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Cette classe était en quelque sorte privilégiée au sein de l'esclavage. Les liens de leur dépendance devaient être moins rigoureux. Ils avaient pour leur entretien une paye annuelle (annua)1; pour leur usage ou pour leur habitation, quelque lieu du domaine public; et ils devaient avoir, dans l'exercice de leurs charges, une certaine liberté, ils jouissaient même de quelque considération. On eût cru les flétrir en laissant s'introduire, parmi eux, des criminels condamnés, soit aux mines, soit aux combats de l'arène, soit à tout autre châtiment, en un mot, des esclaves de la peine. Le cas se présenta dans la province de Pline. Quelques-uns de ces condamnés s'étaient frauduleusement glissés parmi les esclaves publics. Ils furent découverts; mais leur bonne conduite faisait que Pline hésitait il était bien dur de les ramener à leur châtiment, et bien peu séant de les laisser dans un office de l'État*. Trajan répond: «< Rendez à leur supplice ceux qui ont été condamnés dans les dix dernières années, et, pour les autres, s'il s'en trouve de trop vieux, distribuons-les dans les travaux qui touchent de plus près à la peine: comme le ser

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CONSER. B. M. F. (Fabretti, X, 435.) On trouve d'autres esclaves avec le titre d'ædituus (C. Inscr. latin., t. I, p. 327, 2 col. 1. 23 et 28 (Fastes d'Antium), et ibid., t. V, n° 767); une femme avec le titre de sacraria (ibid., t, V, no 3423).

1. Pline, Ep. X, 40.

2.

Quæ loca serveis publiceis ab cens(oribus) habitandei, utendei <«< causa adtributa sunt, ei quo minus eis locis utantur, e(x) h(ac) lege) « n(ihil) r(ogatur). » (Lex Julia municipalis, ap. Blondeau, Mon. juris antejust., p. 84; et Mommsen, Corp. Inscr. latin., n° 206, 1. 82, t. I, p. 121.) Sur leur vêtement, voy. Isid. de Séville, Orig. XV, 14.

3. « Vel in opus dainnati, vel in ludum similiaque his genera pœna« rum, publicorum servorum officio ministerioque funguntur, atque « etiam, ut publici servi, annua accipiunt. » (Piine le Jeune, Ep. X, 40.) 4. In publicis officiis retinere damnatos non satis honestum pu« tabam. » (Ibid.)

vice des bains, le nettoyage des égouts, la construction des routes ou des forts 1. >>

De même qu'il y avait des esclaves de l'État, il y eut des esclaves de villes. Images de Rome par leurs magistrature, les municipes lui ressemblaient encore par cette organisation du service inférieur, plus ou moins nombreux selon leurs ressources; et, dans leur sein, les collèges et les corporations diverses, les associations légales comme les associations libres, eurent à leur usage des esclaves de communauté : c'est ainsi que les compagnies de publicains envoyaient partout des serviteurs à elles, dressés au manège de leurs rapines (11). Mais, par le dernier degré de cette hiérarchie, nous touchons à la classe des esclaves privés, la plus considérable et de beaucoup la plus intéressante. C'est là que nous allons étudier l'esclavage dans la variété infinie des espèces qui le composent : là surtout, nous pourrons apprécier l'étendue des accroissements qu'il vient de recevoir.

V

Autrefois le même esclave servait le maître à la ville et à la campagne à la campagne plus souvent qu'à la ville, car c'était là que se passait la vie laborieuse du vieux Romain. Mais son domaine s'accrut, les mœurs chan-" gèrent, et le développement de l'esclavage amena le partage de la maison romaine en deux familles : la famille rustique et la famille urbaine, familia rustica, familia

1. Si qui vetustiores invenientur et senes ante annos decem dam• nati, distribuamus illos in ea ministeria quæ non longe a pœna sint. • Solent enim ad balineum, ad purgationes cloacarum, item munitiones « viarum et vicorum, dari. » (Pline, ibid. 41.)*

urbana. Cette distinction passa de l'usage dans la loi elle-même; et pourtant souvent il arriva qu'elle fut négligée dans l'usage, ce qui rendait fort difficile l'application de la loi. Le luxe qui l'avait introduite parut devoir l'effacer par un progrès de plus, quand la noblesse de Rome revint à la campagne, devenue la résidence non plus du travail, mais de la mollesse et du loisir. Le séjour de la ville ou des champs, qui ne distinguait plus parmi les maîtres, ne répondait donc plus à la division légale des esclaves; et, dans le cas où il fallait la constater en justice, on en était réduit à rechercher les intentions, à consulter les registres des pères de famille. Quoi qu'il en soit, il n'y a point d'inconvénient à renfermer la description de l'esclavage privé dans ce double cadre adopté par la loi. C'est ce qu'ont fait la plupart des auteurs qui ont traité de cette matière. En les suivant dans ce partage, nous cmprunterons aussi plusieurs détails à leur exposition3, non sans y joindre les traits divers que nos propres lectures nous auront fournis.

La campagne était, nous l'avons vu, le séjour habituel du Romain de l'àge primitif; c'était là que les vieilles mœurs devaient naturellement se réfugier et se défendre

1. Voyez le titre du Dige:te, XXXIII, vn, De instr. et instrum. legato. Ces désignations générales se retrouvent dans les inscriptions. Sur le revers d'un monument consacré à un membre de la maison des Symmaque, on lit ces mots appliqués à sa fille : « NAERIAE CERELLIAE | SABINAE « PRUDENTIS, | SIME PUELLE | SYMMACHI V. P. | FILIAE | FAMILIA URBANA | AERE « CONLATO | MERIT. » (Ang. Mai. Collect. Vatic. in-4°, t. V, p. 291, no 3.) Voyez aussi Orelli, Inscr., n° 2862, etc.

