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res, et occupèrent les contrées voisines de notre mer (10). Les Perses s'approchèrent davantage de l'Océan. Ils se firent des cabanes avec les carcasses de leurs vaisseaux renversés; le pays ne leur fournissait point de matériaux, et ils n'avaient pas la faculté d'en tirer d'Espagne, ni par achat ni par échange, l'étendue de la mer et l'ignorance de la langue empêchant le commerce. Insensiblement ces Perses se mêlèrent aux Gétules par des mariages, et comme, dans leurs fréquentes excursions, ils avaient changé souvent de demeures, ils se donnèrent euxmêmes le nom de Numides. Encore aujourd'hui, les habitations des paysans numides, appelées mapales, ressemblent assez, par leur forme oblongue et par leurs toits cintrés, à des carènes de vaisseaux.

Aux Mèdes et aux Arméniens se joignirent les Libyens, peuple plus voisin de la mer d'Afrique que les Gétules, qui étaient plus sous le soleil, et tout près de la zone brûlante. Ils ne tardèrent pas à bâtir des villes, car, n'étant séparés de l'Espagne que par un détroit, ils établirent avec ce pays un commerce d'échange. Les Libyens altérèrent peu à peu le nom des Mèdes; et, dans leur idiome barbare, les appelèrent Maures (11).

Ce furent les Perses dont la puissance prit surtout un accroissement rapide et bientôt l'excès de leur population força les jeunes gens de se séparer de leurs pères, et d'aller, sous le nom de Numides, occuper, près de Carthage, le pays qui porte aujourd'hui leur nom. Les colons anciens et nouveaux, se prêtant un mutuel secours, subjuguèrent ensemble, soit par la force, soit par la terreur de leurs armes, les nations voisines, et étendirent au loin leur nom et leur gloire: particulièrement

Sed Persæ intra Oceanum magis; iique alveos navium inversos pro tuguriis habuere, quia neque materia in agris, neque ab Hispanis emundi aut mutandi copia erat mare magnum et ignara lingua commercia prohibebant. Hi paullatim per connubia Gætulos sibi miscuere; et quia, sæpe tentantes agros, alia, deinde alia loca petiverant, semet ipsi Numidas adpellavere. Ceterum, adhuc ædificia Numidarum agrestium, quæ mapalia illi vocant, oblonga, incurvis lateribus tecta, quasi navium carinæ sunt.

Medis autem et Armeniis accessere Libyes (nam hi propius mare Africum agitabant; Gætuli sub sole magis, haud procul ab ardoribus): hique matura oppida habuere; nam, freto divisi ab Hispania, mutare res inter se instituerant. Nomen corum paullatim Libyes corrupere, barbara lingua Mauros, pro Medis, adpellantes.

Sed res Persarum brevi adolevit; ac postea nomine Numidæ, propter multitudinem a parentibus digressi, possedere ea loca quæ proxume Carthaginem Numidia adpellatur. Dein, utrique alteris freti, finitumos armis aut metu sub imperium coegere; nomen gloriamque sibi addidere; magis hi qui ad nostrum

ceux qui, plus rapprochés de notre mer, avaient trouvé dans les Libyens des ennemis moins redoutables que les Gétules. Enfin, toute la partie inférieure de l'Afrique fut occupée par les Numides, et toutes les tribus vaincues par les armes prirent le nom du peuple conquérant, et se confondirent avec lui.

XIX. Dans la suite, des Phéniciens, les uns pour délivrer leur pays d'un surcroît de population, les autres par des vues ambitieuses, engagèrent à s'expatrier la multitude indigente et quelques hommes avides de nouveautés. Ils fondèrent, sur la côte maritime, Hippone, Hadrumète et Leptis. Ces villes, bientôt florissantes, devinrent l'appui ou la gloire de la mère patrie. Pour ce qui est de Carthage, j'aime mieux n'en pas parler que d'en dire trop peu, puisque mon sujet m'appelle ailleurs.

En venant de Catabathmon, qui sépare l'Égypte de l'Afrique, la première ville qu'on rencontre le long de la mer est Cyrène, colonie de Théra, puis les deux Syrtes, et entre elles la ville de Leptis, ensuite les Autels des Philènes, qui marquaient la limite de l'empire des Carthaginois du côté de l'Égypte; puis viennent les autres villes puniques. Tout le reste du pays, jusqu'à la Mauritanie, est occupé par les Numides. Très-près de l'Espagne sont les Maures; enfin, les Gétules au-dessus de la Numidie. Les uns habitent des cabanes; les autres, plus barbares encore, sont toujours errants. Après eux sont les Éthiopiens, et plus loin, des contrées dévorées par les feux du soleil.

Lors de la guerre de Jugurtha, le peuple romain gouvernait

mare processerant, quia Libyes quam Gætuli minus bellicosi. Denique Africa pars inferior pleraque ab Numidis possessa est; victi omnes in gentem nomenque imperantium concessere.

