement sur la vie et sur la mort : « Cæsar bene et composite de vita et morte disseruit. » Comment était-il possible de parler de réformes à une telle nation?

acariâtre, pour prendre une jeune et riche héritière et rétablir ainsi ses affaires délabrées. Bien que Pompée fût mort, le parti de la république n'était pas entièrement abattu. Caton et Scipion venaient de rassembler en Afrique une armée considérable. César y fit passer des légions dont il donna le commandement à Salluste. Il le chargea d'aller s'emparer des magasins de l'ennemi dans l'île de Cercine. L'exécution de cet ordre semblait offrir de sérieuses difficultés; mais César, en homme habitué à vaincre, lui dit : « Je n'examine pas si ce que je vous >> demande est possible ou non allez et >> réussissez! » Salluste ne rencontra point d'obstacles. Toutefois ce seul trait semble prouver qu'aux yeux de César lui-même, notre historien n'était pas sans talents militaires.

César étant resté vainqueur de tous ses ennemis, préposa Salluste au gouvernement de la province romaine d'Afrique, qui com

prenait la Lybie maritime, la Numidie et la Mauritanie. Son séjour en Numidie lui suggéra l'idée d'écrire l'histoire de la Guerre contre Jugurtha, guerre longue et importante, mêlée de succès et de revers, qui fit éclater la vieille haine du peuple contre les nobles, et dégénéra bientôt en discordes sanglantes. Pénétré de ses devoirs d'historien, Salluste ne négligea rien pour se procurer de bons renseignements sur les lieux, les personnages et les événements qu'il avait à dépeindre 1.

La longue résistance de Jugurtha contre la puissance romaine rappelle la guerre soutenue depuis quinze ans contre la France par un chef non moins fameux, et plus grand homme peut-être que Jugurtha. Avec quel intérêt doivent relire l'ouvrage de Salluste ceux qui ont suivi les phases diverses de l'invasion française en Afrique! Il ne reste des villes décrites par notre historien que les noms et quelques ruines; mais les mœurs, les habitudes, la manière de combattre de ces peuples, en partie nomades, guerriers et cavaliers infatigables comme les Numides, sont à peu près les mêmes. Néanmoins les Arabes, bien meilleurs soldats que les Numides, ont de plus le fanatisme musulman et une haine implacable contre les infidèles envahisseurs de leur patrie. C'est ce qui ne permet guère d'as

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