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gloire, et une certaine impuissance d'esprit contre les fantaisies. Souvent ceux qui, avec un esprit inquiet, étoient sous le prince à la tête des affaires, ont pensé que les besoins de l'état étoient les besoins de leurs petites

âmes.

Il n'y a rien que la sagesse et la prudence doivent plus régler que cette portion qu'on ôte, et cette portion qu'on laisse aux sujets.

Ce n'est point à ce que le peuple peut donner qu'il faut mesurer les revenus publics, mais à ce qu'il doit donner; et, si on les mesure à ce qu'il peut donner, il faut que ce soit du moins à ce qu'il peut toujours donner.

CHAPITRE II.

Que c'est mal raisonner, de dire que la grandeur des tributs soit bonne par ellemême.

ON а VU, dans de certaines monarchies, que de petits pays exempts de tributs étoient aussi misérables que les lieux qui, tout autour, en étoit accablés. La principale raison en est, que le petit état entouré ne peut avoir d'industrie, d'arts, ni de manufactures, parce qu'à cet égard il est gêné de mille manières

par le grand état dans lequel il est enclavé. Le grand état qui l'entoure a l'industrie, les manufactures et les arts; et il fait les règlements qui lui en procurent tous les avantages. Le petit état devient donc nécessairement pauvre, quelque peu d'impôts qu'on y lève.

On a pourtant conclu de la pauvreté do ces petits pays, que, pour que le peuple fût industrieux, il falloit des charges pesantes. On auroit mieux fait d'en conclure qu'il n'en faut pas. Ce sont tous les misérables des environs qui se retirent dans ces lieux-là pour ne rien faire : déjà découragés par l'accablement du travail, ils font consister toute leur félicité dans leur paresse.

L'effet des richesses d'un pays, c'est de mettre de l'ambition dans tous les cœurs; l'effet de la pauvreté est d'y faire naître le désespoir. La première s'irrite par le travail, l'autre se console par la paresse.

La nature est juste envers les hommes; elle les récompense de leurs peines; elle les rend laborieux, parce qu'à de plus grands travaux elle attache de plus grandes récompenses. Mais, si un pouvoir arbitraire ôte les récompenses de la nature, on reprend le dé

goût pour le travail, et l'inaction paroît être le seul bien.

CHAPITRE III.

Des tributs dans les pays où une partie du peuple est esclave de la glèbe.

L'ESCLAVAGE de la glèbe s'établit quelquefois après une conquête. Dans ce cas, l'esclave qui cultive doit être le colon partiaire du maître. Il n'y a qu'une société de perte et de gain qui puisse réconcilier ceux qui sont destinés à travailler avec ceux qui sont destinés à jouir.

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CHAPITRE IV.

D'une république en cas pareil. LORSQU'UNE république a réduit une nation à cultiver les terres pour elle, on n'y doit point souffrir que le citoyen puisse augmenter le tribut de l'esclave. On ne le permettoit point à Lacédémone : on pensoit que les Ilotes cultiveroient mieux les terres lorsqu'ils sauroient que leur servitude n'augmenteroit pas on croyoit que les maîtres seroient meilleurs citoyens lorsqu'ils ne dé

I Plutarque.

I

sireroient que ce qu'ils avoient coutume

d'avoir.

CHAPITRE V.

D'une monarchie en cas pareil.

LORSQUE, dans une monarchie, la noblesse fait cultiver les terres à son profit par le peuple conquis, il faut encore que la redevance ne puisse augmenter. De plus, il est bon que le prince se contente de son domaine et du service militaire. Mais, s'il veut lever des tributs en argent sur les esclaves de sa noblesse, il faut que le seigneur soit garant du tribut, qu'il le paye pour les esclaves et le reprenne sur eux : et, si l'on ne suit pas cette règle, le seigneur et ceux qui lèvent les revenus du prince vexeront l'esclave tour à tour, et le reprendront l'un après l'autre, jusqu'à ce qu'il périsse de misère ou fuie dans les bois.

2

C'est ce qui fit faire à Charlemagne ses belles insti tutions là-dessus. Voyez le Liv. V des Capitulaires, art. 303.

2 Cela se pratique ainsi en Allemagne.

CHAPITRE VI.

D'un état despotique en cas pareil.

CE que je viens de dire est encore plus indispensable dans l'état despotique. Le scigneur qui peut, à tous les instants, être dépouillé de ses terres et de ses esclaves, n'est pas si porté à les conserver.

Pierre Ier, voulant prendre la pratique d'Allemagne et lever ses tributs en argent, fit un règlement très-sage que l'on suit encore en Russie. Le gentilhomme lève la taxe sur les paysans, et la paye au czar. Si le nombre des paysans diminue, il paye tout de même; si le nombre augmente, il ne paye pas davantage: il est donc intéressé à ne point vexer ses paysans.

CHAPITRE VII.

Des tributs dans les pays où l'esclavage de la glèbe n'est point établi.

LORSQUE dans un état tous les particuliers, sont citoyens, que chacun y possède par son domaine ce que le prince y possède par son empire, on peut mettre des impôts sur les personnes, sur les terres, ou sur les mar

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