XIX. Postea Phoenices, alii multitudinis domi minuendæ gratia, pars imperii cupidine, sollicitata plebe et aliis novarum rerum avidis, Hipponem, Hadrumetum, Leptim, aliasque urbes, in ora maritima condidere: hæque brevi multum auctæ, pars originibus præsidio, aliæ decori fuere. Nam de Carthagine silere melius puto quam parum dicere, quoniam alio properare tempus monet.

Igitur ad Catabathmon, qui locus Egyptum ab Africa dividit, secundo mari, prima Cyrene est, colonia Thereon, ac deinceps duæ Syrtes, interque cas Leptis; dein Philenon Aræ, quem, Ægyptum versus, finem imperii habuere Carthaginienses; post aliæ punicæ urbes. Cetera loca usque ad Mauretaniam Numida tenent proxume Hispaniam Mauri sunt. Super Numidiam Gætulos accepimus, partim in tuguriis, alios incultius vagos agitare; post eos Ethiopas esse; dein loca exusta solis ardoribus.

Igitur bello Jugurthino pleraque ex punicis oppida et fines Carthaginiensiam,

par ses magistrats presque toutes les villes puniques, ainsi que tout le territoire possédé en dernier lieu par les Carthaginois. Une grande partie du pays des Gétules et de la Numidie, jusqu'au fleuve Mulucha, obéissait à Jugurtha. Le roi Bocchus étendait sa domination sur tous les Maures: ce prince ne connaissait les Romains que de nom, et nous-mêmes nous ne l'avions jusqu'alors connu ni comme allié ni comme ennemi.

En voilà assez, je pense, sur l'Afrique et sur ses habitants, pour l'intelligence de mon sujet.

XX. Lorsque, après le partage du royaume, les commissaires du sénat eurent quitté l'Afrique, et que Jugurtha, malgré ses appréhensions, se vit en pleine possession du prix de ses forfaits, il demeura plus que jamais convaincu, comme ses amis le lui avaient affirmé à Numance, que tout dans Rome était vénal. Enflammé d'ailleurs par les promesses de ceux qu'il venait de combler de présents, il tourne toutes ses pensées sur le royaume d'Adherbal. Il était actif et belliqueux, et celui qu'il voulait attaquer, doux, faible, inoffensif, était de ces princes qu'on peut impunément insulter, et qui sont trop craintifs pour devenir jamais redoutables. Jugurtha entre donc brusquement à la tête d'une troupe nombreuse dans les États d'Adherbal, enlève les hommes et les troupeaux, avec un riche butin; brûle les maisons, et fait ravager par sa cavalerie presque tout le pays; puis il reprend, ainsi que toute sa suite, le chemin de son royaume. Il pensait qu'Adherbal, sensible à cette insulte, s'armerait pour la venger, ce qui deviendrait une occasion de guerre. Mais celui-ci sentait toute l'infériorité de ses moyens militaires, et d'ailleurs il comptait plus sur l'amitié du peuple

quos novissume habuerant, populus romanus per magistratus administrabat; Gætulorum magna pars et Numidia usque ad flumen Mulucham sub Jugurtha erant Mauris omnibus rex Bocchus imperitabat, præter nomen, cetera ignarus populi romani; itemque nobis neque bello neque pace antea cognitus.

De Africa et ejus incolis ad necessitudinem rei satis dictum.

XX. Postquam, regno diviso, legati Africa discessere, et Jugurtha, contra timorem animi, præmia sceleris adeptum sese videt; certum ratus, quod ex amicis apud Numantiam acceperat, omnia Romæ venalia esse; simul et illorum pollicitationibus accensus, quos paullo ante muneribus expleverat, in regnum Adherbalis animum intendit. Ipse acer, bellicosus; at is quem petebat, quietus imbellis, placido ingenio, opportunus injuriæ, metuens magis quam metuendus Igitur ex improviso fines ejus cum magna manu invadit; multos mortales cum pecore atqua alia præda capit, ædificia incendit, pleraque loca hostiliter cum equitatu accedit. Dein cum omni multitudine in regnum suum convertit, existu:nans dolore permotum Adherbalem injurias suas manu vindicaturum eamque em belli caussam fore. At ille, quod neque se parem armis existumabat, et

romain que sur la fidélité des Numides. Il se borne à envoyer Jugurtha des ambassadeurs pour se plaindre de ses attaques. Quoiqu'ils n'eussent rapporté qu'une réponse outrageante, Adherbal résolut de tout souffrir plutôt que de recommencer une guerre dont il s'était d'abord si mal trouvé. Cette conduite fut loin de calmer l'ambition de Jugurtha, qui déjà s'était approprié dans sa pensée tout le royaume de son frère. Comme la première fois, ce n'est plus avec une troupe de fourrageurs, mais suivi d'une armée nombreuse qu'il entre en campagne, et qu'il aspire ouvertement à l'entière domination de la Numidie. Partout, sur son passage il répand le ravage dans les villes, dans les campagnes, et emporte un immense butin. Il redouble ainsi la confiance des siens et la terreur des ennemis. XXI. Placé dans l'alternative d'abandonner son royaume ou de s'armer pour le défendre, Adherbal cède à la nécessité : il lève des troupes et marche à la rencontre de Jugurtha. Les deux armées s'arrêtent non loin de la mer, près de la ville de Cirta; mais le déclin du jour les empêche d'en venir aux mains. Dès que la nuit fut bien avancée, à la faveur de l'obscurité, qui régnait encore, les soldats de Jugurtha, au signal donné, se jettent sur le camp ennemi. Les Numides d'Adherbal sont mis en fuite et dispersés, les uns à moitié endormis, les autres comme ils prennent leurs armes. Adherbal, avec quelques cavaliers, se réfugie dans Cirta; et s'il ne s'y fût trouvé une multitude d'Italiens assez considérable pour écarter des murailles les Numides qui le poursuivaient, un seul jour aurait vu commencer et finir la guerre entre les deux rois. Jugurtha in

