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IV. PARTIE.

ACTES MINISTÉRIELS,

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ADMINISTRATIFS ET JUDICIAIRES.

DU DIVORCE.

EN proclamant que la religion catholique est la religion de l'Etat, la Charte constitutionnelle a-t-elle aboli le divorce pour les époux catholiques?

Nous avions cru jusqu'à ce jour que tous les Français, étant égaux devant la loi, pouvaient tous exercer les mêmes droits; mais voici que des juges s'avisent de scruter les

consciences, et de faire rendre compte aux citoyens de leurs opinions religieuses, avant que de leur rendre la justice qui leur est due. Si vous vous présentez aujourd'hui devant tel ou tel juge pour lui demander la dissolution du noeud qui vous lie à une femme adultère, il ne s'informera point si vous avez la preuve du fait dont vous vous plaignez : il vous demandera si, dans votre jeunesse, vos parens vous ont appris à croire au pape, à la transubstantiation ou à tel autre dogme; et, si vous lui répondez d'une manière affirmative, il vous déclarera que, quelle que soit votre croyance ultérieure, vous ne pouvez être admis à faire usage du divorce, parce que la loi qui l'autorise n'est pas faite pour les Français qui ont cru au pape.

Telle est la réponse que vient de faire en termes équivalens, le tribunal de Nancy, par son jugement du 22 juin dernier, à un époux qui lui demandait le divorce.

Si cet étrange jugement était resté enseveli dans le greffe du tribunal, nous nous serions peut-être abstenus d'en parler par respect même pour les juges qui l'ont

rendu; mais après la publicité scandaleuse qu'on lui a donnée, et les éloges dont il est devenu l'objet, il ne nous est plus permis de garder le silence.

Le gouvernement, dont la sollicitude inquiète va souvent au-delà de ce qu'on lui demande, s'est imaginé pendant long-temps qu'il ne lui suffisait pas de veiller aux intérêts temporels des citoyens; il a voulu prendre lui-même le soin de leur salut dans l'autre vie; et la direction des consciences est devenue une de ses principales affaires.

Comme pour être infaillible il ne suffit pas d'être roi ou ministre, et que la conscience d'un citoyen obscur peut être aussi droite et aussi éclairée que celle d'un prince ou d'un courtisan; comme d'ailleurs les dragons, les gendarmes et les bourreaux sont des gens très-peu persuasifs, on a fini par croire que l'empire que les gouvernans voulaient exercer sur les consciences était une véritable tyrannie, et cette croyance nous a valu la liberté des cultes.

Dès que cette liberté a été proclamée, chaeun a pu servir Dieu à sa manière: celui qui

avait été élevé dans une croyance contraire à sa raison, a pu embrasser plus tard une croyance différente, ou modifier celle qu'il avait reçue. Cette liberté de penser a débarrassé le gouvernement et les magistrats du soin de s'informer de la religion des citoyens, toutes les fois qu'ils ont eu à les élever à des emplois publics, ou à prononcer sur leurs différens.

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Le mariage a été considéré dès-lors sous son véritable point de vue. Le législateur faisant abstraction de tout dogme religieux; n'a vu dans cette institution que les rapports qu'elle établit entre les époux, leurs enfans et leurs familles respectives. Il a laissé aux parties la faculté de faire bénir leur union

par les ministres de leur religion; mais il ne leur en a pas fait un devair; et l'omission ni l'accomplissement des cérémonies religieuses n'ont eu aucune influence sur les intérêts temporels des époux, les seuls qui soient dans le domaine de la loi.

Ces principes admis pour le mariage, le législateur ne devait pas en admettre d'autres pour le divorce; tout ce qui lui impoftait à

cet égard, était de savoir si ce moyen de dissoudre une union malheureuse présentait plus d'avantages que d'inconvéniens. Du reste, il ne devait entrer dans aucune considération religieuse, puisque le divorce n'étant jamais un devoir, chacun devait avoir la faculté de s'en abstenir ou d'en faire usage, selon que ses principes religieux le rejeteraient ou l'admettraient.

Pour donner aux consciences la plus grande liberté possible, et ne pas mettre les citoyens entre leurs intérêts et leurs principes religieux, le législateur ne s'est pas contenté d'admettre le divorce; il a admis en outre la séparation de corps, et il a ainsi présenté à des époux malheureux le moyen de relâcher un lien qui, dans leur opinion, ne peut pas être brisé.

Mais remarquons bien qu'en établissant le divorce et la séparation de corps, la loi n'a pas dit: Vous, protestans, vous userez du divorce, parce que votre religion vous le permet; et vous, catholiques, vous ne ferez usage que de la séparation de corps, parce que votre religion vous défend de faire usage

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