2. « Urbani intelligendi sunt quos paterfamilias inter urbanos adnu«merare solitus sit, quod maxime ex libellis familiæ, item cibariis deprehendi poterit. » (L. 99, D., XXXII, 1, De legatis.)

3. Pignori, De servis; Popma, De operis servorum, ap. Polen. suppl. à Grævius, t. III, p. 769 et 1294; Creuzer, Abriss der Römischen Antiquitäten; Blair, An inquiry into the state of Slavery, etc.

avec le plus de force et ce fut là aussi que les mœurs nouvelles étalèrent avec le plus d'orgueil leur triomphe, quand s'élevèrent, sur les ruines de ces antiques et médiocres maisons rurales, les fastueuses villa1. Mais, longtemps avant que cette révolution se fût accomplic, elle se préparait; et, sans attendre l'avénement des mœurs étrangères, le vieil esprit romain y travailla par cet instinct qui le portait surtout vers la possession du sol. On avait vu le noble, dès le commencement, joindre à son patrimoine les terres du domaine public, et travailler dès lors à convertir ces possessions prolongées en propriété véritable, à prescrire contre l'imprescriptible droit de l'État; puis, grand propriétaire, poursuivre son œuvre en absorbant tous ces petits héritages que la misère, l'usure aidant, faisait tomber dans ses mains: grave changement, dont le contre-coup se fit sentir de la campagne à la ville, et dont les fatales conséquences seront appréciées plus tard. Dès ce moment, il en est qui se manifestent d'elles-mêmes dans le travail rustique. Le riche, qui avait chassé le pauvre de la propriété, lui substitua bientôt l'esclave, jugeant meilleur d'avoir l'ouvrier que de le louer. Ce changement dans la culture des terres, qui altéra les rapports des classes libres et serviles, modifia considérablement aussi la distribution du travail. Le travail se divisa; les soins divers de l'exploitation se répartirent entre diverses espèces de travailleurs, et ils commencèrent à se classer selon l'importance et la nature de leur emploi.

Les domaines, devenus plus vastes, eurent ainsi leur appareil complet. En tête de la hiérarchie est le régisseur (villicus), et la femme qui lui a été donnée comme épouse

1. M. Dezobry a présenté, avec de grands détails, le tableau de ces ville dans la LXXXI' lettre de Rome au siècle d'Auguste, t. III, p. 271.

pour l'aider, dit Columelle, et aussi pour le tenir dans ses fonctions; puis le sous-régisseur (subvillicus), les surveillants de second ordre (monitores), les gardes des bois ou des champs (saltuarii, circitores), et les conducteurs de travaux (magistri operum).

Ces travaux comprenaient tout ce qui se rattachait à l'exploitation du domaine. Là se rangeaient les laboureurs qu'on choisissait parmi les plus grands; les vignerons, parmi les plus robustes; les esclaves employés à la culture de l'olivier, et ceux qui se partageaient les autres soins secondaires de l'exploitation, des hommes à tout faire: on les désignait par le nom vague de mediastini®. La préparation de ces différents produits, la fabrication de l'huile, du vin, occupaient autant de catégories différentes d'esclaves". Aux travaux appliqués à la terre ou à ses fruits joignez l'élève et l'entretien du bétail, soins auxiliaires de l'agriculture, qui, en Italie, finirent par la ruiner. Des

1. Caton, CXLII et CXLIII; Varron, I, xvi, 4-7; Colum. I, vIII, 1–19. Des inscriptions désignent un esclave villicus d'Auguste: CAES. AUG. SER. VIL. (Muratori, p. 899, n° 7); un villicus d'autres empereurs, AQUILINI VILICI AUGG. (C. Inscr., lat. t. V, no 706; cf. n° 5081); beaucoup d'autres villici (ibid., t. II, no 4552; t. III, no 337, 5616; t. V, no 878, 5500, 5558, 5568, 7448, et Orelli, n° 2875 et 2858, etc.)

2. Orelli, Inscr., n° 2859.

3. L. 8, l. 12, § 15, et l. 15, § ult. D., XXXIII, vп, De instructo et instrum. legato; Colum. I, 1x, 1-3, etc. Un circitor, Lycaonien, esclave du prince. (Mommsen, Inscr. Neapol. lat., n° 2139.) SALTUARIUS. (C. Inscr. latin., t. V, 5548, 5702.)

4. Colum. ibid. 3 et 4.

5. Sarlor, occalor, runcator, messor, etc. »>

6. Colum. ibid. 6. Cf. II, x11 (x1), 7. Il y a dans Gruter trois inscriptions de mediastini, p. 577, n° 3, 4 et 5. L'un d'eux est dit appartenir au prince. (Mommsen, Inscr. Neapol. latin. 6869.)

7. « Cella olearia, cella vinaria; prælatores, servi doleares ou doliarii, etc.) » POMARIUS (ibid. n° 5578); TOPIARIUS; EX HORTIS (ibid. n° 2133, 2894); C. Inser. lat., t. V, 5516); OLITOR (Orelli, no 2861).

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