amicitia populi romanı magis quam Numidis fretus erat, legatos ad Jugurtham de injuriis questum misit: qui tametsi contumeliosa dicta retulerant, prius tamen omnia pati decrevit quam bellum sumere, quia tentatum antea secus cesserat. Neque tamen eo magis cupido Jugurtha minuebatur: quippe qui totum ejus regnum animo jam invaserat. Itaque non, ut antea, cum prædatoria manu, sed magno exercitu comparato, bellum gerere cœpit, et aperte totius Numidic imperium petere. Ceterum, qua pergebat, urbes, agros vastare, prædas agere; suis animum, terrorem hostibus augere.

XXI. Adherbal uti intellegit eo processum, uti regnum aut relinquendum esset, aut armis retinendum, necessario copias parat, et Jugurthæ obvius procedit. Interim haud longe a mari, prope Cirtam oppidum, utriusque consedit exercitus; et quia diei extremum erat, prælium non inceptum. Ubi plerumque noctis processit, obscuro etiam tum lumine, milites Jugurthini, signo dato, castra hostium invadunt; semisomnos partim, alios arma sumentes, fugant funduntque. Adherbal cum paucis equitibus Cirtam profugr., multitudo togatorum fuisset, quæ Numidas insequentes manibus prohibuit, uno die inter duos reges cœptum atque patratum bellum foret. Igitur Jugurtha oppidum cir

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vestit donc la ville : tours, mantelets, machines de toutes espèces, rien n'est épargné pour la faire tomber en sa puissance. Il voulait, par la promptitude de ses coups, prévenir le retour des ambassadeurs, qu'il savait avoir été envoyés à Rome par Adherbal avant la bataille. Cependant le sénat, informé de cette guerre, députe en Afrique trois jeunes patriciens chargés de signifier aux deux princes ce décret : « Le sénat et le peuple romain veulent et entendent qu'ils mettent bas les armes, qu'ils terminent leurs différends par les voies de droit, et non par la guerre : ainsi l'exige la dignité de Rome et des deux rois. >>

XXII. Les commissaires romains mirent d'autant plus de cé lérité dans leur voyage, qu'à Rome, au moment de leur départ, on parlait déjà du combat et du siége de Cirta; mais on ne soupçonnait pas la gravité de l'événement. Au discours de ces envoyés, Jugurtha répondit que rien n'était plus cher et plus sacré pour lui que l'autorité du sénat; que, dès sa plus tendre jeunesse, il s'était efforcé de mériter l'estime des plus honnètes gens; que c'était à ses vertus, et non pas à ses intrigues, qu'il avait dû l'estime du grand Scipion; que ces mêmes titres, et non le défaut d'enfants, avaient déterminé Micipsa à l'admettre par adoption au partage de sa couronne; qu'au reste, plus il avait montré d'honneur et de courage dans sa conduite, moins son cœur était disposé à tolérer un affront; qu'Adherbal avait formé un complot secret contre sa vie; que pour lui, sur la preuve du crime, il avait voulu le prévenir; que ce serait, de la part du peuple romain, manquer aux convenances et à la

cumsedit; vineis, turribusque, et machinis omnium generum, expugnare adgreditur, maxume festinans tempus legatorum antecapere, quos, ante prælium factum, Romam ab Adherbale missos audiverat. Sed postquam senatus de bello eorum accepit, tres adolescentes in Africam legantur, qui ambo reges adeant, senatus populique romani verbis nuntient: Velle et censere cos ab armis discedere; de controversiis suis jure potius quam bello disceptare: ita seque illisque dignum fore.

XXII. Legati in Africam maturantes veniunt, eo magis quod Romæ, dum proficisci parant, de prælio facto et oppugnatione Cirtæ audiebatur: sed is rumor clemens erat. Quorum Jugurtha accepta oratione respondit sibi neque majus quidquam neque carius auctoritate senati esse: ab adolescentia ita enisum uti ab optumo quoque probaretur; virtute, non malitia, P. Scipioni, summo viro, placuisse; ob easdem artes ab Micipsa, non penuria liberorum, in regnum adoptatum esse; ceterum, quo plura bene atque strenue fecisset, eo animum suum injuriam minus tolerare: Adherbalem dolis vitæ suæ insidiatum; quod ubi comperisset, sceleri obviam isse: populum romanum neque recte neque pro

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