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Mais il n'eut garde non plus d'oublier le soin de sa fortune. Il revint à Rome, en 710, chargé d'immenses richesses. Les Africains l'y suivirent pour demander justice de ses concussions. Et l'on assure que, moyennant une somme d'à peu près un million de francs qu'il compta au dictateur, il obtint le droit de jouir en paix des dépouilles de l'Afrique.

César fut assassiné 1: sa mort amena le deuxième triumvirat, dont l'illustre consul, qui avait joué un si grand rôle dans la conjuration de Catilina, fut l'une des premières victimes 2.

signer un terme à cette lutte acharnée, tout inégale qu'elle paraisse, tant qu'il existera en Afrique une seule tribu arabe, et un seul homme capable de la soulever au nom du Prophète. 1 L'an de Rome 710.

2 L'an de Rome 711.

Cicéron se couvrit de gloire par sa conduite dans la conjuration. Mais le génie, l'éloquence, la vertu mêmẹ ne suffisent pas pour jouer le premier rôle au milieu des guerres et du choc des partis. Aussi se trouva-t-il en quelque sorte effacé, lorsque Rome se tut devant l'épée du vainqueur de Pharsale. Il n'eut aucune part directe

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Salluste, content de sa fortune, résolut de vivre désormais selon ses goûts, en simple particulier. Peu jaloux d'imiter ces vieux Romains, qu'il avait tant vantés dans ses livres, et qui décoraient, dit-il, de leur

à la mort de César les conjurés, qui connaissaient son caractère faible et indécis, n'eurent garde de le mettre dans leur secret. Cependant on peut dire qu'il contribua beaucoup à préparer cette catastrophe par ses opinions connues en faveur de la liberté et par ses épigrammes contre le gouvernement du dictateur. Cicéron était l'homme à bons mots de son époque, et ses bons mots étaient répétés par tous les beaux esprits de Rome. Aussitôt que le coup fut porté, il s'en déclara l'apologiste; il proclama Brutus et Cassius des héros, des hommes divins: et pourtant il avait élevé César jusqu'aux nues! il avait mainte fois vanté sa douceur, sa clémence, sa bonté!... Ceci toutefois peut s'expliquer. César était sans doute un bon maître; mais le maître de la patrie, aux yeux des républicains rigides, ne pouvait être qu'un tyran. Et puis Cicéron, malgré toute sa philosophie, ne pouvait se résoudre à végéter loin des affaires publiques; il ne pouvait se passer d'un grand théâtre et des applaudissements populaires; c'était son bonheur et sa vie; c'était aussi, à ce qu'il croyait, son droit. L'histoire fidèle de cette époque se retrouve dans sa correspondance, qui est comme le reflet de son âme. Quelle tendresse et quel dévouement pour ses amis! Quelle

gloire leurs modestes demeures, il acheta un immense terrain sur le mont Quirinal, y construisit un palais magnifique, fit planter ces vastes jardins, cités comme la plus délicieuse promenade de Rome, et les orna

religion pour sa patrie, pour la liberté et pour la gloire! Tout ce qu'il y avait de grand et de puissant dans Rome, au sénat et dans l'armée, était en rapport avec Cicéron ; tous ceux qui avaient besoin d'une recommandation pour obtenir une charge, une grâce, un service, s'adressaient à lui, et jamais il ne refusait personne. C'est ce qui nous a valu cette quantité de lettres si rapidement jetées au milieu des agitations de sa vie politique, et qui répandent tant de jour sur les affaires de son siècle : lettres si curieuses, si instructives, d'un coloris si naturel et si frais, qu'en changeant seulement les noms, vous croiriez souvent lire quelques chapitres des révolutions de notre temps. Le caractère de Cicéron est tout à fait moderne: c'est un homme de nos jours, un homme du monde, spirituel et enjoué, sachant concilier au besoin Épicure et Zénon; aimant la plaisanterie, se permettant des jeux de mots, et mêlant sa personnalité à tout; parlant à tout le monde et à tout propos de ses succès d'orateur, d'écrivain, de consul et même de général d'armée; louant volontiers tout le monde, afin d'en être loué. Ce qu'il y a de plus étonnant en lui, c'est la facilité et l'activité prodigieuse de son génie. Dans cette vie si tourmentée, il ne perd aucun instant. Ses malheurs

d'une multitude de chefs-d'oeuvre amassés à grands frais. Il se procura aussi plusieurs maisons de campagne, afin d'en avoir pour toutes les saisons, et entre autres celle de Tivoli, qui avait appartenu à César. Salluste, au milieu des richesses de l'Afrique, du luxe de l'Asie, des arts de la Grèce, professant

ne l'empêchent point d'étudier et d'écrire; et il embrasse tout l'art oratoire, la politique, la philosophie, la religion. Il est le représentant le plus complet du mouvement intellectuel de cette grande époque. Cet homme qui, dans les périls de l'État et dans les siens propres, montre une irrésolution et une pusillanimité extrêmes, qui calcule toutes les chances, voit tous les partis à prendre et ne sait s'arrêter à aucun, eut pourtant du courage, et un courage rare dans quelques grandes occasions où les yeux du public, fixés sur lui, exaltaient son âme. Il en eut beaucoup contre Catilina et contre Antoine; il paya son dévouement, la première fois, de l'exil, et, la seconde fois, de sa vie. Presque tous ces fameux orateurs qui figurèrent dans les troubles civils de leur patrie, depuis Démosthènes jusqu'à Cicéron, et depuis Cicéron jusqu'aux Girondins, périrent de mort violente, emportés et broyés dans ces grandes luttes qu'ils ne purent diriger ni modérer, et où la victoire finit par demeurer, non pas à l'éloquence ou à la vertu, mais à la force brutale.

dans ses discours toute l'austérité des vieilles maximes républicaines, et conservant avec cela le goût de l'étude et un besoin insatiable de renommée, nous présente un type singulier, mais qui caractérise bien la civilisation de cette époque, l'une des plus éclairées et des plus corrompues dont l'histoire fasse mention. Pour retrouver de tels contrastes, tant de sévérité dans les principes et tant de relâchement dans la conduite, tant d'estime pour la pauvreté et tant d'amour pour la vie opulente et voluptueuse, il faudrait descendre jusqu'au philosophe Sénèque, dont les ouvrages ne sont pas moins curieux à étudier sous ce rapport que ceux de notre historien. Comme il continuait à déclamer contre la perversité de son siècle, il s'attira de vives répliques de la part de ceux dont il blessait la réputation ou les intérêts 1. Et il se fit un grand nombre d'en

↑ En effet, ses censures frappaient comme un fouet sanglant sur beaucoup de gens alors en évidence, qui occu

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